A l’issue d’une rencontre par visioconférence le 20 août, les chefs d’Etats de la Communauté économique Des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont décidé de l’envoi d’une délégation conduite par le Médiateur et comprenant notamment le Président du Conseil des Ministres et le Président de la Commission, avec pour mission d’oeuvrer au retour rapide de l’ordre constitutionnel.
Les Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO se sont réunis par visioconférence en session extraordinaire le 20 août 2020. Avant d’aborder leur ordre du jour, ils ont tenu à exprimer leurs condoléances et leur solidarité à Son Excellence Monsieur Roch Christian KABORÉ, Président du Burkina Faso, et à Son Excellence Monsieur Mahamadou ISSOUFOU, Président de la République du Niger, et à leurs peuples respectifs pour les nombreux morts et blessés lors des attaques terroristes des 7 et 9 août 2020 au Burkina Faso et en République du Niger.
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Conformément à leur ordre du jour, les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont, en vertu du Protocole additionnel sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance, procédé à un examen de la situation politique au Mali caractérisée actuellement par un coup d’Etat en cours par des militaires le 18 août 2020. Le coup d’Etat a enregistré l’arrestation du Président de la République démocratiquement élu en 2018, Son Excellence Monsieur Ibrahim Boubacar Kéita, ainsi que des membres du gouvernement malien.
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Les Chefs d’Etat et de Gouvernement ont noté, avec une vive préoccupation, que cette tentative de coup d’État intervient dans le contexte d’une crise sociopolitique déclenchée à l’issue des élections législatives de mars-avril 2020. Cette crise a pris la forme de manifestations, parfois violentes, organisées par certains acteurs politiques, membres d’associations religieuses et d’organisations de la société civile.
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La tentative de coup d’Etat intervient également dans un contexte global difficile pour le Mali avec des attaques terroristes, des tensions intercommunautaires dans le centre du pays et une crise sanitaire causée par la pandémie de la COVID-19 et ses conséquences économiques et financières.
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Par ailleurs, la tentative de coup d’Etat du 18 août 2020 est fortement semblable à bien des égards au coup d’Etat de 2012 qui a déstabilisé le Mali et favorisé des attaques des groupes terroristes.
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Pour aider à la stabilisation du pays, la CEDEAO avait engagé, avant ce 18 août 2020, un processus de médiation avec d’abord une mission du Comité ministériel composé des Ministres des Affaires Etrangères de la République du Niger, Président du Conseil des Ministres de la CEDEAO, de la République de Côte d’Ivoire, de la République Fédérale du Nigeria et du Président de la Commission de la
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La CEDEAO avait également nommé un Médiateur en la personne de Son Excellence Monsieur Goodluck Ebele JONATHAN, ancien Président de la République Fédérale du Nigeria qui a effectué trois missions au Mali et rencontré la quasi-totalité des
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Cinq Chefs d’Etat de la CEDEAO, à savoir, le Président de la République du Niger, Président en exercice de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO, le Président de la République de Côte d’Ivoire, le Président de la République du Ghana, le Président de la République Fédérale du Nigeria et le Président de la République du Sénégal avaient également effectué une mission de bons offices à Bamako le 23 juillet 2020, au cours de laquelle ils avaient rencontré le Président Ibrahim Boubacar Kéita et tous les acteurs de la crise.
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Suite à ces différentes missions, un Sommet extraordinaire des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO a eu lieu le 27 juillet 2020 au cours duquel des Décisions importantes ont été prises visant à la reconstitution de la Cour Constitutionnelle, la démission des membres de l’Assemblée Nationale dont l’élection était contestée, la formation d’un gouvernement d’union nationale intégrant l’opposition et la société civile et la mise en place d’une commission visant à effectuer des enquêtes afin de situer les responsabilités sur les violences qui ont fait des décès et blessés lors des manifestations des 10 et 11 juillet
1O. En outre, le Médiateur a effectué une mission d’évaluation du 10 au 13 août 2020 afin de s’enquérir des progrès dans la mise en œuvre des Décisions du Sommet du 27 juillet 2020. A cet effet, des progrès ont été réalisés, notamment la reconstitution de la Cour Constitutionnelle installée officiellement le 10 août 2020.
