Astou Sokhna! Un nom que n’oublieront jamais, ou pas de sitôt, les populations de la commune de Louga, située à 200 km de Dakar. Même au-delà des frontières du Sénégal où l’affaire fait grand bruit, Astou Sokhna, ce sera toujours comme un mauvais rêve. Non pas parce que cette femme représente une grande figure de la lutte contre l’esclavage ou qu’elle a contribué à la dernière qualification historique des Lions de la Teranga pour la prochaine coupe du monde de football Qatar 2022.
Mais Astou Sokhna, devient une icône malgré elle, parce qu’elle est morte en voulant donner la vie! A raison, l’émotion demeure encore grande dans ce pays qui constitue un véritable vivier de médecins sur le continent et où dont des hôpitaux sont cités comme des références sous les tropiques. Sauf que le centre régional de santé de Louga, lui, s’est taillé, à en croire les dénonciations des habitants de cette localité, une réputation peu enviable de goulag pour les femmes.
Et c’est pour que plus jamais les femmes ne subissent dans cet hôpital «toutes les formes de violences», que plus de 65 000 signataires, juste dans l’après-midi de ce lundi, d’une pétition ont dénoncé, comme la famille de Astou Sokhna, les «négligences médicales» qui y ont cours. Certes, sur le continent noir où tout est encore priorité, certains centres de santé manquent encore de tout, mais la vie est si précieuse, que toute femme qui veut en donner, doit bénéficier des meilleures conditions de soins et de l’environnement le mieux pensé en la matière. Ce qui, malheureusement, n’a pas toujours été le cas.
Mais combien de Astou Sokhna ont dû vivre le calvaire dans des maternités, alors qu’elles étaient déjà condamnées à enfanter dans la douleur, châtiment originel qui colle à la femme depuis le jardin d’Eden, où Eve a fait manger à Adam, le fruit défendu, selon le Livre de la Genèse, cher aux Chrétiens? Elles sont nombreuses les Astou Sokhna que des accoucheuses qui portent mal leur nom de sages-femmes, n’ont pas entouré de la bienveillance que nécessitait leur état.
«Quand tu prenais du plaisir est-ce que nous on était là»? Ce serait le genre de propos que n’hésitent pas à balancer des sages-femmes à la figure de femmes en train de geindre de douleurs atroces sur la table d’accouchement. Cependant, elles ne sont pas toutes ainsi, car de nombreux témoignages, et des plus beaux, magnifient des sages-femmes qui savent trouver les mots pour réconforter leurs semblables en ces moments délicats de leur vie. Ce serait donc excessif, voir inadmissible et ingrat, de jeter le bébé avec l’eau du bain. Même si, selon le proverbe bien africain c’est un seul âne qui a mangé la farine et la bouche de tous les ânes est devenue blanche, on ne peut pas ne pas reconnaître le professionnalisme et la douceur de ce corps de métier dont l’exercice est loin d’être le plus facile.
Pourvu que la désormais affaire Astou Sokhna qui a, en toute logique, en attendant que toutes les responsabilités soient situées, suscité émoi et colère à Louga devienne vite un mauvais souvenir et que de belles histoires d’accouchement noient les cauchemars de toutes ces femmes qui meurent en voulant donner la vie. Car nous en sommes tous conscients, tant qu’ils en ont les moyens, les médecins sauvent plus de vies qu’ils n’en perdent.
Par Wakat Séra