Plus de 200 morts au Mozambique, et une centaine au Zimbabwe. Des milliers de personnes en détresse. Les aides qui font défaut. Des autorités dépassées par l’ampleur du drame. C’est la comptabilité macabre provisoire dont peut se targuer le cyclone Idai, après sa visite violente au Mozambique et au Zimbabwe. Si l’addition est salée sur le plan humain, elle n’en n’est pas moins catastrophique côté infrastructures où, presque tout a été détruit par la bourrasque qui a terminé sa course en terre zimbabwéenne. Particulièrement meurtrie par Idai, la ville portuaire de Beira, située au centre du Mozambique se relèvera difficilement de cette tragédie où la vie est désormais d’une grande précarité. C’est dans le noir et le dénuement que les familles qui ont tout perdu, ont entamé le deuil de leurs proches emportés par le cyclone qui a terrassé, maisons d’habitation, bâtiments administratifs, arbres et poteaux électriques, pour écourter la liste des dégâts. Et comme il fallait s’y attendre, l’acheminement de l’aide vers la ville-martyre est un calvaire, vu qu’il se fait par la route, les vols au départ et à destination de Beira ayant été suspendus suite au chaos provoqué par le cyclone mortel. Plusieurs plans d’urgence, ont été exploré pour balancer par les airs, le peu d’aide disponible. Et un malheur n’arrivant jamais seul, comme l’énonce péremptoirement l’adage, ce cyclone fait parler de lui alors que l’est du continent venait de faire face à la furie des eaux, suite à une semaine de pluies torrentielles et d’inondations. Du reste, le Mozambique a toujours les pieds dans l’eau, des régions entières étant inondées par ces averses qui n’en finissent pas.
Après avoir pleuré leurs morts, le Mozambique et le Zimbabwe feront encore face à l’épineux problème des déplacés. Et ce ne sera pas le plus aisé des défis, les Nations Unies ayant prévu, pour le seul Mozambique, le chiffre inquiétant de «600 000 personnes qui risquent d’être exposées aux vents» du «cyclone le plus puissant que l’Afrique australe ait connu ces dix dernières années». S’il faut reconnaître que ces catastrophes sont dites naturelles, il n’en demeure pas moins que la vérité est établie qu’elles portent de plus en plus la griffe humaine. En témoignent les effets dévastateurs des changements climatiques auxquels l’Afrique paie un lourd tribut sans en être forcément à l’origine. Mais comme les puissants de ce monde, en particulier les Etats Unis refusent de payer la facture de leur course effrénée aux richesses par l’industrialisation à outrance, donc la destruction massive de l’environnement, il faut bien qu’une fois de plus, le continent noir porte le fardeau. Aux méfaits de l’invasion coloniale, les injustices du commerce inéquitable, le pillage systématique des matières premières du riche sous-sol africain, l’organisation de la fuite des cerveaux du continent, la fermeture des frontières aériennes et maritimes de l’Europe et des Etats Unis érigés en citadelles contraignant les Noirs à préférer la mort dans la mer aux larmes de la mère, et surtout l’incurie des dirigeants, etc., s’ajoute désormais la récurrence des catastrophes dites naturelles. Toute chose qui renforce le très peu glorieux statut de continent maudit que porte l’Afrique. Pourtant, l’Afrique très courtisée pour ses richesses naturelles est considérée, par les loups grossièrement déguisés en agneaux, comme le continent de l’avenir.
En tout cas, le drame mozambicain risque fort de dévoiler encore un peu plus le sort des Africains dont les dirigeants, habitués à tendre la sébile pour vivre d’aides distillées à doses homéopathiques, n’ont jamais cherché à mettre véritablement leurs populations à l’abri de ces catastrophes. La politique et surtout la préservation des privilèges de classes oligarques ont pris le pas sur le bien-être de populations dont les gouvernants ne se souviennent que lorsque sonne l’heure des votes. En attendant que le vent change de direction et que l’Afrique décide de se prendre en charge et d’assumer son développement, les Mozambicains observent trois jours de deuil et s’attendent à vivre des lendemains très sombres.
Par Wakat Séra