7è militaire français à trouver la mort, de façon accidentelle, au Mali, le maréchal des logis, Adrien Quélin, allonge la liste des soldats de Barkhane avalés par la lutte contre le terrorisme. Le jeune mécanicien de 29 ans, a été blessé, lors d’une opération de maintenance sur un camion. C’est donc sous le sceau macabre du deuil que la force française a amorcé la phase finale du départ de ses troupes, de la base de Kidal, vers la force de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) et des Forces armées maliennes (FAMa). Le dernier convoi logistique a quitté la ville au nord du pays, laissant sur place, un dispositif léger pour régler les dernières formalités, dont celles administratives et logistiques, selon le porte-parole de l’Etat-major français.
En attendant le transfert définitif de Kidal, qui sera suivi, en principe, de ceux de Tombouctou et Tessalit, selon le processus de transformation de la présence militaire française au Sahel, annoncée le 10 juin par le président français Emmanuel Macron, la tension, entre escalade verbale et convocation d’ambassadeur, continue de monter entre Paris et Bamako. Si le Mali accuse la France de l’abandonner en plein vol, Elysée n’entend pas maintenir son engagement militaire dans un pays aux mains de putschistes récidivistes, et surtout pas aux côtés du groupe russe Wagner, accusé de diverses exactions et avec lequel les autorités maliennes pourraient signer un accord, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Mais la France qui compte redéfinir son intervention militaire dans le Sahel où elle prend activement part à la chasse aux terroristes, ne sort pas, pour autant, du jeu au Mali. Elle y restera présente, tout comme dans le reste de la région, sous la bannière d’autres interventions militaires, dont celle Takuba, regroupant des forces spéciales de plusieurs pays de l’Union européenne. D’un effectif de 5100 éléments dans le Sahel, dont 52 soldats sont morts au front, la France devrait, à terme, dégraisser le pachyderme, à 2500, voire 2000 éléments.
Si le départ progressif de Barkhane ressemble bien à un enlisement de la France dans le Sahel, pour ne pas dire un échec militaire cuisant, il faut dire que, malgré l’engagement de Barkhane qui a décapité, à plusieurs reprises l’hydre terroriste, le nerf de la guerre avait commencé à faire défaut et l’opinion française avait commencé à s’inquiéter de cette guerre si lointaine des bords de la Seine mais dans laquelle meurt les «enfants de la patrie». De même, contrairement à l’opération Serval, menée par les militaires français aux côtés de l’armée malienne, qui a été ponctuelle, de janvier 2013 à novembre 2014, et dont l’efficacité, parce que réalisée dans un délai relativement court, selon un objectif précis qui était de freiner l’avancée des djihadistes du Nord vers Bamako, la Force Barkhane s’est trop étirée dans le temps. De même, le sentiment anti-français qui a pris corps dans les pays du Sahel, a constitué un handicap sérieux pour Barkhane qui évoluait dans un environnement doublement hostile, pris entre le marteau des terroristes sans foi ni loi et l’enclume d’une partie de populations sahéliennes qui avaient lancé une fatwa contre les intérêts de «nos ancêtres les Gaulois». Et comme s’il en fallait un peu plus pour faire payer à la France son péché originel d’ancien colonisateur, les deux coups d’Etat du colonel Assimi Goïta et l’avènement d’un Premier ministre, Choguel Kokalla Maïga, pour ne pas le nommer, qui a mis très peu de temps pour ouvrir le front contre Emmanuel Macron, ont contribué à fait monter le mercure entre les deux pays.
Et maintenant? Il faut juste espérer pour le Mali un avenir meilleur. Il est important que ce pays ne soit pas «abandonné en plein vol», mais qu’il prenne surtout en main, sans émotion et passion, la sécurité de ses populations et la défense de son territoire, en évitant de sous-traiter, que ce soit avec la France, la Russie, la Chine, les Etats-Unis, etc., ces domaines éminemment souverains. Surtout pas à n’importe quel prix, pour ne pas avoir à s’en mordre les doigts. En tout cas, les défis et les chantiers sont nombreux pour le Mali qui s’apprête à vivre une transition plus longue que prévue, les élections étant, visiblement impossibles pour février 2022.
Par Wakat Séra