Le samedi 18 février 2017, 52è anniversaire de l’indépendance de la Gambie et prise de pouvoir officielle de Adama Barrow devant son peuple. Ils étaient tous là, les chefs d’Etat de la sous-région pour vivre le 52è anniversaire de l’indépendance de la Gambie, faire avec Adama Barrow ses premiers pas aux côtés de son peuple. Ils étaient tous là, surtout le voisin sénégalais qui, a été la véritable catapulte qui a réussi à propulser Yahya Jammey loin de Banjul pour permettre à la Gambie d’enclencher sa marche nouvelle sur les sentiers difficiles de la démocratie. Du coup, au Stade de l’Indépendance, Macky Sall était en terrain conquis, accueilli en sauveur. En tout cas, la lune de miel entre Sall et Barrow, qui n’a d’égale que celle de fiel que vivait le président sénégalais et son ancien homologue gambien, est bien ostensible. Jusqu’à quand durera-t-elle ? Adama Barrow demeurera-t-il éternellement sous la tutelle du grand-frère voisin ? Qu’adviendra-t-il s’il faisait montre de velléités émancipatrices ? Car, ce monde des humains n’étant pas immuable mais toujours changeant, c’est certain que Barrow et Sall ne regarderont pas éternellement dans la même direction.
Toutes les têtes couronnées de l’Afrique de l’ouest étaient donc là. Sauf une, et pas des moindres. Il s’agit ni plus ni moins que du Guinéen Alpha Condé, fraîchement auréolé de la casquette de président de l’Union africaine. Certes, l’homme fort de Conakry avait une excuse officielle de taille : son pouvoir est confronté à une crise sociale importante sur fond de grève dans le secteur de l’Education. Mais le fauteuil laissé vide par Alpha Condé pourrait bien traduire son mécontentement de la manière dont son ami, Yahya Jammey, fut chassé, lui pour qui il a dû négocier départ et exil forcés. Alpha Condé a donc bien pu manifester une rancune tenace pendant que Macky Sall savourait une victoire qui a dû le consoler quelque peu de la défaite cuisante infligée à la diplomatie sénégalaise lors de l’élection du président de la commission de l’Union africaine à Addis-Abeba le 30 janvier dernier. Une partie de la presse sénégalaise avait même crié à la traitrise de la Guinée, comme l’une des causes de la non élection de Abdoulaye Bathily, le candidat du Sénégal.
Et voilà Adama Barrow au pied du mur ! Un plan de développement de la Gambie nouvelle, par la santé, l’économie, les transports, l’éducation, la justice, la réforme d’une armée tribaliste, etc. Un arsenal de balises pour promouvoir les droits humains et surtout la liberté d’expression. Ce sont autant de chantiers auxquels doit s’attaquer, sans perdre de temps, Adama Barrow qui ne connaîtra presque pas de répit. Après la liesse populaire qui a ponctué son retour et maintenant l’enthousiasme qui a accompagné sa prestation de serment sur la terre de ses ancêtres, le jour symbole de l’indépendance de son pays, il lui faudra tout de suite enclencher la marche en avant qui permettra à la Gambie nouvelle de passer du slogan à la réalité. Et pour que ce projet gigantesque ne demeure vœux pieux et ne replonge le peuple gambien dans la désillusion, le nouveau président doit se départir des calculs politiciens pour rassembler large. Toute l’expertise, qu’elle soit locale ou extérieure, qu’elle vienne de l’ancien régime ou du nouveau, doit pouvoir être mise à profit pour reconstruire la Gambie.
Les gambiens l’ont scandé, ils veulent une Gambie démocratique, une Gambie qui avance, au rythme d’une justice libre et équitable. C’est dire combien les attentes sont légion et surtout vives. Dans une Gambie nouvelle, un peuple qui aura mangé à sa faim, avec une jeunesse dont les aspirations seront satisfaites, se tournera naturellement vers la réconciliation nationale pour asseoir la paix et la cohésion sociale, gage de tout développement.
Le président doit travailler très dur pour que ce 52è anniversaire constitue réellement un nouveau départ pour la Gambie qui a hâte de retrouver la place qui est la sienne dans le concert des nations africaines engagées dans le processus démocratique. Les heures euphorisantes de l’installation très officielle succomberont très rapidement à la dure réalité d’une Gambie dépecée au sabre pendant 22 années de règne sans partage de Yahya Jammey.
Par Wakat Séra