L’Université de l’Unité africaine (UA), ex Institut africain de Management (IAM), se convainc que «l’école, ce n’est pas seulement à l’université, mais qu’il y a également l’école de la vie», qui ne s’apprend pas qu’entre quatre murs. C’est ainsi que cette prestigieuse école supérieure de formation ultra moderne organise chaque année, et ce depuis 15 ans, une sortie d’étudiants appelée «immersion», qui concerne les premières et deuxièmes années de toute l’Université (Ouagadougou et Bobo-Dioulasso). Pendant une semaine, ces étudiants sont retranchés dans un camp militaire où ils apprennent à vivre, loin de leur confort, sans téléphone, entre autres, avec les militaires qui leur apprennent certaines valeurs. Pour cette année, l’immersion se tient du 12 au 19 décembre 2021 à Bobo-Dioulasso, à l’Ouest du Burkina Faso, avec plus de 900 étudiants concernés, qui sont accompagnés par toute l’Administration de l’Université dont le président du Conseil d’Administration, Dr Moussa Amed Diallo et de son directeur général, M. Alioune Benga. Wakat Séra est allé aux côtés de l’Université de l’Unité africaine pour prendre le pouls de cette aventure qui se déroule au sein du Groupement d’instruction des Forces Armées (GIFA) du Camp Ouezzin Coulibaly.
L’Université de l’Unité africaine (UA) reste fidèle à sa tradition. A l’instar des années précédentes, elle organise, du 12 au 19 décembre 2021, l’immersion de ses étudiants de première et deuxième années à Bobo-Dioulasso, dans la région des Hauts-Bassins à l’Ouest du Burkina Faso.
L’immersion est une initiative que cette Université fait perdurer depuis 15 ans et qui consiste à regrouper les étudiants concernés dans un camp militaire, pendant une semaine, coupés de leurs familles, des téléphones, où ils apprennent, à travers diverses activités, auprès des militaires qui s’occupent d’eux.
L’édition de 2021 qui se déroule à Bobo-Dioulasso concerne au total 930 étudiants, toutes filières confondues, des première et deuxième années. Ceux résidant à Ouagadougou, par un convoi d’une dizaine de cars de transport, ont rejoint leurs camarades de la cité de Sya le dimanche 12 décembre aux environs de 16h au Camp Ouezzin Coulibaly.
Promouvoir des valeurs de discipline, de solidarité, de cohésion sociale
«Nous voulons plus que des diplômés, nous voulons des femmes et des hommes qui ont des valeurs, des valeurs de patriotisme, de respect, de vivre ensemble, de cohésion sociale», c’est en substance l’esprit de l’immersion expliqué par le président du Conseil d’Administration de l’Université, Dr Moussa Amed Diallo.
La rigueur, la discipline, l’assiduité, la ponctualité sont autant de valeurs et de qualités que l’Administration de l’Université de l’Unité africaine (UA), de concert avec les membres du Groupement d’instruction des Forces Armées (GIFA), cherchent à cultiver chez chaque étudiant. Ainsi, ils ont reparti les étudiants en des groupes; 30 au total, dirigés chacun par un chef et son adjoint, qui en assurent la responsabilité.
Au sein de chaque groupe; chez chaque étudiant pris individuellement, la discipline est une exigence, et cela ne se négocie pas. Des instructions fermes sont données aux chefs de groupes qui les relaient à leurs camarades. Il s’agit par exemple du port obligatoire du masque pour toute personne non vaccinée et celui de la carte de vaccination pour les vaccinées, l’interdiction stricte de porter un autre vêtement sur les tee-shirts de l’Université, le jet des sachets et autres objets qui pourraient salir les lieux, le respect de l’heure. La moindre insubordination est sanctionnée et en cas de récidive, le fautif est envoyé au «gnouf», en prison et voit son immersion tout simplement annulée.
