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Interview sur le site de Jeune Afrique: Ablassé Ouédraogo entre remords et regrets

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Le président du parti d'opposition Le Faso Autrement, Dr Ablassé Ouédraogo (Ph. ivorian.net)

A travers cette lettre ouverte adressée «à tous», Ablassé Ouédraogo, président du parti politique Le Faso Autrement, revenant sur des propos parus chez notre confrère Jeune Afrique en 2015, affirme n’être point sectaire. «Tous ceux et toutes celles qui me connaissent, que ce soit sur le plan social ou professionnel, trouvent toujours en face d’eux, un homme «sans frontières», avec un esprit ouvert, qui évolue et s’adapte à tous les milieux», révèle l’opposant qui souligne d’ailleurs avoir contribué par sa «modeste personne à l’essor professionnel et politique de nombre de mes concitoyens sans tenir compte de leur appartenance ethnique ou religieuse.»

«Chers Concitoyens,

Le 8 Juin 2015, en pleine préparation de la campagne pour l’élection du Président du Faso  à laquelle j’étais candidat, j’accordais un entretien téléphonique au journal Jeune Afrique. De la publication du journal qui s’en est suivi, il était dit que j’estimais que mes principaux atouts en tant que candidat étaient que «je suis moaga et de confession musulmane». Malgré mon insistance à ce que le journal Jeune Afrique corrige ces propos qui, pris hors de leur contexte, me font passer de façon mensongère pour un sectaire, celui-ci a préféré maintenir cette forme indirecte d’accusation sans que je ne sache quelles étaient ses réelles intentions. Travaillait-il à discréditer certains candidats au profit d’autres? S’était-il mu en presse téléguidée à la solde d’individus cherchant à porter un coup à la cohésion sociale si chère à notre Patrie? Je ne saurais vous le dire. Ma naïveté d’alors, traduite par la confiance aveugle que j’ai accordée à Jeune Afrique, fut de n’avoir pas réclamé, lu et approuvé l’article en question avant sa publication comme il est de coutume. Cette naïveté a été exploitée par Jeune Afrique et par certains adversaires politiques de l’époque.

De l’échec, Nelson Mandela disait: «L’Echec n’existe pas, soit je gagne, soit j’apprends.» De cette mauvaise expérience avec Jeune Afrique, j’ai appris. Mes propos tels que présentés intentionnellement ont été maladroits, inopportuns et inappropriés. Je l’ai payé chèrement. Je comprends les frustrations et les souffrances énormes que cela a pu causer chez les uns et les autres, et ils sont nombreux. J’en ai également souffert personnellement dans mon for intérieur car ces propos ne réflètent aucunement ni ma  personnalité, ni mes valeurs, ni mes convictions. Tous ceux et toutes celles qui me connaissent, que ce soit sur le plan social ou professionnel, trouvent toujours en face d’eux, un homme «sans frontières», avec un esprit ouvert, qui évolue et s’adapte à tous les milieux. J’ai contribué par ma modeste personne à l’essor professionnel et politique de nombre de mes concitoyens sans tenir compte de leur appartenance ethnique ou religieuse.

Cette lettre ouverte se veut être une expression de regrets et une demande de pardon  en toute sincérité et humilité à toutes celles  et à tous ceux qui auraient souffert de ces propos tels que présentés par Jeune Afrique dans l‘interview du 8 juin 2015. Je crois fermement que des critères d’appartenance ethnique, religieuse ou toute autre, n’ont pas leur place dans le choix de celui ou celle qui doit diriger le Burkina Faso. D’ailleurs, notre Constitution, garant de la paix et de l’unité de notre Pays, nous place tous sur le même pieds d’égalité. Tous ceux qui me côtoient connaissent mon attachement à ce principe d’égalité de tous.

