La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO) ne baisse pas la garde face à la situation au Niger, où les putschistes déroulent leur plan, même si ce n’est pas en toute sérénité. Le général Abderahamane Tiani et son équipe, viennent d’enfiler aux nominations de chefs militaires qui sont venus balayer des anciens qui s’étaient, pourtant rangés aux côtés des putschistes, la désignation d’un Premier ministre en la personne de Ali Lamine Zeine qui sera à la tête d’un gouvernement de 20 ministres, majoritairement des militaires, formé ce jeudi.
L’exécutif mise en place au moment où ceux qui nous gouvernent planchaient sur le sort du Niger, répond sans doute à la stratégie de la junte de faire croire qu’un ordre est en place pour conduire les affaires du pays, avec des interlocuteurs précis dans chaque domaine. Mais comme pour dire que cette défiance à l’endroit de la communauté internationale éloigne davantage la junte des valeurs de l’institution qui n’a de cesse de condamner toute prise de pouvoir autre que par les urnes, la CEDEAO a maintenu ses sanctions imposées aux militaires.
La fermeture des frontières, les interdictions de voyage et le gel des avoirs de toutes les personnes, ou tous les groupes de personnes dont les actions ont pour effet d’entraver les efforts pacifiques déployés en vue d’assurer le rétablissement rapide et intégral de l’ordre constitutionnel, sont, entre autres, des mesures fortes qui accompagnent d’autres purement économiques, tout autant drastiques qui n’ont pas mis du temps à aggraver le quotidien de Nigériens qui tiraient le diable par la queue. Mais, de Niamey à Maradi, en passant par Dosso, Tillabery, Zinder, Diffa ou Tahoua, les Nigériens ont commencé à sentir un mieux, depuis l’avènement du président Bazoum, le 2 avril 2021, lorsque celui-ci a prononcé un discours fondateur dans un centre de conférence Mahamat Gandhi de Niamey qui a refusé du monde à l’occasion de cette prestation de serment inédite. Toute chose qui a renforcé la surprise générale née autour de ce coup d’Etat perpétré par la garde présidentielle, sur fond d’intérêts personnels, de mauvaise foi et de desseins cachés, mais désormais mis à nu, de «camarades» politiques, des membres influents du Parti nigérien pour la démocratie et le socialisme, le PNDS-Tarrayya.
Certes, pour une raison ou une autre, surtout de frustrations personnelles et communautaires qu’ils ont subies, les partisans des putschistes trouvent dans ce coup d’Etat une véritable délivrance et n’ont eu aucune peine à se rallier aux auteurs coup de force, manifestant dans les rues et remplissant les stades, aux côtés d’opposants qui, on l’espère ne déchanteront pas après, comme en Guinée, lorsque Alpha Condé a été chassé par un putsch militaire. Que dire de tous ces badauds qui ont également trouvé un fond de commerce dans ces rassemblements de soutien! En tout cas, ce premier sommet de la CEDEAO qui s’est tenu à la suite de celui qui a lancé un ultimatum dont les effets ont été loin de ceux escomptés, s’était donné toutes les chances d’afficher de la fermeté tout en privilégiant les voies du dialogue. Cependant, les chefs de l’Etat de la sous-région et ceux invités parce que leurs pays ne sont pas membres de l’organisation sous-régionales mais sont concernés par la situation de leur voisin, ne transigent pas sur la libération de Mohamed Bazoum, de sa famille et de ses collaborateurs, et la réinstallation du président à la tête du Niger, sans oublier le retour à l’ordre constitutionnel du pays. Cela n’arrive pas qu’aux autres!
Problème: face au raidissement des positions de chaque camp, comment mettre en œuvre la machine de retour à la démocratie, que cela soit par la voie douce ou celle forte? C’est la grande question qui se pose, poussant les Nigériens à craindre le pire.
Par Wakat Séra