Deux mois de prison avec sursis. 200 millions de francs CFA d’amende de dommages et intérêts. C’est la condamnation récoltée par l’opposant Ousmane Sonko, jugé pour diffamation contre le ministre sénégalais en charge du Tourisme, Mame Mbaye Niang. Bien jugé, pourrait-on dire de soulagement, tant le pays entier était sous tension avant et durant ce procès qui était présenté, à raison, comme celui de tous les dangers. Certes le verdict a été prononcé en l’absence de l’accusé et dans le mécontentement de ses avocats qui ont déserté la salle d’audience, avant le jugement, dénonçant, entre autres, une violation des droits de la défense. Mais c’est le moindre mal, car l’explosion tant redoutée n’a pas eu lieu. Le remuant leader de la principale coalition de l’opposition Yeww Askan Wi et maire de Ziguinchor, ayant réussi à préserver son éligibilité pour la présidentielle de février 2024 pour laquelle il a déjà pris position dans les starting-blocks.
Et même si la bataille judiciaire peut encore jouer les prolongations, si Ousmane Sonko et ses avocats le veulent, mais le Sénégal qui retenait son souffle peut…souffler un bon coup. Mais pour combien de temps? C’est là toute la question, vu que le répit sera bien court, tant pour le pays que pour le chef du parti des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) se retrouve dans un engrenage judiciaire dont la prochaine étape ne doit pas être pour bien longtemps. Accusé de viols et de menaces de mort par Adji Sarr, une ancienne employée d’un salon de massage de Dakar, Ousmane Sonko qui, avec ses partisans crient à une cabale politique, risque encore plus gros dans le jugement de cette affaire. En tout cas, si tant est qu’il constitue un challenger de taille, donc un danger, pour le candidat du pouvoir qui voudrait donc le mettre hors course, la comparution d’Ousmane Sonko, devrait être pour dans pas bien longtemps. Ça sera rebonjour les appels des militants à redescendre dans la rue, avec toutes les conséquences que cela entraînerait pour le Sénégal, pourtant considéré comme le phare de la démocratie en Afrique.
Ce premier sursis fait-il partie d’un plan savamment conçu pour abattre Ousmane Sonko, le deuxième procès en vue étant plus corsé que celui qui vient de connaître son épilogue éphémère ou définitif? Le viol, catégorisé comme crime par la loi au Sénégal, appelle des peines bien plus lourdes que celles d’une simple diffamation. Ousmane Sonko, si les étoiles sont alignées pour lui, pourrait bénéficier de l’acquittement. Mais, si par malheur pour lui, la justice réussit à établir sa culpabilité, il devra tirer un trait sur sa carrière politique, à commencer par la présidentielle de février 2024. Ousmane Sonko est donc entre acquittement et condamnation à la prison ferme. Lui et ses avocats le savent si bien qu’ls mettront tout en jeu pour que ce procès n’enterre pas le champion de l’opposition. L’histoire se sera alors répétée, si celui qui avait dû se passer de l’Assemblée nationale à cause d’une simple erreur sur la liste des candidats aux législatives est encore privé de présidentielle, élection pour laquelle il a occupé la troisième marche du podium en 2019.
De toute façon, le Sénégal connaîtra cette ébullition préélectorale tant qu’il sera prêté à Macky Sall des intentions de vouloir briguer un 3e mandat. Du reste, le président sortant qui a déjà signifié que les dispositions juridiques lui donnent le droit d’aller à la reconquête de son fauteuil pour la troisième fois, ne fait rien pour dissiper le flou autour de cette nouvelle candidature. Toute chose qui apporte de l’eau au moulin des opposants et jette donc de l’huile dans le brasier préélectoral sénégalais.
Pendant combien de temps encore, Ousmane Sonko et Macky Sall, dans le silence des autres candidats tout aussi de grand gabarit, prendront-ils le Sénégal en otage?
Par Wakat Séra