Le procès qui n’aurait jamais dû avoir lieu, a pris fin sur des notes plus ou moins heureuses, mais surtout porteuses d’un message, celui du nécessaire retour à l’entente entre les deux pays frères du Bénin et du Niger. En effet, alors qu’ils étaient jugés pour «fausse attestation usage de fausse attestation», les travailleurs de Wapco Niger, l’une des filiales de la China National Petroleum Corporation (CNPC), ont vu finalement les faits qui leur sont reprochés, être requalifiés en «usurpation de titre et usage de données informatiques falsifiées». Mais la sorte de «happy-end» de cet épisode du feuilleton de la «guerre du pétrole» entre le Niger et le Bénin, permet à Dame Hadiza Moumouni, deuxième personnalité de Wapco Niger, de retourner à l’allaitement du bébé dont elle est mère depuis seulement quatre mois.
Un gros soulagement donc pour la directrice adjointe de Wapco Niger, mais aussi pour ses deux co-accusés qui ont été libérés, à l’issue du jugement de la Cour de répression des infractions économiques et de terrorisme (Criet), qui leur a tout de même collé une peine de 18 mois avec sursis. Il faut rappeler que ces trois personnes qui respirent, à nouveau, l’air vivifiant de la liberté, faisaient partie d’un groupe de cinq à avoir été interpellés, le 5 juin dernier, sur la plate-forme de Sèmè-Kpodji, théâtre du bras-de-fer qui oppose le Bénin et le Niger autour de l’oléoduc qui doit acheminer le pétrole du Niger, pays enclavé sans littoral maritime. Certes, «la guerre du pétrole» qui est née du refus du Niger d’ouvrir sa frontière avec le Bénin, n’est peut-être pas terminée, mais ce procès, montre à souhait que les dirigeants des deux pays voisins, dans l’intérêt de leurs peuples respectifs, doivent mettre balle à terre. Car, la co-existence harmonieuse séculaire entre Nigériens et Béninois, qui transcende des frontières artificielles nées de la colonisation, doit pouvoir être préservée.
Malheureusement, le putsch militaire du 28 juillet 2023 est passée par là et a mis à mal les relations pacifiques entre le Niger et le Bénin, le deuxième pays étant considéré par le premier comme l’un des tenants de la ligne dure dans la mise en application des mesures drastiques prises par la CEDEAO après le coup d’Etat. Le Niger du général Abderahamane Tiani, se basant en partie sur un reportage qui s’est révélé travesti, accuse même le Bénin d’abriter des forces françaises dont le but serait de déstabiliser le régime de la transition. Des arguments, ou alibis, c’est selon, rejetés avec force par le Bénin. Mais pour l’instant, la position des autorités nigériennes reste figée, empêchant toute réouverture officielle de sa frontière avec le Bénin, pour le plus grand malheur des populations des deux pays qui ont toujours commercé en étroite intelligence et en bonne entente. Sans jeter la pierre à l’une ou l’autre des parties en conflit, on ne peut que réitérer l’appel de Me Mounkaïla Yayé du Barreau du Niger, pour un retour au calme de la situation délétère entre les deux pays.
«Nigériens et Béninois sont des frères. Ces trois personnes que vous jugez, n’ont même pas besoin de badge pour venir chez elles au Bénin. Le pétrole ne doit pas nous diviser». Paroles du conseil de clients qui étaient bien heureux, à la fin de ce jugement, un procès qui, en réalité, était celui de la pulvérisation de la solidarité légendaire tant enviée à l’Afrique par d’autres continents minés par l’individualisme froid.
Par Wakat Séra