Ce lundi, des tirs ont encore été entendus dans la capitale bissau-guinéenne, perturbant une fois de plus, la quiétude des populations. Cette fois-ci, c’est surtout la radio Capital FM qui a été prise pour cible. Suite de la tentative de coup d’Etat dont a failli être victime, il y a moins d’une semaine, le chef de l’Etat Umaro Sissoco Emballo? Représailles contre un média qui appartient à un militant du parti d’opposition, le mythique Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC) qui a toujours contesté la victoire à la présidentielle, il y a maintenant deux ans? Atteinte à la liberté de presse? En tout cas, alors que des organisations de lutte pour la liberté de presse crient leur indignation et qu’un administrateur de la radio dénonce une descente d’hommes en tenue militaire, le pouvoir évoque un acte isolé. Encore un acte isolé, œuvre d’individus en lien avec le narcotrafic, des mercenaires et des rebelles casamançais! C’est ainsi que le chef de l’Etat bissau-guinéen avait qualifié, l’assaut du mardi 1er février, du Palais du gouvernement, où il se trouvait en conseil des ministres extraordinaire. Et ce fut le calme plat jusqu’à ce lundi. Visiblement, le feu couve toujours sous le fauteuil de Umaro Sissoco Emballo.
En République démocratique du Congo (RDC) dont le chef de l’Etat, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo cédait la présidence tournante de l’Union africaine au Sénégalais Macky Sall, ce serait également une tentative de coup d’Etat que cache l’arrestation et la détention dans les locaux de l’Agence nationale de Renseignement (ANR) du conseiller spécial à la sécurité du président congolais, François Beya. Au même titre que les Lions de la Téranga qui ont dû sorti les tripes pour rentrer à Dakar avec le graal, cette présidence de l’UA sera loin d’être un fleuve tranquille pour Macky Sall. En plus de la menace des coups d’Etat, le dossier des divergences entre Addis-Abeba et ses rebelles du Tigré, demeure sans solution malgré l’implication de l’UA. Et pour se donner un peu d’air, en attendant le prochain sommet, la patate chaude du statut d’observateur octroyé à Israël mais contesté, et qui annonçait, pour ce sommet, un débat houleux et l’étalage au grand jour d’une division entre les pays africains, a été, habilement refilée à un «comité» composé de 7 pays.
Ce ne sont donc pas les sujets brûlants qui manqueront à l’agenda de Macky Sall, le président en exercice de l’UA. Si l’Afrique continue de faire face au Covid-19 et sa kyrielle de variants dont le dernier né, l’Omicron, frappe aussi vite que l’éclair, alors que le manque de vaccin reste criard sur le continent, les coups d’Etat et l’éternelle mal gouvernance qui sévit dans les Etats africains marquent toujours l’actualité africaine. Sans oublier l’installation des troupes paramilitaires, et la prolifération de mercenaires sur le continent noir, qui sont, certainement une garantie de nuits blanches pour un Macky Sall, déjà bien malmené par les problèmes domestiques, dont la montée en puissance de ses opposants qui viennent de faire main basse sur les élections locales dont ils ont profité des municipales pour arracher des villes clés, comme Dakar, Ziguinchor, Diourbel, et Kaolack, pour ne citer que celles-là. A l’international, Macky Sall ne sera pas moins poussé dans les cordes, par cette contagion de coup d’Etats qui menace le continent.
Alors que les rideaux tombaient sur cette rencontre au sommet de l’UA dans la capitale éthiopienne, pas moins de cinq pays du continent vivent en mode kaki. Si quatre, notamment le Soudan, le Mali, la Guinée et le Burkina Faso ont connu des coups d’Etat dans leur forme de tous les temps, avec l’arrestation du chef de l’Etat en fonction et, dans certains cas, de sa démission par lettre dûment, par lui, signée, le Tchad dirigé par les militaires, n’a pas suivi le modus operandi classique. Mais le résultat demeure le même, car le pays est également entre les mains des généraux, avec à leur tête, Mahamat Idriss Deby le fils du Maréchal Idriss Deby Itno, mort, de source officielle, le 20 avril 2021 au front. L’UA, devra vite, au lieu de rester dans ces sempiternelles condamnations et prises de sanction, mettre fin à l’hémorragie des putschs militaires, mais aussi à ces charcutages de constitutions qui aboutissent, souvent dans le sang, à des troisièmes mandats et présidence à vie, si affinités. Comme quoi, Macky Sall ne vivra pas une présidence de l’UA de tout repos.
En attendant, le chef de l’Etat sénégalais doit pouvoir savourer, avec les Lions de la Téranga, ce premier trophée décroché de haute lutte à la CAN 2021.
Par Wakat Séra