Si chez nos voisins d’à côté, la propagande d’une « wagnerisation » à la soupe Bambara fait trembler l’Élysée, les marmites sont en effervescences sur d’autres territoires.
S’il s’avère que l’extension des terroristes d’une zone A à une zone B est une certitude, devrions-nous nous inquiéter d’une relocalisation des enjeux du Sahel au Golfe de Guinée ?
En effet, la focalisation terroriste sur les zones hors-sahéliennes heurte la nature laxiste de l’Africain à traiter les sujets sauf lorsqu’il y’a morts d’hommes.
Depuis peu, l’asymétrie avec laquelle se déroule les confrontations entre les terroristes et nos armées posent des questions de fonds de trois ordres qui méritent des réflexions, ni sous l’angle du laïus des théoriciens, encore moins des académiciens mais surtout de ceux dont le métier ou l’analyse est le pragmatisme et la proposition de solutions concrètes car comparativement à d’autres secteurs, si la vie est d’abord une question de santé, survivre est avant tout un problème de sécurité.
D’abord, l’argument courant issu de l’interprétation erronée : actions violentes ou meurtrières = terroristes = musulmans, est remis en cause dans sa nature même aujourd’hui.
Pour cause, les jeux complotistes mettent dans l’imposture les revendications originelles car elles sont plus que jamais aujourd’hui liées à des enjeux économiques et géopolitiques, des pillages de ressources, des partitions minéralo-territoriales, de la domination militaire mais qui restent contrairement à d’autres voilés ou sous-estimés.
Ensuite, la prolifération de ces groupes obéit un tant soit peu à un business model solide (économie parallèle, soutien technique ou financier non-étatique ou de lobbyings) soutenu d’un environnement de désertion étatique ayant fait ses preuves au Sahel au regard de la pérennité de leurs activités qui pourront être reprises dans d’autres zones suivant le même modèle de développement à quelques spécificités près.
Enfin, un autre argument dont la pertinence tire sa source d’une réalité commune dans les pays touchés est celui de la déconstruction de l’État. Celle-ci représente une poussée d’Archimède pour ces groupes qui tirent leur force du nouveau châtiment que l’État inflige à sa population (explosion des inégalités, illégalité au plus haut sommet, manipulation étrangère …) et qui obtient un écho favorable chez les couches populaires.
Pour l’heure, la menace ne restant pas passive à l’automaticité de nos réponses nous demande de remettre en cause notre modèle de défense et de sécurité pour ce qui concerne cette nouvelle menace et qui au regard de certaines attaques de l’ennemi apparaissent être plus de la légitime défense qu’une contre – offensive.
Par ailleurs, la définition ou une meilleure segmentation de zones prioritaires d’urgences pourrait amoindrir la stabilité de ces groupes. Ces actions doivent être le fait d’unités spéciales compétentes pour répondre aux initiatives et actions criminelles et terroristes d’envergures, auxquelles les missions régaliennes de la police ou de la gendarmerie ne sont pas habilitées à faire face.
Le renseignement humain étant l’une des clés du succès d’une opération militaire, il devra être au cœur de toutes les stratégies.
En tout état de cause, face à un ennemi invisible, à défaut de pouvoir le neutraliser, il faut tout au moins le dissuader de ne pas s’installer.
Comme le disait Martin Luther King « Ceux qui aiment la paix doivent apprendre à s’organiser aussi efficacement que ceux qui aiment la guerre ».
Tall Madina
Analyste politique et géostratégique, diplômée en Études Stratégiques, Sécurité et Politique de Défense. Chercheuse sur les questions de terrorisme dans la zone sahélo-saharienne, éditorialiste et écrivaine. Présidente du Mouvement Nouvel Afrique – Nouvelle Génération
Facebook : Tall Madina Officiel / Tall Madina