Du Bénin au Sénégal, en passant par le Burkina Faso, le Niger et le Nigeria, pour ne citer que ces pays, les eaux en furie n’épargnent rien sur leur passage, endeuillant de nombreuses familles et détruisant habitations et infrastructures publiques. Des inondations meurtrières qui jettent également dans la rue, des sans-abri qui n’ont eu nulle part pour dormir hier, et ignorent où trouver gîte et couvert, aujourd’hui et demain. Plus inquiétant, que ce soit à Ouagadougou, à Niamey ou à Dakar, la générosité du ciel qui a ouvert ses vannes trop en abondance, ne faiblit pas. Les experts en météorologie prévoient encore de fortes précipitations les jours à venir. Du reste, ces lignes que vous lisez, ont été tracées sous une pluie de soirée, qui pourrait bien accompagner une nuit déjà bien trempée par des trombes d’eau qui tombent comme si elles ont été trop contenues et trouvent maintenant occasion de se déverser.
En plus des images apocalyptiques de maisons qui s’écroulent comme château de cartes, de motos et voitures emportées comme fétus de paille par les eaux déchainées, ce sont des lendemains de désolation qui s’annoncent, hypothéquant la rentrée des classes, les écoles étant prises d’assaut par les déplacés, et compromettant sérieusement la saison agricole. Le retard accusé par la pluviométrie et maintenant la fréquence trop rapprochée et surtout la puissance des pluies, ne peuvent que nuire aux récoltes, dans des pays africains fortement agricoles.
Les dégâts, parlons-en! Chaque année, c’est la même rengaine! Et, après la pluie, vient le beau temps, mis à profit pour reconstruire des habitats précaires dans les zones à risque, au nez et à la barbe d’autorités impuissantes, ou plutôt incapables de faire preuve de rigueur dans le suivi des campagnes de sensibilisation menées à grand coût et hyper médiatisées. La règle date de mathusalem et est bien connue des dirigeants, que les mesures impopulaires ne font pas bon ménage avec la longévité au pouvoir. Elles rendent même les fauteuils très éjectables, surtout à quelques mois d’élections législatives et présidentielle, comme c’est le cas au Burkina. Il faut ménager l’électorat potentiel, surtout quand la machine électorale n’est pas maitrisée comme au bon vieux temps.
En effet, dans un passé pas trop lointain, il suffisait de distribuer, à des populations dont le quotidien n’est que misère, quelques bols de riz, des casquettes, des t-shirts, et des pagnes, le tout accompagné d’une petite enveloppe, les «feuilles», comme on le dit trivialement à Ouagadougou, pour désigner des billets de banque qui circulent énormément avant et pendant les élections, et la victoire était dans la poche. Certes, la pratique n’a pas disparu du dispositif de vote, mais l’opinion, les réseaux sociaux, et les médias traditionnels, faisant davantage dans la vigie, la corruption et l’achat de voix, sont des espèces en voie de disparition. Sans oublier que les enregistrements de propositions indécentes, qui sont maintenant la mode au Burkina, embarrassent bien des personnes!
A quand la fin de ces inondations répétées et annuelles? Pourtant, elles peuvent bien trouver solution dans la construction de caniveaux non encombrés par les déchets humains, le retour au civisme des populations, l’interdiction rigoureuse de s’installer dans les zones à risque, et surtout la fermeté des autorités, débarrassées de ces mille et un calculs politiciens qui conduisent, chaque année, à l’irréparable. Et on criera encore à l’aide internationale, après soixante ans d’indépendance, pour nous sauver des eaux de pluie!
Par Wakat Séra