Accueil A la une Inondations en Afrique: faut-il penser à reconstruire l’Arche de Noé?

Inondations en Afrique: faut-il penser à reconstruire l’Arche de Noé?

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Maiduguri sous l'eau

30 morts et au moins 400 000 déplacés pour inondation, suite à la rupture d’un barrage, occasionnée par des pluies diluviennes. Ce n’est pas un film de science-fiction, mais une réalité subie, dans la nuit du dimanche 8 au lundi 9 septembre, par la ville de Maiduguri au Nigéria. Des milliers de personnes, qui ont tout perdu, ont été déplacées face à la furie des eaux. Mais le déchaînement des éléments naturels qui laissent derrière eux, désastres et pleurs, ont frappé, et frappent également, d’autres pays du Sahel, et du reste du continent. Le Tchad, la Côte d’Ivoire, le Bénin, la Guinée, le Niger, le Mali, le Ghana, la Mauritanie, et dans une moindre mesure, le Burkina Faso, pour ne citer que ceux-ci, sont, c’est bien le cas de le dire, dans l’œil du cyclone.

Le constat alarmant, mais réel, de la situation, est résumé par AGRHYMET: (…)«Au cours des 30 derniers jours, les quantités de précipitations enregistrées dans la bande sahélienne et localement au Nord des pays du Golfe de Guinée (Tchad, Niger, Mauritanie, Mali, Nord Nigeria, Sud Guinée, Nord Côte d’ivoire et Nord-est Ghana), étaient globalement supérieures de 120% à 600% à la moyenne de la période de référence 1991-2020. Plus particulièrement, ces quantités des pluies dépassaient la moyenne de 400% à 600% dans le Nord du Tchad, au Nord et au Centre du Niger et dans le Sud-est de la Mauritanie. Les pluies observées dans le Nord des pays sahéliens et ailleurs dans la région ont occasionné des forts écoulements des cours d’eau, et des inondations ayant surpris bon nombre de personnes engendrant des dégâts humains et matériels. Dans les bassins du fleuve Niger à Niamey, la montée des eaux a entraîné une alerte rouge maintenue pendant quatre jours. Des situations d’inondation ont été observées dans le bassin du fleuve Sénégal notamment sur le cours principal à Bakel et dans l’affluent Falémé à Kidira.(…)»

A travers cette partie de la note qu’AGRHYMET, le Centre climatique régional pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, a rendu public, il ne faut pas être un expert en climatologie ou en météorologie, encore moins en inondations, pour affirmer que l’heure est grave et que le ciel, au propre comme au figuré, est loin d’être dégagé. Les cieux sont, encore, bien chargés de nuages, et peuvent, à tout moment s’ouvrir pour déverser une abondance d’eau dont les populations des zones menacées, peuvent et veulent bien se passer. La générosité débordante de la nature ne présage rien de bon, dans des pays où la précarité des habitations est une triste réalité. A cela s’ajoute l’installation de nombreux habitants dans des endroits à risque, où le plus petit excès de pluie entraîne des inondations, avec destruction de maisons, pertes en vies humaines et d’animaux.

A ces éléments qui prouve que la catastrophe hydrique est loin d’être naturelle, mais porte bien la griffe de l’homme, il faut compléter la liste par les écoles et centres de santé construites en matériaux peu fiables, donc à la merci des tornades et grands vents. L’éducation et la santé, notamment dans les pays sahéliens, déjà bien compromises par les attaques terroristes meurtrières et le phénomène désolant des Personnes déplacées internes (PDI), deviennent, alors, de plus en plus, hypothéquées. Et comme les canaux d’écoulement sont parfois inexistants ou simplement bouchés par les ordures qu’y déversent les ménages, l’eau de pluie, ainsi empêchée de circuler en toute fluidité vers des barrages et autres retenues, détruit tout ce qu’elle rencontre sur son passage, au grand désarroi des populations. A cela, il faut ajouter le manque de prévoyance dirigeants dans les politiques d’urbanisation et leur silence, face à l’indiscipline et l’incivisme des populations que les politiques évitent de frustrer, parce qu’ils doivent s’en servir comme vivier électoral.

En tout cas, derrière le changement climatique qui a mis sens dessous dessus le monde, la main humaine est bien visible. Si cette agression permanente de la nature s’appelle industrialisation effrénée dans les pays dits développés, en Afrique, elle porte les noms de déboisement et de mauvaises pratiques dans la vie de tous les jours, en ville comme en campagne. A ce rythme, si rien n’est fait pour rectifier le tir, et adopter des comportements raisonnables pour sauver «la maison commune» en vue de la léguer dans un état décent aux générations futures, il est à craindre un ravage sans commune mesure, du couple sécheresse-inondation.

Ne faudra-t-il pas commencer à reconstruire l’Arche de Noé pour y conserver chaque espèce humaine et végétale, au cas où le déluge viendrait à passer par là? Question aux bourreaux de l’environnement!

Par Wakat Séra