Comme il fallait s’y attendre, aussitôt revêtu de son costume de président, Bassirou Diomaye Faye a nommé Ousmane Sonko comme Premier ministre. Qui sera donc le véritable président du Sénégal?
Ousmane Sonko Premier ministre
C’est le contraire qui aurait étonné, car le véritable maitre d’œuvre de la victoire de l’élection du nouveau président n’est autre que son mentor. Les rôles se sont inversés, juste par la force des choses, parce que la candidature d’Ousmane Sonko a été rendue impossible du fait que ce dernier ne jouissait plus de ses droits civiques suite à sa condamnation par la justice de son pays. Finalement, bien que son «candidat de substitution» soit le président de la république, Ousmane Sonko en tant que chef du gouvernement sera le véritable chef d’orchestre d’une symphonie qu’il a écrite de bout en bout. Le Sénégal se retrouvera, à s’y méprendre dans un scénario à la Medvedev-Poutine! Ne pouvant faire plus de deux mandats successifs, à l’époque, Vladimir Poutine avait passé, ou prêté si vous préférez, le témoin à son Premier ministre Dmitri Medvedev. Elu président en 2008, ce dernier fit immédiatement de son prédécesseur son Premier ministre qui a eu le temps de se refaire une virginité pour redevenir encore président.
L’histoire russe se réécrit au Sénégal
Et depuis lors, l’homme froid du Kremlin n’a plus quitté les affaires. D’ailleurs, a-t-il jamais quitté les affaires? Non, car c’est un secret de polichinelle que c’était lui qui gouvernait la Russie dans l’ombre de Medvedev. Voici que l’histoire politique russe se réécrit au Sénégal, à quelques différences près, avec d’autres acteurs qui s’entendent également comme larrons en foire. Pour la prochaine élection, a moins d’un tsunami, par exemple, sous la forme d’un divorce entre les deux «amis inspecteurs des impôts», c’est à un jeu de chaises musicales qu’il faudra s’attendre. Et tant que les deux leaders du Pastef dissous, seront sur la même longueur d’onde et ne déçoivent pas le peuple sénégalais, leur longévité au pouvoir est assurée. Sauf que plusieurs cas en Afrique, dont celui nigérien plus proche de nous. Ce sont des bisbilles, certains ont parlé de trahison, entre des alter-égos, qui ont fait voler en éclats, une amitié séculaire entre l’ancien président Mahamadou Issoufou et son successeur Mohamed Bazoum. C’est l’autre face hideuse du pouvoir à qui rien ne résiste!
Le duo de la prison au pouvoir!
Le duo de la prison se retrouve donc à la tête du Sénégal! Commence, ainsi, la dure épreuve du pouvoir pour Bassirou Diomaye Diakhar Faye et Ousmane Sonko. Mais, c’est seul, parce que c’est lui le président officiellement élu, que Diomaye Faye devra rendre compte au peuple de sa gouvernance. Il était si beau dans ses nouveaux habits de président! Il était si heureux entre ses deux épouses, pardon, les deux premières dames. Il est si déterminé à construire un Sénégal nouveau où il fera bon vivre pour chacun et pour tous ses compatriotes. Il est si fier de consolider la souveraineté de ce pays dont il est devenu le cinquième président, seulement à 44 ans.
Il semblait si sincère, en prêtant serment «devant Dieu et devant la nation sénégalaise de remplir fidèlement la charge de Président de la République du Sénégal, d’observer comme de faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution et des lois, de consacrer toutes-ses-forces à défendre les institutions constitutionnelles, l’intégrité du territoire et l’indépendance nationale, de ne ménager enfin aucun effort pour la réalisation de l’unité africaine.» Et c’est à juste titre qu’il a été longuement et chaleureusement ovationné, ce mardi 2 avril, après la prestation de serment, cette épreuve, la plus facile en apparence, mais qui se révèle souvent comme étant la plus difficile au soir des mandats présidentiels! Car, sur le continent, rares sont les présidents qui ne finissent pas parjures au soir de leur magistère.
Attention aux sangsues de la république
Diomaye Faye, fera face à toutes sortes d’adversités, de la part de ses opposants qui, fort logiquement, ne lui laisseront aucun répit. Mais il aura surtout fort à faire pour ne pas succomber à la tentation du culte de la personnalité que ne manqueront pas de lui servir, à satiété, les zélateurs et griots des temps modernes, experts dans l’art de couvrir le prince de louanges pour mieux le piéger. Ces mouches du coche constituent de véritables dangers, ne disant au chef que les flatteries dont il adore s’enivrer. A eux viennent se greffer les politiciens professionnels opportunistes devant l’éternel, qui, sans scrupule, viendront réclamer leur part du gâteau, pour une victoire qui, pourtant, n’est le fruit que des errements de Macky Sall, mais surtout de la stratégie savamment montée par Ousmane Sonko qui s’est trouvé des plans «A», «B», «C» et «D», alors qu’il était en prison, déchu de ses droit civiques.
On ne saurait occulter tous ses sangsues de la république qui ne se priveront sans doute pas d’arpenter, jour et nuit, les couloirs du palais présidentiel pour essayer d’obtenir, des strapontins, des marchés juteux et autres avantages indus. Comme Jésus qui a chassé les commerçants du temple, la maison de son Père, Bassirou Diomaye Faye doit pouvoir faire place nette autour de lui et ne jamais se départir, en tant qu’inspecteur des impôts, du sacro-saint respect du bien public.
Opérer les bons choix
En somme, Bassirou Diomaye Faye doit agir en président de tout le monde, tous ses Sénégalais et Sénégalaises qui ont soif de justice, d’équité, de mieux-être social, et de développement inclusif qui ne laissera à quai aucune région du pays. En matière de politique internationale, avec la souveraineté du Sénégal chevillée au corps, mais ayant également pour étoile polaire «l’unité africaine», le nouveau président de la république saura certainement faire les bons choix, entre partenaires anciens et nouveaux, guidé par le seul intérêt de son peuple.
Monsieur Diomaye Faye, vous êtes maintenant président de la république et avez l’immense honneur de confirmer qu’«aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années», que la démocratie est loin d’être «un luxe pour l’Afrique» et que l’homme africain est «bien rentré dans l’histoire».
Par Wakat Séra