Si la rigueur est la règle d’or tout au long de l’immersion, cette aventure est également un cadre qui permet aux étudiants de forger des liens d’amitié et de solidarité. C’est en cela qu’elle est «une très bonne initiative», selon le PCA, Dr Moussa Amed Diallo, «parce que l’immersion permet à nos étudiants de se connaître, de partager leur quotidien ensemble et cela les rend plus solidaires», apprécie-t-il.
Cultiver l’esprit de patriotisme en chaque étudiant
Chez les militaires, le respect des couleurs nationales est une dévotion, le patriotisme est leur marque de fabrique. C’est conscient de cela que l’ex Institut africain de Management (IAM) a confié ses étudiants au GIFA pour qu’il les initie à la culture de cette valeur.
Ces militaires, qui ont à leur charge ces apprenants ayant quitté leurs zones de confort, leur apprennent à travers des formations théoriques, des exercices pratiques, des valeurs telles le don de soi, le service désintéressé, la loyauté, l’amour du pays, le civisme.
Cette période d’une semaine que ces étudiants vont passer aux côtés des Forces Armées nationales leur permet d’apprendre beaucoup sur les militaires. C’est ce que souligne avec justesse le Commandant de la 2e région militaire, le lieutenant-colonel Wilfried Ouédraogo, qui note que «l’immersion permet aux jeunes étudiants de comprendre ce que nous faisons comme travail et aussi de comprendre l’importance de l’Armée pour un pays, et ça c’est capital pour le développement du Burkina Faso».
Le patron de l’Université de l’Unité africaine s’inscrit, lui aussi, dans la même dynamique et déclare à l’endroit des étudiants qu’ «on doit pouvoir s’adapter à des milieux difficiles», conscient que les étudiants peuvent vivre des moments difficiles, car étant coupés de leurs réalités au quotidien. Dr Diallo a martelé à ses étudiants que le Burkina Faso n’est pas uniquement Ouagadougou et Bobo-Dioulasso, qu’il compte au total 8 000 villages, et que chaque étudiant doit être en mesure, dans le futur, de servir dans chacune de ces localités. «Donc nous ne pouvons pas accepter que des femmes et des hommes préfèrent vivre uniquement à Ouagadougou et à Bobo-Dioulasso et ne pas aller servir partout sur le territoire national», clarifie-t-il.
Briser les barrières, rapprocher les étudiants de l’Administration
L’une des visées de l’immersion, à en croire les responsables de l’Université, c’est de rapprocher les étudiants et l’Administration en brisant toutes les barrières possibles. Pour faire passer ce message auprès de leurs apprenants, le personnel s’est mis dans les mêmes conditions que ces derniers, en se pliant aux mêmes exigences: le port des tee-shirts, des cartes de vaccination (tous les membres de l’Administration sont vaccinés), les réveils matinaux, prendre les repas en groupe.
«Notre philosophie est qu’il n’y ait pas de barrières entre l’Administration et les étudiants, de telle sorte qu’on puisse à tout moment et en temps réel résoudre leurs problèmes au quotidien», souligne le PCA, Dr Moussa Amed Diallo. Selon lui, c’est aussi une manière de rassurer les étudiants, en leur montrant qu’ils ne sont pas jetés en pâture, ni sacrifiés dans des conditions difficiles.
Les étudiants apprennent dans le cadre de l’immersion, à vivre d’autres réalités différentes de leur vécu au quotidien. Ils dorment, nombreux, dans des salles communes, les garçons étant séparés des filles. Ils apprennent durant les huit jours au GIFA au Camp Ouezzin Coulibaly, à être indépendants, à se préparer à affronter toute situation qui se présentera à eux. Ils mangent en groupe, les chefs de groupes s’alignant pour prendre la nourriture et l’apporter aux autres membres.
