Les Sierra Léonais devaient se rendre aux urnes ce mardi 27 mars pour la suite des élections présidentielle, législatives et locales. Mais ils devront sans doute patienter un peu, car ce second tour est bel et bien reporté. Certes, la Haute Cour de justice a rejeté le recours de report de ce second tour, demande introduite par un militant du parti au pouvoir qui dénonce des fraudes au premier tour, mais dans le même temps, la Cour suprême a renvoyé la tenue du même second tour au 31 mars prochain. Cette seconde manche doit opposer Julius Maada Bio le candidat du Parti du peuple de Sierra Leone (SLPP) de l’opposition, à Samura Kamara, le champion du All People’s Congress (APC), le parti au pouvoir. Le constat est là, que, le cheval de l’opposition devance d’une courte tête son challenger du pouvoir, soit 43,3% contre 42,7% des voix. Chose rare sous les tropiques, où le pouvoir maîtrise de bout en bout les élections qu’il organise toujours pour les gagner, c’est un de ses membres qui crie à la fraude! Et comme pour laisser planer le suspense sur cette élection désormais en suspens, Kandeh Yumkella, un ancien du SLPP, arrivé en troisième position au premier round du combat électoral, s’est refusé à tout alignement pour l’instant. Avec son score de moins de 7%, mais suffisant pour faire de lui le potentiel faiseur de roi, il n’a donné aucune consigne de vote à ses militants.
Attention à trop jouer à réveiller les vieux démons de la violence, dans ce pays habitué aux guerres civiles. La dernière qui a duré neuf années, a laissé des séquelles encore vivaces dans les esprits. Même si les fameux observateurs internationaux et la société civile, avaient salué presque à l’unanimité, la bonne tenue du premier tour de ce triple vote présidentiel, législatif et local, tout peut arriver. Du reste, les partisans des deux camps se sont livrés à une sorte d’échauffement il y’a quelques jours dans des incidents qui inquiètent plus d’un Sierra Léonais, et même la communauté internationale, qui craignent des embrasements dans un environnement où les nerfs des candidats et électeurs sont à vif. Des soupçons de manœuvres électorales sont désormais le sujet de discussion le plus prisé dans les chaumières et sur la place publique sierra léonaises. Si certains s’attendent à ce que l’APC use de tous les stratagèmes pour ne pas perdre «son» pouvoir, les supporters du SLPP dont le favori qui n’est autre que Julius Maada Bio avait perdu la compétition face à Baï Koroma en 2012, sont, eux, persuadés qu’ils ont le vent en poupe et que l’heure est venue pour eux d’être aux affaires.
Les tractations et autres deals, dont seuls les politiciens maîtrisent l’art, sont en cours. Dans cette atmosphère où les propositions les plus indécentes font aisément pencher la balance, les troisième et quatrième du premier tour, plus que jamais courtisés, profiteront-ils de de cette mi-temps rallongée pour mieux monnayer les voix de leurs électeurs? Tout est possible, les voies de la politique étant insondables. En tout cas ce report cache mal le besoin de temps qu’avaient certains pour mieux se préparer. Par exemple ficeler des alliances dans des surenchères de haut vol avec les «faiseurs de roi» encore indécis! Toutefois, il importe que candidats et militants, qu’ils soient du pouvoir ou de l’opposition, sachent que la seule option importante et salvatrice est celle qui doit les conduire à privilégier l’intérêt général. Car, les politiciens eux ne voient, en général midi qu’à leur porte et sont prêts, à marcher sur des cadavres pour prendre le pouvoir! Ce serait dommage pour la Sierra Leone de retomber encore dans les affres d’une quelconque guerre civile alors que le développement de ce pays à l’économie exsangue sonne comme la seule et unique priorité.
Par Wakat Séra
