Le Lion de Korhogo ne rugira plus. Il est couché, pour emprunter les termes de la Grande Chancelière de Côte d’Ivoire, Henriette Dagri Diabaté. Mais les hommages à lui rendus par ses compatriotes sont dignes du grand homme qu’était Amadou Gon Coulibaly. Ses funérailles ont débuté ce mardi 14 juillet pour prendre fin avec son inhumation le vendredi 17 dans la stricte intimité familiale. Aux côtés des Ivoiriens, les délégations de pays «frères et amis» pleurent AGC. On notait par exemple, ce mardi, la présence de chefs d’Etat comme le Sénégalais Macky Sall, le Premier ministre burkinabè, Christophe Marie Dabiré, le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian qui était porteur du message de compassion de Emmanuel Macron.
Cependant, il y a un souci. Si le président ivoirien Alassane Ouattara voulait propager davantage le Covid-19, il ne s’y prendrait pas autrement. En observant de près le programme des obsèques du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly (AGC) rappelé à Dieu le 8 juillet 2020, l’on a froid au dos au regard des rassemblements des foules que cette cérémonie va engendrer au moment où le nombre de malades de la pandémie augmente à une vitesse exponentielle et que le Conseil national de sécurité (CNS) présidé par le président Alassane Ouattara a décidé, lundi 13 juillet, la fin de l’isolement du Grand Abidjan à partir de ce mercredi 15 juillet 2020. Pire, le non-respect d’une mesure barrière capitale comme le port du masque est devenu le sport national en Côte d’Ivoire, malgré la sensibilisation menée au quotidien par les autorités politiques et sanitaires du pays.
L’hommage du Rassemblement des Houphouetistes pour la paix et la démocratie (RHDP), au Parc des sports de Treichville, prévu le mercredi 15 juillet 2020 de 8h à 12h, va drainer un monde fou que les services de sécurité pourront difficilement canaliser. Le jeudi 16 juillet, l’hommage des populations des savanes, au stade municipal de Korhogo, va durer de 8h à 12h et celui des autres régions de 15h à 18h. Une veillée religieuse est prévue dans la soirée, toujours au stade municipal. Le vendredi 17 juillet 2020, après l’inhumation au caveau familial à Korhogo au nord du pays, les cérémonies de 7è jour se dérouleront au stade municipal de la Cité du Poro.
C’est certain, les mouvements de foule dans le fief du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly, ce grand homme d’Etat, ne seront pas sans risque de contamination à grande échelle pour des populations autochtones qui viendront pleurer leur «espoir» dont le destin a été brisé par la mort, un certain. Il est à craindre que les mesures-barrière qui, entre autres, fixent la barre à 50 personnes maximum pour les rassemblements soient foulés au pied d’autant plus qu’à l’intérieur du pays, les populations semblent ne pas se sentir concernées par les mises en garde du gouvernement qui se débat comme un beau diable pour freiner la maladie. Il ne faudrait donc pas s’étonner que le nombre de malades du Covid-19 grimpe en flèche comme on le constate ces derniers jours.
A titre d’exemple, à la date du lundi 13 juillet 2020, la Côte d’Ivoire comptait 12872 malades confirmés, 84 décès, 5978 cas actifs et 6810 guéris. Chaque soir, la comptabilité faite par le directeur général de la santé, le Pr Samba Mamadou, n’émeut plus les Ivoiriens habitués à tout banaliser. Le cache-nez qui est dit obligatoire, n’est porté que par un nombre réduit de personnes de plus en plus agacées par les restrictions de leur liberté. Devant l’ampleur de la maladie, le gouvernement aurait dû, malgré le haut-rang de la personnalité, réduire les funérailles d’AGC au strict minimum pour éviter la propagation de la maladie. Nul ne saurait contester aux Ivoiriens et encore moins au président Alassane Ouattara, très affecté par la douleur, provoquée par la mort de ce «fils» qu’il comptait installer dans son fauteuil après le scrutin du 31 octobre 2020, de pleurer la disparition tragique de AGC. Mais, il importe également de tenir compte de la présence du Covid-19 dont les ravages dans le monde continuent de faire peur. Et même très peur.
Par Wakat Séra