Dans cette tribune, le Docteur Abraham Ezin, intervenant face au coup d’Etat malien qui a contraint le président Bah N’Daw et le Premier ministre Moctar Ouane, à la démission, affirme que «nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes». Ainsi, qualifie-t-il, «les contours de ce nouveau coup de force Malien».
Opinion
Ainsi pourrait-on qualifier les contours de ce «nouveau coup de force Malien.» Comment en effet, le Président de la Transition au Mali, (si cela est avéré), a-t-il bien pu commettre l’erreur à ne pas commettre ? Aurait-il ainsi pris son rôle très au sérieux?
Non! Quand, comme Bah N’Daw, vous arrivez au pouvoir, à la faveur d’un coup d’Etat de vos frères d’armes cadets, lesquels vous font l’honneur d’occuper le fauteuil que vous occupez, celui de la première personnalité de la Transition, pouvez-vous du jour au lendemain, vouloir vous émanciper de sitôt?
Il y a certes dans la «vie administrative ou politique», ce qu’on appelle le «devoir d’ingratitude» qui nous amène à nous montrer intraitable vis-à-vis de notre ou nos mentors dans un contexte donné, comme quand feu le Président Mitterrand nommait Robert Badinter, Constitutionnaliste de renom, ancien Ministre Français de la justice, à la tête du Conseil Constitutionnel. Robert Badinter eut alors ces mots à l’endroit du Président Mitterrand: «Désormais, j’ai le devoir d’ingratitude à votre égard», autrement dit, Badinter ne lira que le droit, quitte à paraître ingrat envers celui qui l’a nommé!»
Devoir d’ingratitude, certes, mais tout de même ! Comment Bah N’Daw peut-il en quelques mois seulement vouloir remanier le gouvernement sans s’en référer à ses mentors dont le vice président de la Transition le colonel Hassimi Goita? Pire, limoger deux membres du Triumvirat putschiste, à savoir les ministres de la défense et celui de la sécurité, pour vouloir les remplacer par ses propres affidés, deux généraux de son clan, dont le Général DOUKOURE!
Et puis, quand on est de l’armée, qui plus est, de la hiérarchie militaire comme Bah N’Daw (colonel major à la retraite, ancien ministre de la défense) on n’est pas censé ignorer ce dicton que même les civils connaissent; «un chef sans troupe, même le plus gradé, n’est que l’ombre de lui-même!». On ne peut donc prendre de graves décisions, quand on n’a pas assuré auparavant ses arrières. Conséquences: le voilà qui paie aujourd’hui le prix de ses «turpitudes». Bah N’Daw a commis un crime, le crime de lèse majesté.
Ceci n’est pas sans rappeler, le cas de ce haut fonctionnaire international qui, après de longues années passées à Niamey, a été élu Président de la République de son pays, voisin Ouest du Mali, et dont le premier acte après son investiture a été de «décapiter» la hiérarchie militaire. Chef d’Etat Major Général de l’Armée, celui de l’Armée de l’Air, de l’Armée de Terre! La suite est connue. Il a fallu peu de temps, pour que Abdoul Aziz l’ancien président, prenne le pouvoir !
Et puis, la junte au Mali a beau «justifier» son acte, (le bouc émissaire qui a prêté le flanc) on ne saurait non plus le dissocier des récents évènements survenus au Tchad, sur lesquels la Communauté Internationale a exceptionnellement fermé les yeux. Peut-on aujourd’hui à nouveau demander aux mêmes putschistes maliens, de trouver un civil pour conduire la transition chez eux quand on n’a pipé mot au Tchad? Ce discours serait invraisemblable! Tout porte à croire aujourd’hui que la Communauté Internationale ne peut qu’entériner le fait accompli au Mali, libérer ceux qui sont détenus, demander à mettre en place au plus tôt, un gouvernement et souhaiter vivement la fin de cette transition!
Ce qui est sûr, c’est que le Mali ne cesse de donner à ses voisins (qui paient un lourd tribut) et à la Communauté Internationale, du fil à retordre. On ne peut que croiser les bras et attendre; la situation au Mali n’a que trop duré!