Annoncé pour ce début de cette semaine à Bamako où il devrait rencontrer le président de la Transition, le colonel Assimi Goïta et surtout réveillonner, à Gao, avec les troupes de Barkhane comme il en a l’habitude à Noël, le locataire de l’Elysée, Emmanuel Macron, a décoché, aux dernières nouvelles, cette visite de son agenda. La raison officielle n’a pas été difficile à trouver. Comme cela se fait de plus en plus en Afrique, par exemple pour empêcher des manifestations de rue de l’opposition ou de mouvements de la société civile, le drapeau rouge de la forte menace de propagation du Covid-19 a été brandi. Certes, le Covid-19, avec ses variants qui se multiplient, dont le dernier né, Omicron, ne cesse de voyager, et vite, car doté d’une rapidité éclair dans la contamination, touche de plus en plus de pays sur le continent, après avoir été détecté en Afrique du sud. De même, si nombre de pays africains ignorent à quel grade se classer sur l’échelle des vagues, à cause de statistiques peu fiables, parfois inexistantes, l’Europe, l’Asie et les Etats-Unis, eux en sont qui, à la troisième, qui à la quatrième et d’autres à plus. C’est donc normal que ce qui est considéré comme une simple grippe, sous les tropiques, notamment en Afrique subsaharienne, fasse peur, très peur au-delà des océans.
En tout cas, le virus à couronne est le bouc émissaire vite mis à l’index! Mais, très peu d’Africains, notamment les Maliens et ceux bien au fait de la vive tension qui ne cesse d’enfler entre Bamako et l’Elysée, ne sont pas dupes. Si Jupiter a dû se passer de ce périple qui lui aurait permis d’apporter du réconfort à ses soldats dont le champ d’action a rétréci comme peau de chagrin avec le redéploiement de la Force Barkhane au Mali, ce n’est point de sa volonté. C’est bien une contrainte pour Emmanuel Macron, lui dont on ne pouvait que louer ce courage propre, en son temps, aux Gaulois qui n’avaient peur que d’une seule chose, «que le ciel leur tombe sur la tête». Mais connaissant la témérité du premier des Français-les «Gilets jaunes» en savent un brin- qui semble ne se plaire que dans l’adversité, se rendre dans un pays aussi hostile actuellement à la France, où le sentiment antifrançais, de la part de dirigeants comme de populations, manipulés ou pas, faisait, sans doute, monter l’adrénaline chez lui. Mais le candidat non déclaré, pourtant certain, pour la présidentielle d’avril 2022, qui avait à portée de main, une occasion en or pour ajouter quelques microns à sa côte de popularité, devra attendre un peu.
De source généralement bien informée, Elysée ne pouvait accepter le programme que lui imposaient les autorités maliennes qui s’opposaient à toute tenue de ce qui ressemblait à un mini-sommet du G5 Sahel ou de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) qui s’organisait en même temps que la venue du grand sachem blanc sur les bords du Djoliba. Par ailleurs, les Français ne pouvaient se faire à ce qui prenait les airs d’un affront qu’aurait été l’accueil à l’aéroport, de leur président, par le Premier ministre de la Transition, un certain Choguel Kokalla Maïga, celui-là même qui profite de toute tribune à lui offerte, pour dénoncer un lâchage du Mali par la France, sur fond de rivalité entre ce dernier pays et la Russie. D’autre part, Emmanuel Macron ne manquerait sans doute pas de poser les questions qui fâchent aux autorités maliennes, elles qui ne comptent plus respecter le chronogramme que les putschistes avaient accepté, comme par ruse, pour l’organisation d’élections ouvertes, dans le but de remettre aux civils, le pouvoir qu’ils ont pris par les armes, en août 2020.
Après ce «faux départ» de Emmanuel Macron qui aurait pu décrisper l’atmosphère lourde à couper au couteau, quelle issue pour les relations entre la France et le Mali? La hache de guerre restera-t-elle en l’air, ou pourrait-on envisager que le calumet de la paix soit fumé entre le Mali et la France, dans l’intérêt des deux parties, et même du Sahel entier, afin d’envisager sous une meilleure vue, la lutte contre le terrorisme dans la sous-région ouest-africaine désormais dans l’œil du cyclone?
Par Wakat Séra