Le procès suite à l’assassinat du président Thomas Sankara et douze de ses compagnons, débuté le 11 octobre 2021, se poursuit au Tribunal militaire délocalisé à la salle des Banquets Ouaga 2000. Le lundi 13 décembre 2021, c’est le témoin Eugène Somda, adjudant-chef major à la retraite et infirmier à l’infirmerie de la présidence à l’époque des faits, qui a été appelé à la barre pour faire sa déposition. Après sa déposition, l’audience a été suspendue pour cause de décès d’un magistrat militaire en stage et d’un avocat.
L’adjudant-chef major à la retraite, Eugène Somda, attaché de santé militaire, fait partie de la troupe du CNEC qui a marché sur Ouagadougou le 4 août 1983. Après la prise du pouvoir par le capitaine Thomas Sankara, les éléments du CNEC ont installé leur Quartier général au Conseil de l’Entente. C’est ainsi que le témoin y est resté comme l’infirmier des éléments du CNEC au Conseil avant d’être nommé infirmier major à l’infirmerie de la présidence.
Le 15 octobre 1987, il dit avoir participé à la réunion convoquée par le lieutenant Gilbert Diendéré, à l’époque, qui a pris fin vers «12h passé-13h moins». Vers 14h quand il partait à la présidence, il aurait vu «beaucoup d’éléments (du CNEC) qui bougeaient vers la radio (RTB radio)». C’est en étant à la présidence peu après qu’il entendra une première rafale puis une deuxième. Il apprendra d’un soldat que les tirs proviennent du Conseil de l’Entente.
«J’ai pris un soldat avec moi et nous sommes allés», a dit le témoin, informant qu’à l’entrée du Conseil se trouvait l’adjudant-chef Abdrahamane Zétiyenga qui les a empêchés de rentrer. «Il m’a dit que des instructions qu’il a reçues du lieutenant (Gilbert Diendéré), «dès que le président rentre, personne n’entre, personne ne sort»», a rapporté l’adjudant-chef major Eugène Somda. Il aurait insisté mais l’adjudant-chef ne l’a pas laissé rentrer et il a replié avec son élément à la présidence. «Je suis reparti au Conseil une deuxième fois, mais seul cette fois-ci», a déclaré le témoin qui a affirmé qu’il a négocié avec M. Zétiyenga qui l’a finalement laissé passer mais escorté par un soldat. «Après je me suis tourné je n’ai pas vu le soldat, j’ai continué à avancer», a relaté M. Somda.
En poursuivant son chemin il a vu le soldat Nabonswendé qui a dit : «halte là ! mains en l’air». «Il m’a fait déposer mon arme et mon trousseau (médical). Il m’a demandé : «Qu’est-ce que tu viens faire là ?». Je lui ai dit que c’est le lieutenant Diendéré qui m’a appelé», narre-t-il. Le soldat Nabonswendé a donc fait appeler le lieutenant qui est sorti. «Nous nous sommes assis sur un banc et je lui ai demandé ce qui se passe. Il m’a dit qu’après la réunion qu’on a eue le matin ça s’est dégénéré, il y a eu des tirs et le président est mort. Il m’a même montré les corps», a poursuivi l’accusé, à qui le lieutenant aurait dit de repartir à son service et d’attendre ses instructions. En sortant, il a informé l’adjudant-chef Abdrahamane Zétiyenga qui cherchait à savoir ce qui s’est passé, que le président est mort. «Il a attrapé sa tête», a fait savoir le témoin Somda.
L’adjudant-chef major à la retraite, Eugène Somda est reparti à son service où il a passé deux nuits (15 octobre-17 octobre 1987). «Le 17 matin le lieutenant m’a envoyé mon chauffeur d’ambulance me chercher pour m’amener voir ma famille», selon M. Somda qui déclare que dans son quartier les gens pensaient qu’il était mort et avaient même cotisé pour remettre à sa famille. «Cinq minutes à peine, le chauffeur me dit qu’on doit repartir car on lui a dit de ne pas durer. On est reparti et vers 17h on m’a laissé rentrer chez moi», a déposé l’adjudant-chef major Somda qui dit être resté une semaine sans travailler avant qu’on le rappelle.
L’audience a été suspendue après sa déposition pour cause de décès d’un magistrat militaire en stage et d’un avocat. Selon le président de la Chambre de jugement, le magistrat sera inhumé ce lundi à 14h et l’inhumation de l’avocat est prévue demain mardi 14 décembre 2021. L’audition de l’adjudant-chef major Eugène Somda se poursuivra le mercredi 15 décembre 2021.
Par Daouda ZONGO
