L’eau c’est la vie. L’adage est aussi vieux que le monde et nul besoin d’argument pour prouver cette vérité immuable, dans le temps et dans l’espace. Pourtant, l’accès au précieux liquide vital, demeure un véritable parcours du combattant, que l’on soit en ville ou en milieu rural. Mangée à toutes les sauces par des dirigeants qui en avaient fait une priorité lors de leurs assauts incessants vers l’électorat, «l’eau potable pour tous», est trop souvent réduite, après les votes, à l’expression de promesse électorale irréaliste.
Les robinets continuent d’être muets pendant des jours, à cause des pannes récurrentes, les femmes n’ont jamais cessé de parcourir de longues distances pour s’approvisionner en eau, souvent après s’être crêpées les chignons à la borne-fontaine, et sur les milliers de forages construits et inaugurés en grande pompe, mais dont plusieurs sont en panne, depuis plusieurs semaines. Le chapelet peut être égrené à satiété, on retombera toujours sur cette problématique de l’eau qui, non seulement rend la vie dure aux populations, mais hypothèque leur épanouissement que les experts qualifient de développement humain durable.
Pas même le puissant slogan «zéro corvée d’eau», porté en son temps par le président du Faso, alors candidat, il y a cinq ans de cela, n’aura permis de changer significativement le quotidien des Burkinabè. Certes, de nouveaux forages, châteaux d’eau et autres ouvrages sont venus augmenter l’existant, mais dans le même temps, la continuité du service reste problématique, compte-tenu des défaillances structurelles de l’organisation du service public. L’insatisfaction de la population est tangible, autant au sein des 30% privilégiés desservis par la nationale des eaux, ONEA, que le reste de la population vivant dans les zones rurales. En attendant Godot, les consommateurs désespérés, tout juste à la périphérie de la capitale Ouagadougou, sont toujours contraints de se ravitailler par le biais de barriques à la propreté plus que douteuse et donc causes de fréquentes maladies diarrhéiques qui viennent mettre le doigt sur un autre problème, et pas des moindres, celui de l’assainissement.
Une plaie apparemment incurable de plusieurs localités du Burkina est sans doute l’assainissement. Véritable fléau à la peau dure, l’absence d’assainissement, en plus de dégrader l’environnement, avec les contenus des WC, déversés, nuitamment et constamment, dans les dépotoirs à ciel ouvert, est à l’origine de plusieurs maladies qui affectent, sans distinction, les adultes, mais surtout les enfants. Et les cas graves et létaux, déciment une population souvent prise au piège de l’ignorance. Dans les villes, l’insuffisance critique des systèmes de traitement des vidanges de nos toilettes est une véritable menace sanitaire et environnementale. Dans les zones rurales, les concessions sont pour la plupart, dépourvues de latrines, faisant de la défécation à l’air libre le sport le plus pratiqué par tous.
La course est lancée pour les candidats aux élections présidentielle et législatives couplées du 22 novembre 2020. Après le dépôt des dossiers, qui sera suivi de leur validation, ou non, par les institutions compétentes, la campagne électorale mettra en piste, des candidats qui jetteront leur va-tout dans le jeu, l’un pour atteindre qui le fauteuil présidentiel, et les autres, les sièges de l’Assemblée nationale. La bataille sera rude, car la conquête de l’électorat ne sera plus une sinécure, les populations devenant, de plus en plus, conscientes des enjeux électoraux. Elles savent désormais recenser, analyser et contrôler les engagements électoraux. Cette avancée de la maturité des électeurs oblige tous les candidats à aussi améliorer leur discours et apporter des réponses pertinentes aux problèmes complexes.
Il est évident que tous les citoyens burkinabè, de toute catégorie sociale, portent le ferme espoir que tous les candidats aux élections politiques, s’imposent le devoir d’inscrire en priorité, des mesures vigoureuses pour éradiquer la corvée d’eau et assurer aux populations, un cadre de vie sain, au cours du quinquennat 2021-2025. Il s’agit d’un devoir politique et d’une obligation morale pour la justice sociale. A l’épreuve de l’expérience du quinquennat échu qui n’est que le reflet des 40 dernières années, la réponse aux problèmes d’eau potable, d’assainissement et d’hygiène ne se limite pas à réaliser des forages, des pompes, des châteaux ou des latrines. Il est plutôt question de changer structurellement la fourniture des services publics, avec 5 repères fondamentaux découlant des attentes légitimes des citoyens:
- Le robinet doit être privilégié partout et pour tous à la place de la pompe manuelle
- Tous les points d’eau potable doivent fonctionner 24/24 et les coupures d’eau doivent être des exceptions
- Les villes doivent faire l’objet d’investissements suffisants pour le traitement des boues de vidange
- La défécation à l’air libre doit être découragée par tous les moyens et le lavage des mains doit être promu partout et en permanence
- Au moins 90% des besoins de financement des plans nationaux pour les objectifs de développement durable en matière d’eau et d’assainissement, doivent être mobilisés par le gouvernement.
Eradiquer la corvée d’eau et assurer un cadre de vie sain pour le bien-être des Burkinabè n’est pas un choix négociable. Les candidats aux élections politiques doivent plutôt se faire le devoir d’approfondir leurs connaissances des causes profondes des problèmes, de tirer leçon des décennies d’échec et de retard, et enfin, avoir le courage d’engager les changements nécessaires pour marquer leur passage dans l’histoire de leur peuple.
Par Wakat Séra