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Mali: qui était donc le mystérieux agresseur de Assimi Goïta?

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Le colonel Assimi Goïta, main levée au milieu de la foule (Ph. france24.com)

«Le gouvernement de la République du Mali informe l’opinion publique que suite à l’agression perpétrée contre le Président de la Transition, Chef de l’État, son Excellence le Colonel Assimi GOITA, le 20 juillet 2021 à la Grande Mosquée de Bamako, une enquête a été ouverte pour fait de tentative d’assassinat et d’atteinte à la sûreté de l’État.

L’auteur de l’agression a été immédiatement appréhendé par les services de sécurité. Au cours des investigations qui ont permis de mettre en évidence des indices corroboratifs des infractions sus visées, son état de santé s’est dégradé.

Admis au CHU Gabriel TOURE, puis au CHU du Point G, il est malheureusement décédé. Une autopsie a été immédiatement ordonnée pour déterminer les causes de son décès.  

Le gouvernement rappelle toutefois que son décès ne fait pas obstacle à la poursuite de l’enquête déjà en cours au niveau du parquet de la commune II, surtout que les premiers indices collectés et les informations recueillies indiquent qu’il ne s’agissait pas d’un élément isolé.

L’opinion sera tenue informée des résultats de l’autopsie et des suites des investigations.»

C’est par le biais de ce communiqué, des plus surprenants, que les autorités maliennes ont annoncé, ce dimanche, le décès du présumé auteur de tentative d’assassinat du président de la transition politique au Mali, le colonel Assimi Goïta. En attendant les résultats de l’autopsie de l’homme, cette «mort subite» qui apporte de l’eau au moulin de ceux qui avaient des doutes sur cette tentative d’assassinat, soulève bien des interrogations. Si réellement les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux sont des images de la fameuse attaque au couteau du jour de la Tabaski, nul n’est besoin d’être un magicien ou Sherlock Holmes pour affirmer que le présumé auteur est allé plus loin que la simple tentative d’où serait sorti, sain et sauf, le maître de Bamako.

Qui donc est l’auteur de cette agression? Comme si on lui constituait une identité, il a fallu plus de cinq jours pour savoir qu’il s’appelait Alassane Touré et est de nationalité malienne. Quel était l’état de sa santé qui s’est «dégradé» si vite en quelques jours? Si l’agresseur d’une témérité inouïe pour s’attaquer au fougueux colonel existe vraiment, a-t-il subi des actes de torture? Dans quel endroit était-il détenu? Etait-il assisté par un conseil, et si oui, qui était-il? Et comment ce prisonnier a-t-il été traité quand il a été appréhendé? Souffrait-il déjà d’une quelconque pathologie qui a provoqué sa mort après son arrestation? Autant de questions encore sans réponse, toute chose qui renforce le flou lourd à couper à la hache, qui enveloppe cette affaire.

Certes, il ne fallait pas s’attendre, sous les tropiques, à la même délicatesse dont a bénéficiée le «gifleur» du président français Emmanuel Macron lors de sa maîtrise par les agents de sécurité de l’Elysée, car les réalités ne sont pas les mêmes en Afrique. Sur le continent noir, oser s’en prendre physiquement à un chef de l’Etat, de surcroît colonel de l’armée, c’est signer sans autre forme de procès, son arrêt de mort et non, comme en France, hériter d’une condamnation à 18 mois de prison dont 4 ferme et 14 avec sursis pendant 2 ans.

En tout cas, le gouvernement malien, l’a promis, «l’opinion sera tenue informée des résultats de l’autopsie et des suites des investigations», même si, dès les instants qui ont suivi la tentative d’assassinat sur sa personne, le colonel avait décelé, derrière, une main «déstabilisatrice». Une révélation confirmée par le gouvernement malien, selon qui, «les premiers indices collectés et les informations recueillies indiquent qu’il ne s’agissait pas d’un élément isolé.» Mais dans une Afrique où les coups d’Etat fabriqués de toutes pièces s’enfilent à de prétendues tentatives d’assassinat ficelées dans les laboratoires secrets des régimes de fer, des doutes ont toujours plané sur les tentatives d’assassinat comme celle contre le colonel Assimi Goïta.  Ce sont des pratiques qui servent, la plupart du temps, à divertir le peuple et le tenir loin sur des questions essentielles concernant la gouvernance ou à opérer des purges, notamment dans l’armée, ou à accuser des personnalités influentes qui empêchent de gouverner en rond. Ces coups servent également à jeter en pâture des «puissances déstabilisatrices». Les bonnes vieilles méthodes conspirationnistes ont la peau dure en politique.

La suite du feuilleton de la tentative d’assassinat du colonel Assimi Goïta est très attendue et promet bien des rebondissements, qui, il faut l’espérer, seront moins tragiques que la mort du présumé auteur de l’attaque au couteau. Le colonel, qui, après deux putschs militaires est devenu le seul capitaine du navire malien, est, toutefois conscient, et le dit chaque fois que de besoin, qu’il remettra le pouvoir aux civils, à la suite d’élections démocratiques que son régime affirme pouvoir tenir à bonne date, c’est-à-dire en février 2022, selon le deadline fixé par la communauté internationale.

Par Wakat Séra