Il s’appelait Yahia Djouadi et était surnommé Abou Ammar al-Jazairi. L’Algérien était présenté comme un haut cadre historique d’Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Mais ses hauts faits de terroriste ne se conjugueront plus qu’au passé, car il a été neutralisé par les forces françaises, à environ 100 km au nord de Tombouctou, au Mali. Une force Barkhane qui continue donc de frapper dans le Sahel où elle se trouve en pleine réarticulation. Mieux c’est au Mali qu’elle fait toujours parler sa puissance de feu dans la lutte contre le terrorisme. Pourtant, elle est déclarée «non grata», par des autorités et une partie de la population de ce pays en pleine idylle avec la Russie, et plus particulièrement la société privée de sécurité russe, Wagner, dont les éléments sont considérés par les Occidentaux, comme des mercenaires.
Cette grosse perte pour les djihadistes mais un grosse prise de plus dans les filets de Barkhane, coïncide avec des heures de tristesse pour les Forces armées maliennes (FAMa), qui portent le deuil, selon un bilan officiel mais provisoire, d’une trentaine de ses soldats, tombés dans une attaque terroriste qualifiée de «complexe», ce vendredi, contre le camp de Mondoro, dans le centre-est du Mali. Malgré la bravoure des Forces de défense et de sécurité (FDS) qui ont réussi à anéantir 47 assaillants dont des chefs djihadistes, l’heure est à l’inquiétude au sein des populations qui se sont réunies ce dimanche pour manifester leur soutien total aux militaires. Dans le même temps, dans leur désarroi, les Maliens n’ont pas manqué de pointer du doigt les «autorités» qui, selon eux, ont manqué de célérité dans la réaction contre l’assaut qui, en plus des morts, a fait 33 militaires blessés dont 21 grièvement, toujours selon la comptabilité macabre disponible.
Encore un deuil national de trois jours dont se serait bien passée une population de Mondoro et une armée malienne, si les services de renseignement avaient fonctionné et que les militaires, au lieu de se trouver dans une posture défensive étaient plutôt les attaquants. La meilleure défense, c’est l’attaque. La règle est universelle, et comme au football, elle ne saurait changer dans la stratégie militaire. Et comme il fallait s’y attendre, les terroristes ne pouvaient que profiter de ce battement entre le départ des soldats de la Force française Barkhane du Mali et une réorganisation efficace d’une armée malienne, qui, à l’instar de ses homologues du Sahel et du reste de la sous-région, ne saurait mener cette guerre asymétrique en solo. Le renforcement des services de renseignement, et des équipements, notamment aériens, ne peuvent que booster les résultats des FDS nationales dans cette lutte anti-terroriste qui décime les populations et anéantit toutes les initiatives de développement.
S’il faut reconnaître que «dormir sur la natte d’autrui, c’est dormir par terre», comme le dit l’adage bien africain, ce serait faire preuve de myopie et de bon sens, en pensant que ce combat contre le terrorisme peut être mené, et le cas échéant gagné, sans une synergie d’actions entre les forces armées nationales et leurs partenaires occidentaux mieux équipés. Et même si la défense du territoire national et la sécurité des biens et des citoyens sont des domaines éminemment souverains, l’appui venant d’Etats partenaires, soutien basé sur des relations entre pays, selon les règles de l’art, ne peut qu’être salutaire.
Et de plus en plus, nombre de pays conscients de leurs limites en matière militaire, apprécient à sa juste valeur, ce partenariat d’Etat à Etat africain, renforcé par les forces européennes et les Etats-Unis dans les secteurs de formation des militaires et l’appui en logistique aérienne. Et c’est la nouvelle mission que s’assigne Barkhane dans son redéploiement dans un Sahel et dans le Golfe de Guinée, dans l’œil du cyclone terroriste.
Par Wakat Séra