Un collectif d’auteurs composé de membres d’organismes internationaux, de mouvements, de fédérations ont publié le 14 mai dernier dans le journal l’Humanité une tribune où il dénonce les « énormes » dépenses consacrées à l’armement au détriment des besoins humains qui doivent selon lui être mis en avant. Les auteurs des ‘‘centaines de milliards de la honte’’ que l’on met dans les dépenses militaires alors que le monde souffre d’autres problèmes. «Les peuples souffrent, on leur distribue des armes. La honte ! », peut-on lire dans la tribune. L’intégralité de la tribune à découvrir ici.
En Inde, « avec plus de 350 000 nouveaux cas enregistrés par jour et la mort à chaque coin de rue, patients et familles sont pris dans une véritable course contre la montre, suppliant pour avoir accès à de l’oxygène et des médicaments devant des hôpitaux surpeuplés ». En Méditerranée, selon l’Organisation internationale pour les migrations, au moins 453 migrants ont péri depuis le 1er janvier.
De nombreuses voix parlent de honte, face à la tragédie des migrants disparus noyés, sans que les États ne déploient les moyens nécessaires pour les sauver en application des principes élémentaires du droit international maritime. Selon l’Unicef, « plus de 10 millions d’enfants en République démocratique du Congo, dans le nord-est du Nigeria, dans le Sahel central, au Soudan du Sud et au Yémen souffriront de malnutrition aiguë en 2021 ». Pour le Programme alimentaire mondial des Nations unies, « la sécheresse incessante qui sévit à Madagascar pousse des centaines de milliers de personnes au bord de la famine ».
Pourtant les moyens ne manquent pas. Ainsi, le Monde du 15 avril relate la visite du ministre des Affaires étrangères français en Inde comme étant « intimement liée aux intérêts économiques français. En particulier l’éventuelle vente supplémentaire de Rafale, dont l’Inde a déjà acheté 36 exemplaires à Dassault Aviation, en 2016, pour près de 8 milliards d’euros. Depuis 2018, de nouveaux appels d’offres ont été lancés avec, à la clé, potentiellement plus de 150 avions ». L’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm a estimé que les dépenses militaires mondiales s’élèvent à près de 1 645 milliards d’euros en 2020, soit une augmentation de 2,6 % par rapport à 2019.
La France a livré en Inde des lits et des appareils respiratoires, c’est un peu de solidarité humaine qui se manifeste. Mais nous vivons des moments de honte. Alors que des millions d’individus subissent la pandémie sans les moyens médicaux nécessaires, connaissent le chômage et la précarité, souffrent de la faim, que d’autres se noient en fuyant les guerres et la
misère, le montant des dépenses militaires mondiales a atteint un montant jamais connu dans l’histoire de l’humanité. Les peuples souffrent, on leur distribue des armes. La honte !
La réduction des dépenses militaires est une nécessité. Leur réorientation vers des investissements utiles pour la santé, l’éducation, la recherche, la culture, le climat et une économie durable permettrait la création d’emplois en France et dans le monde. Si les neuf États possédant des armes nucléaires stoppaient leurs programmes, plus de 820 milliards d’euros pourraient être réorientés dans les 15 années à venir vers la satisfaction des besoins humains. Ce serait conforme avec la charte des Nations unies, qui stipule (article 26) que les États doivent « favoriser l’établissement et le maintien de la paix et de la sécurité internationales en ne détournant vers les armements que le minimum des ressources humaines et économiques du monde », mais aussi avec le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) et le traité sur l’interdiction des armes nucléaires (Tian) entré en vigueur le 22 janvier 2021. Pour son avenir, l’humanité n’a d’autre chemin que la paix.
Signataires : Roland NIVET et Edith BOULANGER (Co-porte-paroles nationaux du Mouvement de la Paix) ; Jean ZIEGLER (conseiller du conseil des droits de l’homme des Nations Unies), Pradip BISWAS (v-p de la fédération des employés de banque d’Inde), Alain ROUY (secrétaire de l’AIEP – Asso internationale des éducateurs à la paix), Véronique MARTIN (secrétaire confédérale CGT), Lilian HALLS-FRENCH (Co-présidente Initiative Féministe EuroMed IFE-EFI), Michèle DECASTER (militante afaspa), Jim ANDERSON (Peace action), Christian REECHT (membre de l’Action Catholique Ouvrière)
Tribune publiée dans l’Humanité le 14 mai 2021