Les étudiants apprécient l’immersion
Kadiatou Coulibaly et Mahéva Ouédraogo sont toutes les deux en Licence 1 Communication à Bobo. Elles étalent des habits qu’elles viennent de laver. Pour elles, l’immersion «c’est cool, mais aussi fatiguant». «C’est aussi amusant», apprécient-elles, car elles «rencontrent beaucoup de personnes» qu’elles ne «connaissaient pas». «Même si on va se quitter après, on ne va pas s’oublier», affirme Kadiatou Coulibaly.
Le manque de sommeil, c’est ce qui est difficile à vivre pour Oumar Kiendrébéogo et Mamoudou Savadogo, tous en Licence 1 Communication à Ouagadougou et d’autres camarades en Marketing. Ils font la lessive. «On ne dort pas assez, on manque de sommeil, on se réveille à 4h du matin», affirment-ils. Néanmoins, ils trouvent l’aventure «cool», «parce que ça va nous apporter plein d’expérience». «Même si nous avons fait quelques semaines ici, dormir à terre, partout où nous irons, nous pourrons le faire aussi, ce n’est pas toujours être dans le confort, il faut souvent sortir pour découvrir certaines réalités, c’est une école de la vie», se convainquent-ils.
Pascaline Kama prend de l’eau au robinet avec beaucoup d’autres étudiants. Elle est en Licence 1 en Droit à Ouagadougou. Elle trouve que l’immersion est «un peu difficile» et elle «essaie de s’adapter». «C’est un peu difficile, ce sont des rencontres avec de nouvelles personnes qui ne sont pas souvent faciles à comprendre, surtout dans les dortoirs, il y en a qui se plaignent beaucoup de fois», raconte-t-elle.
«Ce n’est pas facile ici, sans téléphone, sans matelas, on est écarté de toute chose de la famille», témoigne Oumarou Diallo, en Licence 2 Transport et Logistique Ouaga. Mais il trouve qu’une familiarité va se créer entre camarades étudiants et il «admire» cette cohésion sociale qui se crée entre eux par la même occasion.
Plusieurs activités ont été menées par les étudiants à l’occasion de l’immersion: des visites d’entreprises dans la ville de Bobo-Dioulasso, des actions de salubrité, des activités culturelles. Le premier jour, c’est-à-dire le lundi 13 décembre, l’Université s’est rendue auprès des autorités administratives de la capitale économique du Burkina Faso pour présenter ses civilités et les remercier de leur accueil. Ainsi, les étudiants accompagnés du personnel de l’Administration, se sont rendus à la mairie centrale de la ville de Sya et au Gouvernorat.
Deux forages offerts à la 2e région militaire
A l’occasion de la semaine de l’immersion, l’Université de l’Unité africaine (UA) a inauguré deux forages qu’elle a offerts à la garnison militaire de Bobo, notamment le Groupement d’instruction des Forces Armées (GIFA). Selon le président du Conseil d’Administration, le don a été motivé par les difficultés rencontrées par le GIFA avec l’ONEA (Office national de l’eau et de l’assainissement). En effet, cette zone étant un relief, il y a souvent des difficultés à certaines heures de la journée d’avoir de l’eau pour tous (nous en avons vécu l’expérience). «C’est un petit geste pour tout ce qu’ils nous donnent, pour l’immensité de leur contribution à la formation de ces jeunes», a déclaré Dr Diallo.
Quant au Commandant de la 2e région militaire, le lieutenant-colonel Wilfried Ouédraogo, il a salué «un bel exemple de lien Armée-nation» qui se développe depuis 15 ans entre les Forces Armées nationales et l’Université de l’Unité africaine. «C’est une belle initiative qu’il faut encourager», a-t-il relevé, indiquant qu’ils sont «contents de recevoir ces beaux joyaux» et qu’ils vont tout mettre en œuvre pour bien les entretenir pour qu’ils puissent leur servir.
Le coût de la réalisation des deux forages est estimé à environ 10 millions de F CFA.
Par Siaka CISSE (Stagiaire)