Le 9 mai 2017, c’est dans une ambiance bon enfant que la résidence de l’Union européenne à Ouagadougou a accueilli, les invités à la Fête de l’Europe, qui coïncide cette année, avec le 60è anniversaire de l’existence de l’Union. L’ambassadeur, chef de la Délégation de l’Union Européenne au Burkina, Jean Lamy et son épouse ont alors exprimé à tous leurs hôtes du jour, leur joie. Occasion également pour le diplomate européen de présenter les acquis de l’institution à l’honneur, depuis sa naissance en 1957 jusqu’à nos jours, les péripéties qu’elles a traversées et ses perspectives. C’était en présence de plusieurs personnalités, dont le président du Conseil constitutionnel, Kassoum Kambou, du ministre d’Etat en charge de la Sécurité Simon Compaoré, et du ministre burkinabè en charge des Affaires étrangères, Alpha Barry.
« C’est avec un grand plaisir que mon épouse et moi-même vous accueillons ce soir en cette Résidence ouagalaise de l’Union européenne, afin de célébrer ensemble cette journée de l’Europe, fêtée partout dans le monde le 9 mai, en souvenir du discours fondateur prononcé le 9 mai 1950 par un des pères fondateurs de l’Europe moderne, le Ministre Robert Schuman.
Le 9 mai de cette année 2017 revêt une triple importance, pour l’Europe, pour l’Afrique et pour le Burkina Faso.
1- D’abord parce que l’année 2017 est celle du 60ème anniversaire du Traité de Rome, en mars 1957, qui a posé les bases de ce qui est aujourd’hui l’Union européenne, la 2ème économie du monde, un partenaire économique et commercial majeur, une puissance solidaire qui est aussi le premier donateur d’aide au développement dans le monde. Soixante années de paix, de protection des travailleurs, d’opportunités pour les affaires, soixante années de solidarité, de liberté et de droits.
Pourtant, si, vu de l’extérieur, l’Europe continue à faire rêver, en son sein beaucoup se posent des questions. Comme le disait récemment un ancien Président du Parlement européen : « De toute part, on nous regarde, on nous envie, mais nous, nous nous ne nous admirons pas et nous doutons de nous-mêmes »
2- La 2ème raison pour laquelle cette année 2017 est une année particulière, c’est parce que 2017 est une année où l’Europe apparaît à la croisée des chemins, où elle s’interroge sur son destin et sur sa raison d’être, avec des événements politiques importants, que l’on peut mentionner, et qui ne vont pas tous dans le même sens : En mars dernier, suite au référendum de juin 2016 au Royaume Uni, se sont ouvertes les négociations du Brexit, qui devront s’achever au plus tard en 2019. Mais, c’est aussi en mars dernier que le parti libéral l’a emporté lors des élections aux Pays Bas. En septembre prochain auront lieu les élections fédérales en Allemagne. Et puis, bien sûr, il y a deux jours seulement, le peuple français, en élisant Emmanuel Macron comme nouveau Président, a fait le choix d’une France dans l’Europe, ouverte sur le monde, qui croit dans le projet européen.
Que montrent ces débats intenses en Europe ? Ils montrent que l’Europe perd quand elle devient une abstraction, juste une institution « hors-sol » éloignée de ses citoyens, un bouc émissaire de la mondialisation, quand elle pousse à la fermeture et au repli sur soi. L’Europe gagne quand elle redevient concrète, qu’elle est proche des préoccupations des citoyens, quand elle met en avant les valeurs qui la guident, quand elle reste ouverte au monde.
Car l’Europe est un multiplicateur d’efficacité.
