L’adjudant-chef major, Abdrahamane Zétiyenga, a fondu en larmes à la barre du Tribunal militaire le mercredi 8 décembre 2021 alors qu’il faisait sa déposition entrant dans le cadre du procès du dossier Thomas Sankara et douze autres. Ce témoin qui a affirmé qu’il entretenait une relation particulière avec l’ex-président Thomas Sankara a chargé le général Gilbert qui « est » l’un des commanditaires du drame du 15 octobre 1987.
Abderrahmane Zétiyenga dit avoir su aux premiers moments quand le climat devenait délétère entre les deux leaders de la révolution d’août 1983 à savoir les capitaines Thomas Sankara et Blaise Compaoré. L’adjudant-chef major dit avoir reçu un courrier du président Sankara dans lequel l’ancien président a expliqué amplement la situation. Il a de ce fait, à son retour de Pô où il était pour un stage, suggéré au lieutenant Gilbert Diendéré qu’il secondait dans la sécurisation de la présidence du Faso, de convoquer une réunion entre les éléments des deux gardes afin d’aplanir les divergences et le climat de méfiance qui se généralisait pour éviter que le pire n’arrive.
Effectivement la réunion a été tenue dans la matinée du 15 octobre 1987 avec les différentes unités des deux leaders de la Révolution. Seulement, le témoin s’est dit surpris en son temps que la majorité de ceux qui ont répondu présents, soient les éléments de la garde de Sankara. Du côté des éléments de Blaise Compaoré, il n’y avait que son chauffeur, Amidou Pâté Maïga, qui est venu. Ce dernier a informé que Hyacinthe Kafando, chef de la sécurité de Blaise Compaoré était malade et n’allait pouvoir prendre part à la rencontre.
A cette rencontre, le témoin juge le comportement de Gilbert Diendéré louche et inquiétant puisqu’il n’a pris la parole tout au long des discussions que pour dire qu’il a reçu un message qui disait que Thomas Sankara préparait un complot contre Blaise Compaoré à 20H. Et qu’au vu de cette information, pour éviter le pire, il allait arrêter le président et le garder en résidence surveillée.
Aussi, à son retour de Pô pour chercher de son propre chef à gérer la situation, il dit avoir eu une rencontre en privé avec Thomas Sankara. Par la suite, il est parti vers le lieutenant Gilbert Diendéré avec qui il entretenait de bons rapports de camaraderie et de travail pour lui faire le point des discussions qu’il a eues avec le père de la Révolution burkinabè. Le témoin dit avoir été surpris du comportement de Diendéré qui s’est mué dans un silence incompréhensible. Et depuis lors, leur relation a changé, faisant de telle sorte que chacun prenait ses distances vis-à-vis de l’autre.
Le témoin dit avoir appris avec Eugène K. Somda, un élément de la garde de Sankara, la mort du chef de l’Etat et de ses compagnons vers 17H pendant qu’il était en poste à une des entrées du Conseil de l’Entente. Selon, se référant aux propos de Gilbert Diendéré lors de la réunion, il n’était pas question de le tuer mais de procéder simplement à son arrestation. C’est au cours de ses explications qu’il a fondu en larmes un long temps avant de ressaisir et continuer sa déposition.
Abdrahamane Zétiyenga est celui-là qui a aussi piégé Tondé Ninda dit « Mang Naaba », un supposé émissaire de l’accusé Diendéré Gilbert en le mettant sur écoute et transmettre au juge d’instruction. Mang Naaba, selon ses propos, a été envoyé par le général pour faire un faux témoignage.
A la sortie l’audience Me Prosper Farama de la partie civile a indiqué que l’étau se resserre sur le général Diendéré avec les derniers témoignages tandis que Me Oliver Yelkouni de la défense a dit qu’il ne souhaitait pas d’abord se prononcer sur la déposition de Abdrahamane Zétiyenga parce qu’il sait ce que le témoin a dit dans le dossier. Il préférait attendre sa confrontation avec le général Gilbert Diendéré avant d’apprécier.
Par Bernard BOUGOUM