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Procès putsch manqué: Mgr Paul Ouédraogo retourne dans la nuit du 16 septembre 2015

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Devant la Chambre de jugement du tribunal militaire burkinabè, en charge du dossier du coup d’Etat manqué de 2015, les témoignages se sont poursuivis ce mercredi 6 mars 2019. A la suite de l’agent de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), Jérémie Ilboudo, c’est au tour de Monseigneur Paul Ouédraogo de passer à la barre pour relater ce qu’il a vécu durant cette période de putsch manqué.

Monseigneur Paul Ouédraogo, témoin de certains actes du putsch manqué de septembre 2015, a été appelé devant le tribunal, pour livrer sa version des faits. Venu de Bobo-Dioulasso, il aurait rejoint les membres de la Commission de réflexion et d’aide à la réflexion (CRAD) et l’ex-président Jean Baptiste Ouédraogo, à la demande du chef d’état-major général des armées (CEMGA), le général Pingrenoma Zagré, pour assister à la réunion du 16 septembre 2015 au ministère burkinabè en charge de la Défense. Selon son témoignage, il a été escorté de la Base aérienne au ministère, car il ne pouvait pas y arriver seul compte tenu des barricades qui avaient été déjà érigées sur la route.  

Avant l’appel du général Zagré, l’invitant à l’aider à trouver des solutions à ce qui se passait, Monseigneur Paul Ouédraogo, qui était déjà en route pour Ouagadougou pour une rencontre de la Conférence épiscopale Burkina-Niger qu’il présidait, a dit avoir reçu vers 14h, un appel de la présidence, l’informant de l’arrestation des autorités de la Transition.

Il serait arrivé dans la salle où se tenait la rencontre, quand le général Gilbert Diendéré faisait le point d’une rencontre qu’il aurait eue avec les éléments de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (RSP). Le témoin dit se rappeler que le général Diendéré a confié aux participants que «c’est impossible que les éléments du RSP fassent marche arrière». C’est ainsi qu’il a proposé qu’il y ait une rencontre avec lesdits éléments en vue de les ramener à la raison. Une délégation à laquelle il faisait partie a été alors constituée pour se rendre au camp Naba Koom II. «Le général Diendéré a dit au chef d’état-major général des armées de se rasseoir qu’ils (lui et le colonel major Boureima Kiéré) vont nous devancer et qu’ils nous enverraient une escorte», a déclaré Monseigneur Ouédraogo.

Le témoin a soutenu qu’en route pour le camp, il a aperçu beaucoup de silhouettes armées.

Lors de la rencontre, les éléments ont fait savoir que «le problème fondamental de ce pays, c’est l’exclusion». A la question de savoir quelle solution ils proposaient, ils auraient laissé entendre que leur solution est «ce qu’(ils ont) fait». Selon le témoin, «il y avait de l’énergie dans l’air, l’ambiance était électrique». Un sous-officier qui était présent à la réunion, aurait affirmé que «deux grenades suffiraient pour les otages et que même (eux) ne s’en sortiraient pas». «C’est sûr qu’il y a eu des menaces. Ce sont les sous-officiers qui étaient les plus virulents», a poursuivi le témoin.

La délégation serait retournée au ministère de la Défense sans avoir trouvé une solution avec les éléments de l’ex-RSP à la suite de la rencontre, car ils ont opposé un refus catégorique, a dit Monseigneur Paul Ouédraogo. Les échanges se seraient poursuivies entre les membres de la CRAD, l’ex-président Jean-Baptiste Ouédraogo et Monseigneur Ouédraogo. «Le général Diendéré a dit que le vin est tiré, il faut le boire, il faut assumer», a dit Monseigneur Paul Ouédraogo, affirmant que le CEMGA lui a répondu en disant que depuis qu’il a pris fonction, il a toujours travaillé dans le but de faire de l’armée une armée républicaine et qu’il ne peut pas dire que l’armée fait un coup d’Etat.

Le colonel major Mamadou Traoré, lui, selon le témoin a demandé: «Mais mon général, vous dites qu’il faut accompagner, il faut accompagner quoi? On ne peut pas accompagner quelque chose qu’on ne sait pas». a ce stade, toujours selon le témoin, le général a affirmé que les éléments étaient en train de rédiger une déclaration, document qu’il a fait venir. Les participants à la réunion, se seraient rendus compte que la déclaration en question était une proclamation. L’ex-président Jean-Baptiste Ouédraogo, a, alors, demandé au général Diendéré «si le coup de force est consommé», et celui-ci a répondu par l’affirmatif, selon le témoin. Il était autour de 3h30 du matin et le témoin aurait alors demandé à partir. Il aurait quitté les lieux en même temps que l’ex-président Jean-Baptiste Ouédraogo.

Appelé à la barre le général Gilbert Diendéré a rejeté certaines parties de la déclaration de Monseigneur Paul Ouédraogo. A la réunion, «je n’ai pas dit que c’est impossible que les éléments du RSP fassent marche arrière. J’ai peut-être dit qu’il était difficile au lieu de impossible», a mentionné le général Diendéré.

L’audience a été suspendue vers 16h15 et reprendra demain jeudi 7 mars 2019, à 9h00.

Par Daouda ZONGO