La perpétuité requise contre Moussa Dadis Camara dans le procès historique des massacres du 28 septembre 2009! Ce n’est pas tout, car le ministère public, dans ses réquisitions, demande également une période de sûreté de 30 ans, en plus de la requalification des faits en crimes contre l’humanité. Certes, il ne faut pas tirer sur l’ambulance Dadis. Mais la comptabilité macabre d’au moins 156 personnes tuées et le bilan de centaines de femmes violées, sans oublier les nombreux blessés, peuvent bien justifier cette main lourde, si le tribunal, en délivrant le verdict final, suivait le procureur dans ses réquisitions. Ce procès du 28-Septembre qui tire inexorablement vers sa fin, a déjà sonné une victoire, celle de l’avoir tenu. Les principaux accusés étaient tous des «intouchables» à l’époque des faits, et rien que de les retrouver dans le box, pour répondre de leurs actes ignobles perpétrés contre des populations innocentes, juste pour assouvir la soif de pouvoir d’un individu, est la preuve que justice se fait toujours. Selon que vous serez puissants ou misérables…
Si les avocats de la défense s’attèleront, dans les prochains jours, à sauver leurs clients de la descente aux enfers qui leur est promise, leur tâche ne sera pas une sinécure, tant les récits des témoins qui ont tenu en haleine, des Guinéens qui ne voulaient pas rater la moindre miette de ce jugement, médiatisé en live, faisaient souvent froid dans le dos. A ces témoignages glaçants, difficiles à contredire par des accusés qui…s’accusaient eux-mêmes, se greffe l’émotion impossible à contenir de victimes et parents de victimes qui ne demandent qu’à connaître la vérité pour faire, plus ou moins décemment, le deuil des leurs. Que dire de ces femmes dont l’intimité et la dignité ont été violées, à ciel ouvert, par des soldats que rien ne différenciait d’animaux en rut? Tous les ingrédients sont réunis, pour faire du procès des massacres du 28 septembre, dans le stade éponyme de Conakry, un exemple pour l’avenir. C’est dire combien, en Guinée, ils devront prendre garde, tous ces personnages lugubres qui, l’arme au poing, pensent détenir une puissance surhumaine qui les pousse à commettre sur leurs semblables sans défense, cette ignominie d’un autre âge.
Quelle sera la suite, qui sera aussi la fin, de ce procès qui marquera d’un sceau indélébile l’histoire judiciaire de la Guinée? Tout porte à croire que la cause est perdue pour le capitaine Moussa Dadis Camara. Pourtant, à son retour d’exil de Ouagadougou, l’ancien président par intérim de la Guinée, criait à qui voulait l’entendre, son innocence et sa fierté de pouvoir contribuer à la vérité, dans le cadre de cette affaire. Sa première surprise désagréable était déjà sa comparution en détention, alors qu’il s’attendait à une partie de plaisir que lui offrirait son frère d’arme, le colonel, pardon, le général Mamadi Doumbouya, dont il ne disait que du bien. En tout cas, le capitaine doit certainement maudire, maintenant, ce jour où il embrassait la terre de «sa» Guinée, à sa descente d’avion, en provenance du «Pays des hommes intègres» où il était devenu une figure incontournable, lors de festivités nationales ou des grands matches de football des Etalons du Burkina.
En attendant le verdict final, il faut déjà penser au dédommagement financier des victimes et des familles des victimes qui ont subi ces préjudices, irréparables pour certaines d’entre elles. Surtout ces femmes qui porteront, à vie, ce poids si pesant et avilissant du viol de leur intégrité physique et de leur dignité!
Par Wakat Séra