Quand les jeunes manifestent contre vous, ils sont tués! Lorsqu’ils manifestent pour vous, ils meurent. In fine, c’est du sceau de la mort que sont revêtus les actions qui découlent de votre pouvoir. Comme ce fut le cas, ce dimanche 1er décembre à Nzérékoré, 900 kilomètres de la capitale, Conakry, lors de la finale du tournoi de football dont le trophée portait le nom du chef de la transition guinéenne, le général Mamadi Doumbouya. Alors que les hôpitaux sont encore bondés de blessés, alors que des parents et proches inconsolables n’ont plus de larmes pour pleurer les leurs, alors que la polémique enfle autour du chiffre officiel de 56 morts que certains trouvent très en-deçà de la réalité, et pendant que le gouvernement a décrété trois jours de deuil, une seule question trotte dans les esprits: comment la mort s’est-elle invitée dans un événement censé célébrer la vie et le rassemblement de la jeunesse? Certes, les matches qui ont dégénéré, provoquant des morts et des blessés au sein des supporters sont légion, à travers le monde. Sauf que ce mauvais clin d’œil du destin, Mamadi Doumbouya n’en n’avait point besoin.
Le flou autour de sa transition élastique à souhait, le débat autour de sa candidature qui n’était pas possible selon la charte mais l’est désormais, les opposants qu’il a contraints à l’exil, les manifestations réprimées dans le sang, l’incendie de dépôt d’hydrocarbures, les interdictions de médias de la presse écrite et audiovisuelle, les morts tragiques et inexpliquées d’officiers de l’armée, la double disparition d’Oumar Sylla alias Foninké Mengué et de Mamadou Billo Bah, cadres du Front national de défense de la constitution (FNDC), la chape de plomb et la peur généralisée imposées à un peuple guinéen qui avait applaudi le coup d’Etat du 5 septembre 2021, croyant à l’avènement du messie, etc., sont autant de cailloux dans les rangers du général Mamadi Doumbouya. Et si la nature doit y mettre du sien, il faut bien craindre pour la Guinée! Non seulement le pays n’arrive pas à sortir de cette transition politique, mais la Guinée pourrait bien être obligée de demeurer sous le gant de fer de Mamadi Doumbouya, qui n’est pas loin de troquer le treillis militaire contre le boubou de civil, à écouter ses affidés, lui-même ne s’étant pas encore prononcé sur sa candidature, ou non, pour la présidentielle.
Mais, à bien analyser ces nouveaux incidents meurtriers de Nzérékoré, ne sont-ils pas, à quelque chose malheur étant bon, un coup de main du destin pour aider le général Doumbouya à changer son fusil d’épaule, au propre comme au figuré? Rétablir la liberté d’expression et organiser des élections libres et transparentes, pour lesquelles il sera un arbitre impartial, c’est ce que le peuple attend du général. Du reste, Mamadi Doumbouya avait, dès les premiers moments de sa prise de pouvoir par la force, affirmé haut et fort, et à toutes les tribunes qui se sont dressées devant lui, ou que lui-même s’est offertes, que ni lui, ni aucun acteur de la transition, ne se présenteraient à aucune élection. Il avait peut-être oublié cet adage universel, selon lequel «le pouvoir corrompt». A moins que ces belles déclarations n’aient été que ruse et subterfuge, pour éviter la main lourde de la communauté internationale qui condamne les coups de force, même celui de Mamadi Doumbouya qui a libéré la Guinée, du Professeur Alpha Condé, lui aussi auteur de coup d’Etat et qui a charcuté la constitution, pour s’offrir un 3e mandat, donc une présidence à vie, si affinités.
Général Mamadi Doumbouya, écoutez le destin, et tous les tournois portant votre nom ne seront que reconnaissance du peuple guinéen qui chantera votre respect de la parole donnée!
Par Wakat Séra