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Guinée et Mali: quelle efficacité pour les sanctions de la CEDEAO?

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Le colonel Mamady Doumbouya prêtant serment

Le Mali et la Guinée, deux pays de l’Afrique de l’ouest où les putschistes règnent en maîtres, sont toujours dans le viseur de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO). C’est le moins que l’on puisse dire, à la fin de la rencontre extraordinaire au sommet, de l’organisation sous-régionale, que le Ghana a abritée ce dimanche. L’hôte de la réunion, le Ghanéen Nana Dankwa Akufo-Addo, président en exercice de l’institution et ses pairs, n’y sont pas allés de main morte, contre les hommes en kaki, qui ont décidé de faire marcher à reculons, leurs pays engagés sur la voie difficile de la démocratie. Les nouveaux hommes forts de Conakry et surtout du Mali ont donc du souci à se faire, car les sanctions prises par la CEDEAO, les ciblent directement, eux et les membres de leurs familles. En distribuant bons points et mauvais points, sanctions et soutien aux processus de transition malien et guinéen, les têtes couronnées de l’Afrique de l’ouest, comptent bien prouver à la face du monde que les pays membres de l’organisation ne sauraient se soustraire aux règles qui l’encadrent, notamment la condamnation, sans autre forme de procès, des coups d’Etat.

Ils peuvent s’estimer heureux, même si la CEDEAO maintient et renforce ses sanctions contre eux, du fait de la prise de pouvoir par les armes et ses dérives, le Colonel Mamady Doumbouya et ses hommes qui ont mis fin au rêve de présidence à vie de Alpha Condé, qui est tombé, envers et contre tous, sous le charme du 3e mandat de tous les malheurs, marchant dans le sang de ses concitoyens. En effet, la mise en place d’un gouvernement civil dirigé par un Premier ministre civil et l’officialisation d’une charte de transition, dans l’attente prochaine de l’installation du Conseil national de la transition, ont plus ou moins contenté les anciens collègues du président guinéen chassé du pouvoir le 5 septembre dernier. Le sort de ce dernier continue, du reste, de préoccuper la CEDEAO, qui, une fois de plus, a exigé sans condition et en urgence, sa libération. Les nouveaux patrons de Conakry, conscients qu’ils tiennent un otage de poids et que leur prisonnier est loin d’être un enfant de chœur, se soumettront-ils facilement à cette exigence des chefs de l’Etat de la CEDEAO, eux qui ont fermé les yeux et sont demeurés atones et aphones sur toutes les dérives autoritaires du même Alpha Condé? Un autre défi, en plus du délai de six mois proposé aux nouvelles autorités pour l’organisation d’élections, se présente pour l’envoyé spécial de la CEDEAO en Guinée, le docteur Mohamed, un sapeur-pompier reconnu des crises dans la sous-région.

Si la Guinée bénéficie d’une bienveillance relative de la part des censeurs de la CEDEAO, les putschistes maliens qui usent et abusent de subterfuges et rusent pour faire éterniser une période de transition qu’ils avaient pourtant promis de respecter, ont été bien servis en sanctions, même si l’organisation entend apporter son soutien à ce pays confronté à une situation sécuritaire qui va de mal en pis. Mais, rien d’étonnant en ce qui concerne l’insécurité grandissante que vit le Mali, quand ceux qui sont chargés de la défense du territoire, sont davantage préoccupés par les lambris dorés du palais présidentiel de Koulouba.

Certes, la CEDEAO, une fois de plus, doit se remettre en cause, pour n’avoir pas pris la juste mesure des souffrances du peuple malien qui se plaignait de la mal gouvernance érigée en sport national sous le régime de Ibrahim Boubacar Keïta. A moins de l’avoir ignoré exprès par solidarité avec un membre du fameux «syndicat» des chefs de l’Etat qui pensait avoir mis fin aux coups d’Etat militaires, alors qu’il cautionne les coups d’Etat constitutionnels, qui paradoxalement, créent autant, sinon, plus de dégâts humains et économiques. En tout cas, les nouvelles sanctions, notamment les interdictions de voyage et le gel des avoirs financiers qui frappent, sans délai, toutes les autorités de la transition et leurs proches ne sont que les bienvenues, face à la mauvaise foi de dirigeants maliens, qui, visiblement, ont confisqué le soulèvement populaire à d’autres desseins égoïstes et très personnels.

Et, tout naturellement, après s’être consacré à tout sauf à leur mission première d’organiser des élections libres et transparentes pour le retour d’un régime civil et démocratique, le colonel Assimi Goïta et ses hommes, sont arrivés là où tous les attendaient: l’impossibilité de tenir les élections à la date butoir du 27 février 2022. Car, les militaires de Kati le savaient bien, le deuxième putsch qui a failli mettre un coup d’arrêt à la transition et les chantiers, dont celui des assises nationales, qu’ils ont ouverts ne pouvaient que retarder les élections, et donc la remise du pouvoir aux civils. Même s’il ne faut pas verser dans le fétichisme des dates, les auteurs du double putsch au Mali doivent rester à cheval sur le respect des engagements pris alors qu’ils étaient sous menace de sanctions de la communauté internationale pour prise de pouvoir par les armes.

Mais, de quelle efficacité seront les sanctions de la CEDEAO, dans la recherche du rétablissement de la démocratie, tant que les maîtres militaires de Bamako bénéficieront de soutien de certains voisins, ou de puissances étrangères peu ou prou regardantes sur la chose démocratique? Sans oublier les voix discordantes au sein même de la CEDEAO, le propre des pays africains ayant toujours été de s’entendre sur leurs…mésententes?

Par Wakat Séra