L’Europe est un multiplicateur d’efficacité avec ses Etats-membres quand il s’agit d’affronter collectivement les grands défis de notre époque, comme ceux de la sécurité, du développement économique et du commerce juste, de la lutte contre le changement climatique…
L’Europe est aussi un multiplicateur d’efficacité avec ses partenaires dans le reste du monde, dans son action extérieure, politique et de coopération, tant il est vrai qu’on est plus fort à plusieurs, que l’action collective permet d’additionner les meilleures solutions et d’optimiser les effets de levier. Un exemple ici au Burkina Faso : Ensemble, l’aide de l’Union européenne et de ses Etats-membres représente bon an mal an plus de 40% du total de l’aide extérieure que reçoit le Burkina Faso, ce qui fait de notre Union un partenaire majeur du pays.
3- Ceci m’amène à mon troisième point : L’année 2017 est aussi une année cruciale pour les relations entre l’Europe et l’Afrique, pour la coopération entre l’Europe et le Burkina Faso. Et c’est l’intérêt du Burkina Faso d’avoir en l’Europe un partenaire fort, force de proposition et d’appui.
Avec l’ensemble du continent africain, les bases de nos relations seront réexaminées lors du sommet Afrique-Union européenne qui se tiendra fin novembre à Abidjan, et qui aura pour thème « investir dans la jeunesse ». Pour son prochain partenariat avec l’Afrique, l’Europe se présente avec une offre nouvelle de coopération qui a pour mots-clés : gouvernance et sécurité, investissement et emploi, jeunesse et femmes, énergie et transformation…
J’en viens maintenant aux relations de l’Union européenne avec le Burkina Faso. Là aussi, l’année 2017 est une année-clé car c’est l’année de l’enclenchement du processus pour permettre la mise en œuvre du PNDES. Je ne répéterai ici qu’un seul chiffre, celui de la promesse faite lors de la conférence de Paris par le Commissaire au Développement de l’Union européenne, M. Mimica, qui a affirmé la disponibilité de l’UE à appuyer le PNDES au fur et à mesure de sa mise en œuvre pendant 5 ans à hauteur de 800 M€ (524 milliards de FCFA). Mais pour que cette aide soit efficace, ce qui importe, c’est qu’elle soit dispensée d’une façon qui permette d’accompagner les politiques du pays et les réformes du Gouvernement pour aider à atteindre les résultats recherchés. Pour cela, le « comment » importe autant que le « combien » (et d’ailleurs, le combien, qui est fluctuant, dépend aussi largement du comment).
Le « comment », c’est une approche contractuelle de l’aide, où chaque partie a ses droits et ses obligations, son rôle à jouer, pour la bonne mise en œuvre, au fur et à mesure, des termes du contrat. Pour cela, l’essentiel est le dialogue, un dialogue précis, constant et itératif, un dialogue politique et un dialogue sur les politiques, sur la gouvernance et les réformes sectorielles, sur les objectifs et les résultats à atteindre, sur les modalités de l’aide.
S’agissant du dialogue politique, nous nous félicitons de la tenue il y a juste une semaine à Ouagadougou d’une nouvelle session de dialogue politique de haut niveau, dans le cadre de l’article 8 de la Convention de Cotonou qui encadre la coopération de l’UE avec les pays ACP. Cette session a permis un échange approfondi sur des sujets d’intérêt partagé tels que la bonne gouvernance et la consolidation de l’Etat de droit, les enjeux majeurs que sont le défi migratoire, le défi démographique, le défi du rôle du secteur privé dans le développement.
Le dialogue politique et de coopération s’est aussi traduit, depuis un an, par les nombreuses visites et échanges qui ont eu lieu, dans les deux sens, entre l’UE et le Burkina Faso. J’en citerai seulement trois :
– la visite en juin dernier à Bruxelles de SE le Président Kaboré, hôte d’honneur des Journées européennes du Développement, qui a pu rencontrer à cette occasion les plus hautes autorités politiques de l’Union européenne ;
– le rendez-vous essentiel collectif réussi que fut en décembre dernier la conférence de Paris pour le financement du PNDES, que l’UE a soutenue, et au cours de laquelle le Commissaire européen au Développement a rencontré le Chef de l’Etat et le Premier Ministre et a pu signer trois importantes conventions d’appui budgétaire ;
– la visite récente, à l’occasion du Fespaco – auquel l’Union européenne est heureuse d’avoir apporté son soutien-, de M. Stefano Manservisi, Directeur général de la coopération internationale et du développement de la Commission européenne.
