Le «conseil» et «envoyé» du président sénégalais Macky Sall, le bâtonnier Me Mamadou Traoré, poursuivi pour complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, meurtre, coups et blessures, dans le dossier du putsch manqué du 16 septembre 2015, a été appelé à la barre ce mercredi 21 novembre 2018, pour répondre des faits à lui reprochés.
Me Mamadou Traoré qui s’est retrouvé au camp Naba Koom, le 16 septembre 2015, vers 23h00 (GMT), afin de transmettre un message du chef de l’Etat sénégalais, par ailleurs président en exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), est aujourd’hui devant le tribunal, car accusé d’avoir apporté son aide aux putschistes dans le but de consolider le coup d’Etat.
A la suite de la notification des charges et à la question de savoir s’il reconnaissait les faits qui lui sont reprochés, le bâtonnier Traoré a répondu par la négative, soutenant qu’il n’est pas mêlé à ce qui s’est passé le 16 septembre 2015 et jours suivants.
Dans la soirée du 16 septembre 2015, Me Traoré aurait reçu un appel du président Macky Sall à propos de nouvelles «inquiétantes» sur le Burkina. Le chef de l’Etat sénégalais lui aurait également dit qu’il n’arrivait pas à joindre son homologue Michel Kafando et c’est ainsi qu’il aurait demandé au Bâtonnier de transmettre un message au général Gilbert Diendéré.
Le chef de l’Etat sénégalais lui aurait demandé de dire au «général Diendéré de s’impliquer pour la résolution de la crise», si c’en est une et de faire en sorte que «rien ne puisse arriver au président Kafando». C’est ainsi qu’il s’est rendu au camp dans le but de s’entretenir avec le général. «L’attente au camp a été longue. Après avoir livré le message, autour de minuit, je suis rentré chez moi», a déclaré le bâtonnier Me Mamadou Traoré.
Au cours des événements du 16 septembre 2015 et jours suivants, il aurait rencontré le général au moins quatre fois, en tant que «conseil» et «envoyé» de Macky Sall. Arrivé à Ouagadougou pour la médiation, le président en exercice de la Commission de la CEDEAO de l’époque, aurait envoyé Me Traoré dire au général Diendéré qu’il ne serait pas toléré qu’on sorte «du schéma de la Transition» débutée fin 2014, suite à une insurrection populaire.
En tant que «conseil» du président Macky Sall, Me Traoré n’hésitait pas à donner son avis sur un sujet ou faire des propositions quand il est sollicité par le médiateur. Selon sa déposition, pour une sortie de crise, il lui aurait suggéré, notamment la prise en charge des victimes de l’insurrection populaire et du putsch, et de rencontrer les éléments de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP) pour leur livrer le même message démocratique qui a été passé au général Diendéré.
Selon les dépositions de certains accusés, dont le capitaine Oussène Zoumbri, le commandant Aziz Korogo et le médecin colonel Saïdou Yonaba, le bâtonnier aurait été présent au camp Naba Koom quand on mettait en forme la déclaration qui a été lue à la télévision par le médecin colonel Mamadou Bamba. Sur ce sujet, il a laissé entendre qu’il n’y était pas en ce moment et qu’il «ne sait absolument rien de cette déclaration».
Pour ce qui est de la rencontre avec les médiateurs, Me Traoré a indiqué qu’il n’a participé qu’à une réunion entre le général et le président Macky Sall, signifiant qu’il n’a jamais été de la délégation de Diendéré comme certains tentent de le faire croire. Selon le parquet, c’est le général Gilbert Diendéré, lui-même qui aurait dit dans sa déposition qu’il a «négocié» le bâtonnier pour qu’il fasse partie de sa délégation.
L’audience a été suspendue et reprendra demain jeudi 22 novembre 2018, avec la poursuite de l’audition de Me Mamadou Traoré.
Par Daouda ZONGO