Accueil A la une Génocide rwandais: tire-t-on des leçons du passé?

Génocide rwandais: tire-t-on des leçons du passé?

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Plus jamais ça! (Ph. d'illustration L'Anticapitaliste)

30 ans que ça dure, depuis la période sombre du 7 avril au 17 juillet 1994! Comme une plaie incurable, le génocide dont ont été victimes les Tutsis au Rwanda, est plus que jamais purulente, ravivée régulièrement par la flamme du souvenir qui porte bien son nom. Comme un glaive régulièrement enfoncé dans le cœur de sa cible pour lui rafraîchir une mémoire remplie d’images qui hantent encore bien des Rwandais, la commémoration du massacre des Tutsis par les Hutus, est l’occasion toute trouvée pour faire, à raison est-on tenté de dire, le procès de la Communauté internationale, sur ces moments marqués au rouge, au propre comme au figuré.

Condamnées pour complicité, active pour certains et passive pour d’autres, les nations qui auraient favorisé ou n’ont pas empêché cette tuerie sauvage en masse d’hommes, de femmes et d’enfants, dont le seul tort a été d’appartenir à une certaine classe, sont clouées au pilori sans ménagement. Une conscience internationale malmenée par des traces indélébiles comme, par exemple, au Mémorial de Guisozi, à Kigali, où des chaussures d’enfants ne trouveront plus jamais leurs pieds innocents. Un lieu où rares sont, les yeux qui ne laissent couler ne serait-ce qu’une larme, ou des cœurs étreints de douleur ne se laissent envahir par l’émotion, et où des gorges nouées à l’étranglement, ne laissent échapper des sanglots amplifiés par l’écho. Chaque visite au Kigali Genocide Memorial (KGM) est comme une intrusion dans le royaume d’au moins 800 000 morts dont les âmes refusent de reposer en paix, errant continuellement, tant les douleurs subies par les corps qu’elles habitaient étaient d’une atrocité sans commune mesure.

Aujourd’hui, dans l’apparence en tout cas, les Rwandais, par un processus dans lequel les tribunaux communautaires, les fameux «gatchatcha», ont joué un rôle essentiel, bourreaux et victimes se sont réconciliés et ont adopté un quotidien qui place le vivre-ensemble au-dessus de tout. On ne peut qu’en être heureux pour les Rwandais, même si la communauté internationale vit et revit encore dans l’esprit, cet abominable cauchemar,  persécutée par ces heures sombres de l’histoire du «pays des mille collines». Les autorités françaises de l’époque, accusée d’avoir soutenu, ce projet funeste d’élimination en masse de Tutsis, pour des raisons politiques, sont les plus mises à l’index dans ce génocide de 100 jours, le plus rapide de l’histoire. Sauf qu’aujourd’hui, à en croire le président de la Commission de l’Union africaine, Moussa Mahamat Faki, «personne, pas même l’Union africaine ne pourrait se disculper de son inaction». Et c’est «un passé dont il faut tirer les leçons», selon le président rwandais Paul Kagame.

Mais tire-t-on réellement leçon de cette parenthèse de sang comme celles de la Shoah et du génocide arménien? Rien n’est moins sûr! Dans la bande de Gaza, difficile de ne pas penser à un massacre de masse des Palestiniens, tout comme est préoccupante le harcèlement dont sont victimes des minorités, comme celle des Peulh en Afrique, des hommes appartenant pourtant à une catégorie des humains, que le délit de faciès assimile tous à des terroristes.

Il faut que la commémoration du génocide rwandais serve davantage à éviter les erreurs du passé, qu’à se contenter d’accusations à tout vent. C’est ainsi qu’on pourra honorer la mémoire de tous ces Tutsis et leurs défenseurs Hutus massacrés à la machette.

Par Wakat Séra