Les Sénégalais ont rendez-vous avec les urnes le 31 juillet pour désigner les 165 élus, qui les représenteront à l’Assemblée nationale pour la prochaine mandature de cinq ans. Si 112 sièges seront pourvus au scrutin de liste majoritaire, les 53 restants le seront selon la proportionnelle plurinominale qui se base sur le total des voix des partis, additionnées au niveau national. Et c’est là qu’il y aura problème si les choses restent en l’état. En effet, un arrêté sorti du laboratoire du ministère de l’Intérieur, vient de valider huit listes nationales de candidats mais a fait passer à la trappe, celle des titulaires de la redoutée coalition de l’opposition Yewwi Askan Wi. Du coup, ce sont des têtes de proue de l’opposition, dont le remuant Ousmane Sonko, qui seront privées de leur chance de siéger au futur parlement.
Comme lot de consolation, ces personnalités de l’opposition évincées de la course électorale, auront la possibilité de se faire remplacer par des suppléants, ce qui ne manquera pas d’ôter toute leur saveur aux joutes relevées dont l’Assemblée nationale sénégalaise peut se targuer sur l’échiquier démocratique africain. Nul ne pouvant se prévaloir de ses propres turpitudes, cette coalition de l’opposition ne pourra s’en prendre qu’à elle-même, en commettant une «erreur d’inattention» inacceptable et impardonnable à ce niveau politique. Servir une liste incomplète où est investie, deux fois, le même candidat, en tant que titulaire et suppléant, ce n’est ni plus, ni moins qu’une faute lourde qui se paie cash. Errare humanum est, rétorqueront les naïfs de la chose politique, mais c’est une faille inadmissible que le pouvoir ne pouvait pas ne pas mettre à profit pour affaiblir l’adversaire en face. C’était, simplement, la brèche à ne pas ouvrir!
Mais comme dans une entente bien pensée, la majorité commettra également sa bévue, qui, cependant, ne lui coûtera, à elle, que sa liste de suppléants. Les meneurs de la liste nationale de la coalition Benno Bokk Yakaar, notamment Aminata Touré, seront bien dans les starting-blocks pour défendre, si victoire, les intérêts du pouvoir au sein de l’hémicycle. La liste des suppléants de la coalition battant pavillon pouvoir, elle a été sifflée hors-jeu parce que n’ayant pas respecté le fameux principe de la parité. C’est encore moins grave pour Benno Bokk Yakaar qui ne perd que des seconds couteaux, avec tout le respect dû à ces compétiteurs. Tout ce méli-mélo politique qui prend tout de même des airs d’un arrangement dans lequel tout le monde est puni pour sa faute afin que l’opposition ne soit pas perçue comme l’éternelle persécutée, peut encore trouver un happy-end si les grands juges du Conseil constitutionnel sénégalais le veulent bien.
La principale coalition de l’opposition, Yewwi Askan Wi, qui est la grande perdante dans cette histoire peut encore saisir, le Conseil constitutionnel pour réparer son «erreur d’inattention». Tout comme d’ailleurs son adversaire Benno Bokk Yakaar, pour rattraper la parité sur sa liste. Mais là c’est une autre paire de manches, surtout que ces cours, la plupart du temps, en tout cas sous les tropiques, ne servent que les intérêts du prince. Au Sénégal, l’élégance et l’indulgence habiteront-elles assez les grands prud’hommes pour donner gain de cause à une opposition qui donne des nuits blanches au pouvoir de Macky Sall? Question à un plat de Thiéboudiène, le célèbre plat national sénégalais de riz au poisson!
Par Wakat Séra