De mon service à notre cher Pays et Continent,

Né le 30 Juin 1953 d’un père cultivateur, l’opportunité m’a été offerte grâce à une bourse de l’Association des Universités Africaines et à une bourse nationale, de poursuivre mes études à Libreville au Gabon et à Nice, en France avant de revenir, une fois le doctorat de 3è cycle es- Sciences Economiques acquis, servir mon Pays en qualité d’enseignant à l’Université de Ouagadougou dès 1982. Par la suite, j’ai entamé une carrière internationale qui m’a amené dans les arcanes de l’Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel (ONUDI), du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) et de l’Union Africaine (UA), de la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), du Bureau des Nations Unies pour la Région Soudano-Sahélienne (BNUS), de la Banque Africaine de Développement (BAD) et de la Commission des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO)  où j’ai contribué à la mise en œuvre de plusieurs programmes de développement multisectoriels en Afrique. Qu’il me soit aussi permis ici de relever avec fierté que j’ai porté haut le drapeau de mon Pays au plan international en ayant été le premier Africain à occuper la fonction de Directeur Général adjoint de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), période durant laquelle j’ai amené l’OMC en Afrique et l’Afrique à l’OMC et organisé pour la première fois, une conférence des ministres Africains chargés du commerce sous l’égide de l’OMC à Libreville au Gabon en 2001. Je me suis également impliqué dans des efforts de paix au Niger, au Mali, au  Liberia, en Guinée Bissau, en Sierra Léone, au Burundi, en Ethiopie, en Erythrée, au Tchad, au Darfour /Soudan et à Madagascar.

Au plan National, j’ai servi mon Pays en qualité de Ministre des Affaires étrangères de 1994 à 1999, période durant laquelle nous avons œuvré à la réorientation stratégique et la mise en œuvre de la politique extérieure de notre Pays à travers l’élaboration du concept de la  « diplomatie de développement ». Nous avons pu replacer le Burkina Faso sur la carte du monde. Suite à l’insurrection populaire des 30 et 31 Octobre 2014, je me suis impliqué dans la gestion de la crise politique et par la suite, participé en tant que co-rapporteur à la rédaction de la charte de la transition tout en menant les consultations et médiations nécessaires avec tous les acteurs clés. Lorsque l’ex-Régiment de la Sécurité Présidentielle a pris les armes en Septembre 2015, les acteurs impliqués de l’époque se souviendront que je me suis également impliqué en jouant le rôle de médiateur, œuvrant ainsi à l’apaisement et évitant l’affrontement entre frères d’armes et le chaos dans notre Pays.

De ma longue carrière professionnelle, aussi bien au plan national (lors de mon passage à l’Université et dans le gouvernement) qu’international (dans les différentes institutions), s’il est une chose dont je me réjouis avec fierté, c’est que partout où j’ai déposé mes valises, j’ai servi mon Pays et mon Continent avec intégrité et probité car jamais, le nom Dr Ablassé Ouédraogo n’a été cité ni de près ni de loin, dans une affaire de détournements de deniers publics, de corruption ou de mal gouvernance.

De mon engagement en politique             

Pour moi, la politique est un moyen qui doit être mis à la disposition du peuple et pas le contraire. Comme le disait encore récemment un dirigeant occidental,  la politique pour moi «n’est pas un métier», ni un moyen de subsistance mais plutôt un sacerdoce.

Au vu de mon parcours ci-dessus mentionné, certains se poseraient la question «que Diable est-il allé faire dans cette galère qu’est la politique?». Mon éducation et mon parcours m’ont enseigné que la vie ne se résume pas à travailler à amasser de la fortune pour profiter allègrement et narguer une population qui croupit dans la misère, qui manque du minimum pour se nourrir, se loger et se soigner décemment, dont la jeunesse manque du nécessaire pour une éducation de qualité. J’ai fait le serment que tant que je vivrai, je continuerai de concilier, rassembler, partager et dénoncer. Tel est le but de mon engagement en politique.

Que mon engagement en politique serve d’exemple pour mes concitoyens et surtout la jeunesse de mon Pays qui doit comprendre que refuser de s’occuper de politique, c’est refuser de vivre car la politique est ce qui décide de votre vie.

Que Dieu bénisse notre Pays que nous aimons tous!»

Dr Ablassé OUEDRAOGO

Président du Parti Le Faso Autrement, Candidat à l’élection Présidentielle du 29 novembre 2015