Une fois de plus, Jacob Zuma a fait la preuve de son impopularité qui n’a d’égale que l’ampleur des impairs accumulés par le champion du Congrès national africain. Son discours annuel sur l’état de la nation, prononcé ce jeudi 9 février 2017, a transformé le parlement en un vaste champ de bataille entre députés de l’opposition et du parti au pouvoir. Les arbitres du jour, c’était une escouade de plus de 400 soldats déployés autour de l’édifice, siège du législatif, sur ordre de Zuma, et qui ont dû faire usage de grenades lacrymogènes pour disperser des « honorables » comme ils l’auraient fait pour disperser une foule en furie. L’ire des manifestants étaient en effet ostensible, ceux-ci étant jusqu’à aller traiter l’illustre orateur du jour de « président voyou ». L’étau se resserre de plus en plus autour du chef de l’Etat sud-africain, très contesté jusque dans sa propre famille politique. C’est le moins qu’on puisse dire, les Combattants pour la liberté économique (EFF) du bouillant Julius Malema, faisant corps avec le reste de l’opposition pour exiger sa démission.
Nul ne pouvant se prévaloir de ses propres turpitudes, Jacob Zuma, collectionneur de frasques devant l’Eternel est à l’origine de ses déboires. Empêtré dans plusieurs scandales dont celui retentissant de la rénovation de sa résidence et cette affaire de trafic d’influence citée par un rapport, le successeur de Thabo Mbéki semble pourtant ne pas voir le monde s’écrouler autour de lui. Corruption, clientélisme, et bien d’autres légèretés dans la gestion du pouvoir d’Etat ont fini par dénuder le roi qui est acculé de toutes parts par les étudiants, les opposants politiques classiques et ceux sortis des propres rangs de l’ANC. La pression est d’autant plus forte sur Zuma, que celui-ci semble vendanger la grande aura du mythique ANC de l’immense Nelson Mandela, symbole de la résistance noire en Afrique du sud et père de la nation arc-en-ciel. L’héritage semble trop lourd à porter par Jacob Zuma dont l’emprise politique se réduit comme peau de chagrin pendant que les radicaux de l’EFF et les libéraux de Democratic Alliance (DA), parti du centre droit conforte leur influence sur la vie socio-politique sud-africaine. Même les syndicats qui constituaient des alliés sûrs de Zuma l’abandonnent. Pire, certains d’entre eux, n’hésitent plus à réclamer sa tête.
Jacob Zuma est-il celui par qui viendra la fin du mythe de l’ANC ? Tout porte à le croire, car c’est bien sous le règne de l’ancien guérillero zulu, que l’ANC post-apartheid perdra des plumes, jusqu’au duvet, dans des élections municipales d’août 2016. Le parti a été contraint de céder de grands centres économiques comme Johannesburg, Pretoria et Nelson Mandela Bay. Grand manipulateur et adepte jusqu’aux ongles du « diviser pour régner », Zuma a pu continuer à maintenir autour de lui, la grande unité de l’ANC. Mais jusqu’à quand, vu que la forteresse d’antan est en train de se fissurer profondément par la base ? En tout cas, le successeur de Jacob Zuma aura fort à faire pour recoller les morceaux et redonner à l’ANC son lustre d’antan. Et éviter ainsi la deuxième mort de Nelson Mandela.
Par Wakat Séra