La tentative de coup d’Etat échouée du 7 janvier 2019 est entourée d’un flou lourd à couper au couteau. Tandis que les autorités parlent d’une situation sous contrôle, d’autres voix révèlent que les choses ne sont pas réellement rentrées dans l’ordre. Les populations expriment toujours leurs inquiétudes, à l’instar de cette mère de famille, qui selon le correspondant de RFI au Gabon, n’a pas voulu envoyer ses enfants à l’école. Les rumeurs les plus folles continuent de circuler. Les réseaux sociaux, hors du Gabon coupé d’internet, sont inondés d’informations diverses, selon lesquelles, entre autres, telle ou telle puissance étrangère, pour sauvegarder ses intérêts dans ce pays, y a dépêché des forces militaires pour muscler le fauteuil de Ali Bongo qui suscite des convoitises ouvertes, en l’absence de son occupant pour raison de convalescence au Maroc.
Il faut le reconnaître, tant dans son modus operandi que sa gestion, cette tentative de coup d’Etat ressemble à une véritable mise en scène ou à un acte d’illuminés. Il prend même des allures d’un faux coup imaginé de toutes pièces pour régler des comptes à certains qui ne sont pas, ou plus en phase avec le régime Bongo. Vrai ou faux, ce putsch, met en évidence un malaise dans un pays où nonobstant les réformes institutionnelles, l’ouverture démocratique et les efforts pour relancer l’économie qui sont siens, Ali Bongo Ondimba, avec son pouvoir hérité de son père, Omar Bongo Ondimba décédé le 8 juin 2009, ne compte pas que des admirateurs. Depuis son élection en septembre 2009 et sa réélection en août 2016, ABO comme on l’appelle affectueusement, est de plus en plus contesté, même si l’opposition portée aujourd’hui par un ancien thuriféraire des pouvoirs Bongo, Jean Ping qui s’est auto-proclamé président à l’issue du scrutin de 2016, n’a jamais su trouver le tempo adéquat pour contrer la marche de Ali Bongo. Cette tentative de coup d’Etat justifie-t-elle le dépit des opposants de prendre le pouvoir par les urnes? Toutes les hypothèses sont possibles et plausibles. En effet, cette action d’apprentis putschistes pourrait bien être un faux complot orchestré par le pouvoir pour opérer une purge dans les rangs de ses contempteurs. Surtout que naïvement ou à dessein, le chef de l’opération a mis en position très délicate, des «dignes et filles et fils de la patrie» en les invitant à se rendre ou à se faire représenter à l’assemblée nationale. Le leader du mouvement annonçait avant l’énumération de ces personnalités militaires et civiles, la mise en place d’«un conseil national de la restauration» dans le but «d’assurer la continuité de l’Etat pour garantir au peuple gabonais une transition démocratique». Le chef putschiste voudrait exposer ces personnes qu’il n’aurait pas agi autrement.
En tout cas, à la suite, entre autres, de l’Union africaine, des Nations unies, de plusieurs pays africains et de la France, on ne peut que condamner avec la dernière énergie toute tentative de prise de pouvoir hors normes constitutionnelles. De même, il urge que les voies démocratiques soient accessibles au peuple et surtout respectées par ceux qui nous gouvernent pour éviter les effusions de sang et chaos qui accompagnent les putschs militaires et autres insurrections populaires.
Par Wakat Séra