Les avocats de la partie civile, ont dénoncé ce mercredi 25 juillet 2018, au cours des débats du jugement du dossier du coup d’Etat manqué de 2015, « la stratégie » utilisée par leurs confrères de la défense. Selon les conseils des victimes du putsch manqué qui a fait 14 morts, les avocats des accusés veulent « décrédibiliser » le tribunal. Ces préoccupations de la partie civile ont été soulevées lors de l’audition du soldat de première classe Hamado Zongo qui a nié des parties de sa déclaration dans les Procès verbaux.
« Depuis le début de ce procès, certains accusés ont adopté une stratégie qui vise à décrédibiliser le travail des juges d’instruction », a regretté Me Séraphirin Somé, trouvant « dommage que nous n’avons pas d’archives sonores et visuelles pour confronter cela ».
Pour Me Somé qui a été interpellé par le président du tribunal militaire, le magistrat civil Seydou Ouédraogo, à cause de l’énervement observé dans son intervention, « dire que les Procès-verbaux (PV) authentifiés par un greffier ne sont pas fidèles ou mêmes sont faux, c’est très grave ».
La partie civile pense que cette stratégie de la défense qui consiste à demander aux accusés de nier les faits et de remettre en cause, en permanence, les rapports ou certains passages des PV, « n’est qu’une pure allégation » qui ne permettra pas l’éclaircissement de cette affaire.
Me Séraphin Somé trouve que malgré le fait que la défense « ne s’appuie sur aucun fondement » pour faire « des allégations », le tribunal est resté assez juste puisque « les droits des accusés sont rigoureusement respectés ».
Mais, face à cette argumentation de la partie civile, le juge Seydou Ouédraogo, président du tribunal, a répondu qu' »il n’est pas exclu que durant ce jugement certains avocats (de la défense) reviennent sur des pièces », signifiant que « c’est leur droit le plus absolu ».
Pour Me Alexandre Sandwidi, conseil du soldat de première classe, Hamadou Zongo qui était à la barre ce mercredi 25 juillet, le président du tribunal militaire rassure « tout le monde » par « sa sage décision ». Il a ajouté que les paroles de Me Séraphin Somé ressemblent à des « sermons ou à la limite des menaces ».
« A écouter Me Somé, les débats ici (à la barre) n’ont aucun sens », a renchéri Me Isaac N’Dolimana, évoquant l’article 427 du code pénal qui « dit que le juge ne pourra asseoir sa décision sur des éléments qui ont été débattus. Le tribunal apprécie les réponses données par les accusés », a relevé Me N’Dolimana.
Me Olivier Yelkouni, l’avocat du général Gilbert Diendére, présumé cerveau du coup de force manqué, prenant la parole par la suite, a laissé entendre qu’il « commence à avoir peur » après avoir écouté les argumentaires de la partie civile. « Mais ce n’est pas une peur bleue qui va m’empêcher de défendre mes clients à cette audience », a-t-il précisé.
Me Yelkouni a alors affirmé qu’il est « scandalisé » par le fait que la partie civile veut « considérer » les déclarations des PV « comme des paroles d’Evangile ». Pour lui, si tel est le cas, « on allait se contenter de lire les PV des juges d’instruction et prendre une décision » finale.
Mais le parquet par l’intervention du procureur militaire Alioun Zanré, a indiqué à toutes les parties que ce dossier qui juge 84 militaires et civils « est bien instruit à charge et à décharge ».
Par Bernard BOUGOUM