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Guinée/Dissolution du FNDC: les ONGS et Associations des droits de l’Homme donnent de la voix

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Manifestation en Guinée (Ph. d'illustration)

Les ONGS et Associations des droits de l’Homme donnent de la voix en Guinée, suite à la dissolution du Front national de défense de la Constitution (FNDC).

 LES ONG DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS EN GUINÉE RAPPELLENT LE PRINCIPE FONDAMENTAL DU DROIT À LA LIBERTÉ D’ASSOCIATION

Conakry, le 13 Août 2022 – Nos organisations de défense des droits humains, dont nombreuses sont membres du Collectif des ONG pour des textes respectueux des droits humains, ont pris connaissance de l’arrêté A/2022/1910/MATD/CAB/SGG du Ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation portant dissolution du « Front national de défense de la Constitution ». Bien que nos organisations soient rassurées de voir que l’arrêté cite plusieurs ordonnances et textes de lois afférents au cadre juridique interne et aux engagements régionaux et internationaux de la Guinée, elles remarquent que les dispositions de cet arrêté ne mentionnent aucune disposition particulière qui violerait les différentes lois évoquées. C’est pourquoi, nos organisations estiment que cette mesure est une atteinte à la liberté d’association pourtant consacrée par le droit guinéen et le droit international.

Nos organisations de défense de droits humains en Guinée rappellent aux autorités que :

La liberté d’association est garantie par l’Article 10 de la Charte africaine, l’Article 8 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, et les Articles 12(3), 27(2) et 28 de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance.

Le droit à la liberté d’association est également garanti par l’Article 20 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme, l’Article 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l’Article 15 de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant, l’Article 7(c) de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, les Articles 26 et 40 de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, l’Article 15 de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, l’Article 24(7) de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et l’Article 29 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

La Charte de la Transition en son article 34, ainsi que le Code civil en vigueur en ses articles 1604 et suivants et la loi portant régime des associations.

Les lignes directrices sur la liberté d’association et de réunion en Afrique de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples stipulent que :

« La suspension ou la dissolution d’une association par l’État n’intervient qu’en cas de violation grave de la loi nationale, conformément aux normes régionales et internationales relatives aux droits humains, et ce, en dernier recours. La suspension ne peut avoir lieu que sur ordonnance du tribunal compétent, et la dissolution, à l’issue d’une procédure judiciaire en bonne et due forme et de l’épuisement de toutes les voies de recours possibles. De tels verdicts sont à publier et doivent être fondés sur des critères légaux clairs, conformément aux normes régionales et internationales relatives aux droits humains », COLLECTIF DES ONGs POUR DES TEXTES RESPECTUEUX DES DROITS HUMAINS ET ONGs GUINÉENNES DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS

Le Code civil guinéen précise en son article 1608 concernant la dissolution des associations que « Les associations ne peuvent être dissoutes par le pouvoir exécutif que dans les cas de nullité prévus à l’article 16141 ci-dessous ou par les lois particulières ».

1 Article 1614 : Sont frappés de nullité absolue tous actes entre vifs ou à cause de mort, à titre onéreux ou gratuit, apparents ou simulés, accomplis directement ou par personne interposée qui ne respectent pas les dispositions ci-dessus, relatives à la capacité des associations

Nos organisations souhaitent préciser que le fait de ne figurer « ni sur la liste des organisations non gouvernementales en République de Guinée, ni sur la liste des collectifs d’associations en Guinée, ni dans le répertoire des organisations gouvernementales agréées » ne constitue pas un motif valable de dissolution si l’on considère les définitions suivantes reconnues par le droit international et inscrites dans les lignes directrices :

Une association est un organisme indépendant, organisé et sans but lucratif qui repose sur le regroupement volontaire de personnes ayant un intérêt, une activité ou un objectif commun. Une telle association peut être formelle (de jure) ou informelle (de facto).

  1. Une association formelle (de jure) est une association dotée d’une personnalité juridique.
  2. Une association informelle (de facto) est une association qui n’a pas de personnalité juridique, mais qui a néanmoins une forme ou une structure institutionnelle.

Le groupement de fait (de facto) dont il est fait référence dans l’arrêté du Ministre correspond bien à une association informelle et ne peut être dissoute parce qu’elle n’est pas enregistrée ou sans la bonne et due forme listée plus haut.

Les lignes directrices précisent aussi que « la législation nationale en matière de liberté d’association est, le cas échéant, rédigée dans le but de faciliter et d’encourager la création d’associations et de promouvoir leur capacité à poursuivre leurs objectifs. Ces textes législatifs sont rédigés et modifiés sur la base de processus larges et inclusifs, y compris le dialogue et la consultation avec la société civile. » Il est par ailleurs opportun de préciser que le Collectif des ONG pour des textes respectueux des droits humains collabore depuis quelques années avec le service du MATD en charge de la promotion des associations sur la révision de la loi des associations en Guinée afin de justement mieux encadrer l’exercice du droit d’association en Guinée. Les efforts engagés seraient sans aucun doute dilués si les autorités remettent en cause le droit à la liberté d’association.

Au regard de ce qui précède et conscients des défis sécuritaires et de stabilité auxquels la nation guinéenne est confrontée, les organisations de défense des droits humains, disponibles et disposées à faciliter le dialogue et l’utilisation du droit, recommandent aux autorités de :

  1. Ne pas oublier le passé récent du pays et les raisons qui ont poussé à la création de mouvements citoyens de contestation ;
  2. Respecter leurs engagements sur le respect des droits humains inscrits dans la charte de la Transition
  3. Comprendre que l’intérêt légitime de l’État à la préservation de la sécurité ne doit pas empêcher l’existence d’associations informelles, car des mesures effectives pour protéger la sécurité publique peuvent être prises, par le biais de la législation pénale, sans restreindre le droit à la liberté d’association ;

COLLECTIF DES ONGs POUR DES TEXTES RESPECTUEUX DES DROITS HUMAINS ET ONGs GUINÉENNES DE DÉFENSE DES DROITS HUMAINS

  1. Respecter le droit de manifestation pacifique afin d’ouvrir un couloir d’opportunité à la tenue de rassemblements citoyens de contestation encadrés non violents ;
  2. Favoriser l’établissement de partenariats solides et du dialogue entre le gouvernement, la société civile et le secteur privé tel que préconisé aux États parties dans l’article 28 de la Charte Africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance.

NB : Parce que nous reconnaissons l’indivisibilité et l’interdépendance des droits humains, nous ne citerons pas toutes les organisations et personnes qui adhérent aux principes énoncés mais n’avons aucun doute que la très grande majorité des organisations et personnes défenseures des droits humains en Guinée s’associeront à cette déclaration pour rappeler aux autorités actuelles le caractère sacro-saint des libertés fondamentales et notre volonté de les aider à les respecter tout en garantissant la sécurité des populations.