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Guinée: libérez la presse!

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Il est temps de libérer le journaliste Sékou Jamal Pendessa (Ph. d'archives)

72 heures chrono! C’est l’ultimatum lancé au désormais général Mamadi Doumbouya, pour sortir de ses geôles, le secrétaire général du Syndicat des professionnels de la presse de Guinée, Sékou Jamal Pendessa. Depuis 12 jours maintenant, le journaliste est privé de liberté de mouvoir, croupissant derrière les barreaux. Le seul tort reproché à l’homme de presse, c’est d’avoir appelé à une manifestation contre les restrictions visant les réseaux sociaux et les médias. Tout ça pour ça, est-on tenté de se demander, tant le grief est léger tout comme les arguments brandis par le pouvoir de la transition pour poignarder, une fois de plus la liberté d’expression dans une Guinée où une chape de plomb de plus en plus intenable s’est abattue sur tout ce qui est voix contraire à celle imposée par le pouvoir, au gré des humeurs des dirigeants qui se sont succédé, depuis l’indépendance du pays de Sékou Touré.

Les stylos, micros et caméras des hommes et femmes des médias tremblent à chaque instant, quand ils ne sont pas simplement réduits au silence par les prédateurs de la liberté d’expression. Les populations se voient couper leurs chaînes de télévision et de radio par elles préférées, mais par les autorités, détestées. Les animateurs de la société civile et autres défenseurs des droits humains ont perdu toute verve, craignant les représailles de dirigeants d’une transition sans contour et sans contenu. Les téméraires qui osent encore manifester sont devenus des candidats à la mort, ou au mieux à la prison. Les opposants, à moins de prendre la clé des champs, et d’être ainsi condamnés à l’exil, comme un certain Cellou Dalein Diallo, sont embastillés sans autre forme de procès. Tout se passe comme si le seul programme politique de ceux qui gouvernent les Guinéens a pour pilier, la répression!

Pourtant, ces mêmes Guinéens, persuadés que l’heure des libertés avait sonnée, avaient applaudi à tout rompre, le 21 décembre 2010, malgré une élection calamiteuse, l’avènement d’un opposant historique, Alpha Condé pour ne pas le citer. Mais ils ont vite déchanté, les deux mandats constitutionnels, et le troisième anticonstitutionnel, de celui qui chantait à merveille le doux refrain de la démocratie lorsqu’il se trouvait de l’autre côté du pouvoir, sont vite devenus, pour eux, l’enfer sur terre. Alors qu’ils ont, une fois de plus, cru être sortis de la géhenne, et contraints d’acclamer une prise de pouvoir par les armes, mais qui représentait pour eux la délivrance, ils découvrent que leur chemin de la croix est loin d’avoir pris fin. Les militaires qui ont pris le pouvoir en 2021, ne sont, visiblement pas, pour l(instant en tout cas, le sauveur attendu. Et le mythe de Sisyphe se perpétue donc pour une Guinée qui, malgré son riche sous-sol, végète toujours dans la gadoue du sous-développement et de la privation de toute liberté.

Qui sauvera la liberté d’expression en Guinée? Peut-être les syndicats qui semble être décidés à ramener le train sur les rails du respect de cette valeur si chère à l’Homme. Ils ont ainsi menacé de paralyser le pays par une grève générale illimitée, si dans les 72 heures, à partir du mercredi 31 février, le journaliste Sékou Jamal Pendessa n’est pas libéré. Sa détention provisoire, encore moins tout empêchement de faire son noble métier, n’ont aucune raison d’être. La place du journaliste est au sein de sa rédaction ou sur le terrain pour étancher la soif de ses concitoyens d’être informés. Et surtout pas en prison.

Le grand, bien entendu au figuré, le tout frais général Mamadi Doumbouya, cèdera-t-il à la pression des syndicats? Question à un franc guinéen!

Par Wakat Séra