L’Opposition politique burkinabè a animé, ce samedi 10 juillet 2021 à son siège à Zôgôna, au Centre-est de Ouagadougou, pour faire le bilan des marches-meetings des 3 et 4 juillet dernier, organisées sur l’ensemble du territoire national pour dénoncer la mauvaise gestion de la situation sécuritaire. Me Gilbert Noël Ouédraogo, président de l’Alliance pour la Démocratie et la Fédération-Rassemblement Démocratique Africain (ADF-RDA), par ailleurs, coordonnateur national adjoint de ces manifestations du samedi et dimanche dernier, s’est félicité de la prouesse de l’opposition de réussir la mobilisation des marcheurs en seulement cinq jours, précisant qu’«il n’y a eu aucune distribution d’argent».
A la suite des massacres des populations de Solhan dans le Yagha, à l’extrême Nord du Burkina Faso, tuerie qui a résonné comme l’attaque de trop, l’opposition politique avait appelé à marcher pour pour protester contre la gestion «peu satisfaisante» de la crise sécuritaire par le gouvernement et aussi, pour protester contre «l’augmentation du coût de la vie». C’est ainsi que des milliers de Burkinabè ont répondu à l’appel du regroupement dirigé depuis le 22 novembre 2020 par le nouveau Chef de file de l’opposition (CFOP), Eddie Komboïgo. «Le CFOP se réjouit que le peuple ait répondu massivement à (son) appel», aaffirmé Me Gilbert Noël Ouédraogo qui, au nom de l’opposition s’est félicité de leurs marches-meetings car elle a eu lieu en seulement cinq jours de préparatifs contre au moins «trois semaines» de préparatifs recommandée pour ce genre de manifestation.
«Sur les 45 provinces que compte le Burkina, 42 ont mobilisé des milliers de Burkinabè ayant compris le sens de notre combat. Des messages pour réclamer la paix et la sécurité ont été transmis aux Hauts-Commissaires. Seules trois provinces n’ont pas pu manifester à ces dates pour des raisons, soit de sécurité, soit de coordination. Il s’agit des provinces du Bam, de la Komandjari et des Balés», a fait savoir le coordonnateur de ces manifestations qui a signifié que les provinces qui n’avaient pas pu marcher, «marcheront à leur tour ce week-end pour exprimer leur ras-le-bol par rapport à la situation sécuritaire».
Pour l’opposition, «la réponse populaire massive» à son appel indique clairement qu’il s’agit d’une question d’intérêt national. «Et, si soutenir les Forces de Défense et de Sécurité (FDS) et les Volontaires de Défense pour la Patrie (VDP) engagés dans la défense de la patrie est une trahison, comme on a pu l’entendre, alors l’opposition politique assume pleinement et entièrement cette trahison. Si demander plus de sécurité pour les populations en détresse est anti-patriotique comme l’ont laissé entendre certaines personnes de la majorité et pas des moindres, l’opposition politique se réjouit que des millers de Burkinabè aient compris son message et aient aussi assimilé le rôle de l’opposition dans une démocratie», a réagi M. Ouédraogo, assisté par une forte représentation des membres de l’opposition et de la société civile.
Face aux accusations tendant à dire que l’opposition a été opportuniste en organisant cette marche parce que les populations avaient déjà le ton, le conférencier principal a répondu que son regroupement ne voulait pas justement être complice de la situation sécuritaire qui transcende les divergences politiques. «Vouliez-vous que l’opposition reste silencieuse dans cette situation ? L’intervention de l’opposition était nécessaire faute de quoi, elle se rendrait complice d’une situaion. L’opposition n’a fait que jouer son rôle qui est un rôle républicain, celui de justement se solidariser avec le peuple burkinabè», s’est-t-il défendu.
«La bonne question que nous sommes en droit de nous poser est, par contre, de savoir s’il est patriotique de ne pas assurer les missions régaliennes de protection des populations, de sécurisation du territoire et de la défense dans son intégrité?», a-t-il rétorqué.
Pour le CFOP et ses camarades, les «marches de samedi et dimanche ont bel et bien été citoyennes et fondamentalement républicaines».
«Pour ces marches, il n’y a eu aucun car venu d’ailleurs avec des manifestants. Il n’y a eu aucune distribution d’argent. Et, il n’y a eu aucun incident grave non plus, à part deux manifestants blessés accidentellement, l’un à Ouagadougou et l’autre à la place pour la marche. Il n’y a pas eu de casses, pas de désordre, pas de gaspillages. Oui, à tous égards, le CFOP estime que les marches du 3 et 4 juillet 2021 ont été un franc succès», s’est doublement félicité Me Gilbert Noël Ouédraogo qui rappelle que son organisation a engrangé ce succès «malgré les vastes campagnes d’intimidation et d’intoxication» de la majorité.
Selon les conférenciers, «la mobilisation des citoyens montre bien qu’il ne s’agissait pas d’une affaire de l’opposition seule, mais bien d’une préoccupation largement partagée par le peuple burkinabè dans son ensemble, tous corps de métiers et toutes classes sociales confondus». C’est pourquoi l’opposition politique estime que «tous ces millers de marcheurs ne sauraient être considérés comme des traitres à leur Patrie comme l’ont insinué certains».
«Dans l’intérêt supérieur de la nation, l’opposition réaffirme sa disponibilité à reprendre le dialogue avec pour seule condition que la question sécuritaire y soit inscrite comme la priorité des priorités», a annoncé Me Gilbert Noël Ouédraogo.
Une image de la marche à Ouagadougou a fait le tour du monde, notamment via les réseaux sociaux. Il s’agit de celle d’un marcheur, handicapé moteur, Hamadou Cissé qui a fait le circuit à l’aide de ses bras. Le CFOP a tenu à saluer le courage et l’engagement de M. Cissé, en faveur de la paix et de la sécurité en lui fournissant un moyen de déplacement adapté à sa condition. La remise de ce don a été faite à la fin de la conférence de presse.
Les conférenciers ont rappelé que l’appel du CFOP visait les objectifs principaux à savoir «exiger des mesures fortes pour la protection des populations pour qu’une tragédie comme celle de Solhan ne se produise plus jamais; rendre hommage aux victimes des attaques terroristes dans (le) pays; exprimer (leur) solidarité aux personnes déplacées internes; apporter (leur) soutien aux Force de Défense et de Sécurité (FDS) et aux Volontaires de la défense pour la Patrie (VDP); demander des changements dans l’équipe gouvernementale afin de mettre les hommes qu’il faut à la place qu’il faut; demander la tenue dans les meilleurs délais d’Assises nationales sur la sécurité et dénoncer la vie chère avec l’augmentation généralisée du coût des produits de première nécessité».
Par Bernard BOUGOUM