Le dialogue et l’accompagnement de la coopération entre l’Union européenne et le Burkina Faso se font autant à Bruxelles qu’à Ouagadougou. Permettez-moi de mentionner également ici la présentation récente au Président Tusk du Conseil européen de ses lettres de créance par la nouvelle Ambassadeur du Burkina Faso à Bruxelles, Mme Jacqueline Zaba.
En fait, le dialogue nécessaire pour rendre efficace la coopération de l’Europe avec le Burkina Faso est plus qu’un simple dialogue, à deux, entre d’une part les Autorités burkinabè et d’autre part l’institution « Union européenne », qui n’est rien sans les Etats-membres qui la constituent. C’est un dialogue plus large :
– Un dialogue qui associe aussi pleinement, du côté européen, les Etats-membres représentés à Ouagadougou et leurs agences de développement : l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, la France, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède, dont je salue les représentants parmi nous ici ce soir. Nous, Européens au Burkina Faso, nous avons la même approche, une vision commune, des stratégies communes et des moyens dont la complémentarité, si elle est bien organisée, est un levier considérable pour accompagner le pays. C’est pour cela que nous sommes engagés en ce moment dans un exercice important de programmation conjointe de nos aides respectives.
– Mais c’est aussi un dialogue, qui associe, du côté burkinabè, tous les acteurs non-étatiques, que sont les organisations de la société civile, des ONG, des acteurs privés, -dont je salue également les représentants parmi nous ici ce soir-, partenaires de l’Europe au service du développement du Burkina Faso
Au moment de conclure, je voudrais, me tourner:
– vers nos hôtes burkinabè, que je souhaite remercier ici pour leur engagement résolu, franc, très professionnel – et en même temps toujours courtois et cordial- dans la conduite avec nous de notre coopération, dont les procédures peuvent paraître parfois, je le reconnais, un peu compliquées ;
– vers mes collègues européens, que j’évoquais à l’instant, que je remercie de leur soutien dans notre travail collectif, avec lesquels le travail politique, de concertation, d’appui au développement ne cesse de se renforcer et de converger ;
– vers mes collègues de la Délégation de l’Union européenne au Burkina Faso, dont je tiens à saluer le travail et l’engagement à mes côtés au service des bonnes relations euro-burkinabè et du développement du Burkina Faso. J’adresse des remerciements tout particuliers à toutes celles et tous ceux qui ont contribué à organiser cette réception, en faisant en sorte que ce soit un moment agréable et convivial.
Pour terminer, je vous invite à assister nombreux à deux événements importants cette fin de semaine, dans le domaine sportif et culturel, qui vont prolonger l’esprit d’amitié de cette journée européenne :
– d’abord un match de foot Europe-Burkina, ce samedi 13 mai, à 9H00, dans le centre aéré de la BCEAO ; j’espère que vous serez nombreux à venir encourager vos équipes lors de cette coupe d’Europe ou coupe des Nations d’un nouveau genre ;
– ensuite, à partir de ce vendredi 12, à l’Institut français de Ouagadougou, et pour une semaine, venez nombreux assister aux films que les pays européens présents au Burkina présentent dans le cadre d’une nouvelle semaine du cinéma européen. La programmation est riche. L’entrée est gratuite. Vous pourrez y voir aussi le « Yennenga d’or » du dernier FESPACO, qui a bénéficié aussi d’un prix spécial UE-ACP, le film « Félicité » du réalisateur franco-sénégalais Alain Gomis. Félicité ! C’est ce que nous nous souhaitons à tous, au-delà des difficultés, avec optimisme, en cette journée européenne du 9 mai.
Vive l’Europe ! Vive le Burkina Faso ! vive la coopération euro-burkinabè ! »