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Malheureusement et contre toute attente, moins d’une semaine après le départ du Médiateur, une mutinerie a été déclenchée dans un camp militaire, le 18 août 2020. Les mutins se sont dirigés vers la résidence du Président de la République, le contraignant sous la menace des armes, à les suivre au camp militaire avec les membres du gouvernement présents. En outre, après plusieurs heures et diverses pressions, les militaires ont contraint le Président de la République à faire une déclaration pour annoncer sa démission et la dissolution de l’Assemblée Nationale.
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Après la déclaration du Président Ibrahim Boubacar Kéita, faite sous la contrainte, les mutins, regroupés sous l’appellation« Comité Nationale pour le Salut du Peuple (CNSP) » ont annoncé avoir pris le contrôle du pays.
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Après avoir procédé à une profonde analyse de cette situation extrêmement grave, les Chefs d’Etat et de Gouvernement :
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condamnent avec la plus grande fermeté les menaces et les pressions exercées par les militaires putschistes sur le Président Ibrahim Boubacar Kéita pour le contraindre à annoncer sa démission;
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condamnent avec la plus grande vigueur la tentative de renversement par des militaires putschistes du Président Ibrahim Boubacar Kéita, Chef d’État démocratiquement élu par le peuple malien ;
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dénient catégoriquement toute forme de légitimité aux militaires putschistes et exigent le rétablissement immédiat de l’ordre constitutionnel;
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exigent la libération immédiate et sans conditions du Président Ibrahim Boubacar Kéita et de tous les officiels arrêtés ;
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rappellent aux militaires putschistes leur responsabilité individuelle et collective sur la sûreté et la sécurité du Président Ibrahim Boubacar Kéita et des officiels arrêtés ;
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demandent le rétablissement immédiat du Président Ibrahim Boubacar Kéita en tant que Président de la République, conformément aux dispositions constitutionnelles de son pays.
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suspendent le Mali de tous les organes de Décision de la CEDEAO avec effet immédiat, conformément au Protocole Additionnel sur la Démocratie et la Bonne Gouvernance et ce, jusqu’au rétablissement effectif de l’ordre constitutionnel ;
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décident la fermeture de toutes les frontières terrestres et aériennes ainsi que l’arrêt de toutes les transactions financières et de tous les flux économiques et commerciaux entre les pays membres et le Mali, sauf pour les denrées de première nécessité, les médicaments et autres produits et équipements de lutte contre la covid-19, les produits pétroliers et l’électricité, et invitent tous les partenaires à faire de même ;
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demandent la mise en œuvre immédiate d’un ensemble de sanctions contre tous les militaires putschistes et leurs partenaires et collaborateurs ;
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décident de dépêcher immédiatement au Mali une délégation conduite par le Médiateur et comprenant notamment le Président du Conseil des Ministres et le Président de la Commission, avec pour mission d’oeuvrer au retour rapide de l’ordre constitutionnel ;
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demandent la montée en puissance de la Force en Attente de la CEDEAO ;
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décident de demeurer saisis de la situation au Mali et, à cet effet, de se réunir en visioconférence dans une semaine, en vue de procéder à une évaluation de la situation, à la lumière du compte rendu de mission de la délégation conduite par le Médiateur.
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Les Chefs d’Etat et de Gouvernement se félicitent du soutien exprimé à la CEDEAO par le Conseil de Paix et Sécurité de l’Union Africaine et par le Conseil de Sécurité des Nations Unies le 19 août 2020, à travers, notamment, la ferme condamnation de l’action des militaires putschistes.
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Les Chefs d’État et de Gouvernement expriment leur solidarité avec le peuple malien et réaffirment leur ferme engagement à continuer à œuvrer pour une sortie rapide de