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Guinée: la CEDEAO aboie, le CNRD passe

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Laes coups d'Etat reviennent-ils au goût du jour en Afrique? (Ph. d'illustration)

En Guinée, il est fortement déconseillé d’aller contre le nouvel ordre établi, pour ne pas subir les foudres du Conseil national du rassemblement et du développement (CNRD). Tibou Kamara l’a appris à ses dépens, si l’on en croit les griefs portés à son encontre par les militaires. L’ancien ministre d’Etat à la présidence, ministre de l’Industrie et des PME, conseiller spécial du désormais ancien président guinéen, Alpha Condé, arrêté dans un de ses scénarios de film de guerre, dans la nuit du samedi et relâché dans l’après-midi de ce dimanche, a, sans doute, passé un mauvais quart d’heure. Il est reproché à l’ex homme lige de Alpha Condé, d’avoir enfreint les consignes fermes de neutralité à l’endroit du nouveau pouvoir. L’ancien Premier ministre guinéen, Ibrahima Kassory Fofana, aurait pris l’engagement, au nom de tous les membres du gouvernement dissout, de rester dans les rangs.

Quelle mouche a donc piqué l’ancien ministre pour qu’il contrevienne à cette imposition du CNRD? Pourtant, le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya, lui également au nom de ses frères d’arme putschistes, avait pris l’engagement de ne se livrer à aucune chasse aux sorcières. L’affaire Tibou Kamara, ne serait-elle pas qu’un petit bout visible de l’iceberg de répression menée contre des caciques du pouvoir renversé par le coup d’Etat dominical du 5 septembre dernier? Il faut espérer que non, car le peuple guinéen ne mérite plus de retomber dans le musellement, alors qu’il n’a pas fini de respirer cet air de liberté qui souffle sur la Guinée, après plus d’une décennie de pouvoir de fer. En tout cas ce sont les mêmes Guinéens qui ont applaudi les sauveurs d’aujourd’hui qui manifesteront leur ire demain s’ils ne trouvent plus leur compte avec les libérateurs d’hier.

Ce qui est certain, les putschistes qui ont favorisé le retour au bercail de quatre farouches opposants au suicidaire Troisième Mandat de Alpha Condé et ont engagé des rencontres tous azimuts avec toutes les forces vives de la nation, pour une transition qu’ils veulent, selon leurs dires, «démocratique», sont conscients qu’ils sont surveillés comme de l’huile sur le feu, par la communauté internationale. C’est, d’ailleurs, dans cette logique que des chefs d’Etat, dont le président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), le Ghanéen Nana Akufo-Addo et le président ivoirien Alassane Ouattara, ont rendu une visite aux nouveaux maîtres de Conakry ce vendredi. S’ils n’ont pas pu ramener dans leurs valises, leur homologue déchu, Alpha Condé, qu’ils ont tout de même pu rencontrer, les têtes couronnées de la sous-région sont allées, personnellement et solennellement, notifier à la junte militaire les sanctions prises à l’encontre de ses membres, par l’organisation sous-régionale et leur signifier de vive voix, le deadline de six mois de transition qui leur est accordé.

En tout cas, le CNRD que l’humoriste ivoirien Adama Dahico désigle comme «Condé Neutralisé et Renversé par Doumbouya», est bien conscient que l’après putsch ne serait pas une sinécure. Mais pour répondre aux sanctions de la déterminée CEDEAO, les militaires ont signifié que les affaires de la Guinée se règlent en Guinée et que les membres du CNRD n’en n’ont cure de l’interdiction de voyager, tout comme ils n’ont pas d’argent pour avoir peur du gel de leurs avoirs. Enfin, étant visiblement sur la même longueur d’onde que leur «prisonnier de luxe», les nouveaux hommes forts de Conakry ont déclaré que Alpha Condé ne quittera par la Guinée dont il devient, d’office, un ancien président, sans doute avec les avantages qui vont avec.

Comme quoi, le CNRD souffle, certes, le chaud et le froid, mais, pour ses premiers pas, est loin de naviguer à vue.

Par Wakat Séra