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Iran: le regard du Pr Moritié Camara sur la vivacité et la vitalité de la démocratie du pays

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Ceci est une réflexion du Pr Morité Camara qui pose un regard sur la vivacité et la vitalité de la démocratie iranienne. M. Camara explique le système politique de l’Iran et dénonce un « mauvais procès de la presse faite à la démocratie iranienne », dans cette tribune parvenue à Wakat Séra, ce mardi 9 juillet 2024.

Tribune

Si le débat de la compatibilité de l’Islam avec la démocratie représentative était encore pertinent, alors la République Islamique d’Iran en serait l’illustration canonique de cette évidence.

En effet, la République Islamique d’Iran, Israël et le Pakistan sont les seules véritables démocraties du Proche et Moyen-Orient, n’en déplaisent à leurs détracteurs.

La République Islamique contrairement à ce que pensent ou disent les commentateurs (surtout occidentaux), n’a pas été imposée aux Iraniens de facto et de manière autoritaire après le renversement du Shah. Loin s’en faut.

Elle a été le choix délibéré et raisonné du peuple entier qui conformément à son essence, s’est prononcé presque unanimement par le biais du référendum pour son inauguration. Depuis, tous quatre ans, se tiennent des élections générales pour désigner les dirigeants du pays du sommet de l’État aux collectivités administratives et urbaines.

Le Guide Suprême que la Constitution désigné comme la plus haute autorité religieuse du pays, est élu et non désigné par les 88 membres de l’Assemblée des experts, qui sont eux-mêmes élus par les membres du Parlement.

Cette appellation de « Guide suprême », ne figure nulle part dans la Constitution. Elle lui est attribuée uniquement par signe de respect, car il n’est en rien différent des autres citoyens (malgré sa double casquette de chef de la République islamique et de chef religieux du pays), auxquels il est égal devant la loi contrairement à ce qui est sous d’autres cieux notamment, en Afrique.

Son rôle consiste principalement à déterminer la politique générale de l’Iran en coordination avec le Conseil de discernement, à superviser l’exécution des politiques et à arbitrer les conflits qui pourraient naitre entre les trois branches du pouvoir d’État à savoir l’exécutif, le législatif et le judiciaire.

Quant aux élections générales, elles se tiennent régulièrement aux dates et périodes définies par la Constitution et personne n’est autorisé à tergiverser avec cette exigence de la loi. C’est ainsi qu’après la disparition tragique du Président Ebrahim Raïssi, dans le crash de son hélicoptère le 19 mai dernier, la vacance du pouvoir exécutif a été constatée comme le prévoit d’ailleurs l’article 131 de la Constitution qui stipule : « qu’en cas de décès, de destitution, de démission, d’absence ou de maladie d’une durée supérieure à deux mois du président, le premier vice-président assumera les pouvoirs du président ».

C’est ainsi que Mohammad Mokhber, le Premier Vice-président a automatiquement pris la tête de l’exécutif avant de se concerter avec les dirigeants des deux autres pouvoirs législatif et judiciaire pour : « organiser de nouvelles élections dans un délai maximum de 50 jours ». C’est ce qui a été fait avec la tenue du premier tour le 28 juin et le second le 5 juillet 2024.

La presse occidentale a donc tort de parler « d’élections organisées à la hâte ». En effet, le contexte géopolitique actuel du proche et Moyen-Orient où l’Iran est une puissance majeure, nécessite cette célébrité qui est conforme aux lois iraniennes pour doter le pays d’un nouveau président. Sous d’autres cieux, cette atmosphère délétère aurait plutôt servi à rendre élastique la période déterminée par la loi fondamentale pour organiser de nouvelles élections. On ne peut donc pas reprocher aux autorités iraniennes d’avoir respecté les dispositions constitutionnelles. Cela est donc un mauvais procès de la presse faite à la démocratie iranienne.

En plus, les dés ne sont jamais jetés à l’avance pour les élections, quelles qu’elles soient, la volonté du peuple, telle qu’exprimée dans les urnes, est toujours proclamée sans autre forme de procès.

Si pour le second mandat du président Mahmoud Ahmadinejad il y a eu des contestations pour remettre en cause les résultats proclamés, cela relevait plus de l’attitude de mauvais perdants (comme on le voit partout et même aux États Unis), et de la manipulation de puissances étrangères qui travaillent du képi pour renverser l’ordre politique et institutionnel établi en 1979.

C’est ainsi que pour cette élection, le député de Tabriz, Massoud Pezeshkian qui faisait office d’outsider parmi les six candidats retenus, s’est imposé facilement, devenant ainsi le nouveau président de la République islamique d’Iran.

Les occidentaux le présentent (avec des arrières pensées), comme un « réformateur » parce qu’il prêche un dialogue constructif avec eux.

Mais le refus du dialogue constructif et d’égal à égal est toujours le fait des occidentaux qui se méprennent en voulant considérer comme leurs obligés, les autorités et habitants de ce pays vieux de plus de 2500 ans qui ont en horreur les diktats de pays conglomérés il y a seulement quelques siècles ou même années, et cela depuis l’éviction du Shah Reza Pahlavi qui avait abdiqué de cette fierté légitime des Perses.

Le nouveau président, dans sa première prise de parole, a d’ailleurs exprimé ( à la déception de ceux qui comptaient l’utiliser comme un cheval de Troie), sa fidélité et son obéissance à la République Islamique et aux modalités actuelles de son fonctionnement.

Si les partis chrétiens démocrates sont autorisés à diriger de grandes démocraties occidentales comme l’Allemagne, pourquoi certains refusent que des partis islamiques dirigent des pays musulmans ?

C’est ici que se situe le substrat de cette propension autoritaire et dictatoriale des occidentaux à vouloir conformer l’univers entier à leurs seules et uniques idées. Toute chose que de plus en plus de peuples de la Terre et de Mars commencent à remettre en cause.

Moritié Camara

Professeur titulaire d’histoire des relations internationales