Ils sont 31 membres du nouveau gouvernement, du tout nouveau Premier ministre français, Jean Castex. Pratiquement comme en Afrique, où dans les gouvernements pléthoriques, très à la mode, aux côtés de rares technocrates et véritables hommes d’Etat, figurent des amis, des frères, des cousins, des maîtresses ou d’individus qui ont pour seul mérite, d’avoir mouillé le maillot pour faire tomber le régime précédent. Et comme en Afrique, certains d’entre eux, en l’occurrence, Eric Dupond-Moretti et Roselyne Bachelot, ont su vite retourner leurs vestes, et en déphasage total avec leurs discours d’antan, sont allés à la table du grand manitou. C’est ainsi que le Garde des sceaux, ministre de la justice, Dupond-Moretti, qui s’est occupé, en tant qu’avocat, de plusieurs affaires africaines, a dû «manger son chapeau» pour troquer sa robe de brillant avocat et ténor du Barreau, contre le costume de patron du département de la justice. Pourtant, il pensait que «personne» ne lui ferait cette offre. «Et moi, franchement, je n’accepterai jamais», avait ajouté M. Dupond avec D, sur LCI, dans «L’Entretien d’Audrey».
Sa collègue de la culture et lui ont dû apprendre la leçon qu’il ne faut jamais dire, «fontaine, je ne boirai pas de ton eau». Car si elle avait su qu’on ne dit jamais «jamais», la très amoureuse et passionnée de la Culture, Roselyne Bachelot, déjà ministre sous Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, n’aurait jamais aligné autant de «jamais», pour se renier après. Morceaux choisis: «Le retour de Roselyne Bachelot en politique, c’est totalement inconcevable (…) On ne se baigne jamais deux fois dans la même eau (…) Jamais. J’ai pris cette décision bien avant 2012 et je respecte en général mes engagements. (…) J’aime trop le culture pour en être la ministre». Finalement, Roselyne Bachelot a effectué le revirement total qui l’a ramenée au gouvernement. Emmanuel Macron le lui ayant, sans doute, gentiment demandé. «Le président a souhaité que la culture soit au cœur de ce projet de reconstruction et quand il me l’a demandé, j’ai pensé que je ne pouvais pas refuser». Confession de la nouvelle ancienne ministre qui a été appelée, selon elle, par le «devoir». De plus, pour elle, «être ministre de la Culture est la plus belle fonction de notre république».
En tout cas, ils sont bel et bien propriétaires de maroquins dont l’importance n’est point à discuter, dans une France où la justice est constamment en ébullition et où le secteur culturel a été mis à rude épreuve par le Covid-19. Et c’est certain, vus leurs profils et parcours, ils doivent pouvoir être à la hauteur de leur mission. Et ça ce n’est pas comme en Afrique où le ministre, et même le président de la république, ne sont pas tenus par les résultats. Les dirigeants africains, eux, savent bien qu’ils peuvent, avec quelques bidons d’huile et de sacs de riz, retourner vers ce même peuple qu’ils ont martyrisé, pour solliciter un autre mandat. Les Français, eux, jugent sur pièce, ceux qui les gouvernent durant leur mandat, et celui de l’actuel exécutif ne sera point une sinécure dans cette France où les revendications sociales marques l’actualité, sur fond de vuvuzélas des Gilets jaunes. Sans oublier que le Covid n’a visiblement pas dit son dernier mot et que sa gestion par les dirigeants est très scrutée par les Français, tout comme les citoyens des autres pays.
Les couleurs africaines du gouvernement deviennent plus belles avec la nomination de la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Egalité des chances. Elisabeth Moreno, apportera sans doute le charme et la chaleur de Tarrafal, l’île de Santiago au Cap-Vert. La présence africaine dans le gouvernement Castex, qui on l’espère ne sera pas un casse-tête dans les relations devenues quelque peu tendues entre la France et l’Afrique, aurait pu se renforcer avec l’Ivoirien d’origine, Tidjane Thiam. Les pronostics avant la formation du nouveau gouvernement avait inscrit sur les tablettes, celui-là même qui a dirigé durant quatre années, le Crédit suisse, banque qu’il aurait ramenée à une situation de profitabilité. Peut-être que l’avenir politique de l’ancien ministre ivoirien du Plan et du Développement se trouve sur les bords de la lagune Ebrié où certains le voient bien dans la peau d’un présidentiable.
Par Wakat Séra