Me Séraphin Somé, avocat de la partie civile, a affirmé le jeudi 3 février 2022 que les commanditaires et exécutants du coup d’Etat du 15 octobre 1987 dans lequel l’ex-président burkinabè, Thomas Sankara, et 12 de ses collaborateurs sont morts ont « cherché par tous les moyens à cacher les cadavres » pour faire obstacle à la manifestation de la vérité dans cette affaire impliquant 14 accusés.
Premier à plaider à l’audience du jour, Me Désiré Sébogo est revenu sur l’infraction de la subornation de témoins impliquant le général Gilbert Diendéré et son chauffeur, Tondé Ninda Pascal alias « Mããng Naaba ». L’homme à la robe noire a démontré que les faits sont clairs quand à la culpabilité des mis en cause.
A sa suite, c’est Me Séraphin Somé qui a pris la parole pour avancer des éléments constitutifs des charges retenues contre le général Gilbert Diendéré. Le Conseil des parents des victimes a rappelé les « conditions indignes » dans lesquelles le président Thomas Sankara et les douze autres personnes ont été ensevelis. Les infortunés du 15 octobre 1987 « ont été inhumés à la sauvette dans des conditions catastrophiques sans leurs familles », a-t-il soutenu.
Pour Me Somé, l’accusé Diendéré Gilbert ne peut pas se dédouaner dans cette affaire de l’inhumation en cachette des 13 corps des personnes abattues au Conseil de l’Entente même si le lieutenant au moment des faits affirme que c’est le patron de l’Armée en son temps, le commandant Jean-Baptiste Boukari Lengani qui a ordonné au régisseur de la Maison d’arrêt et de correction (MACO), Karim Tapsoba, de procéder à l’enlèvement et à l’inhumation des cadavres. « C’est suffisamment clair, il (Gilbert Diendéré) a donné des instructions à Karim Tapsoba qui après avoir exécuté la mission en bon militaire lui a rendu compte » par la suite puisque l’accusé a dit que le régisseur est venu lui tendre un papier où étaient inscrits les noms des 13 personnes tuées lors de la fusillade.
Me Somé a insisté sur le fait que le Tribunal devrait, au moment de délibérer, tenir beaucoup compte, de la banalisation de la vie humaine dans dont il a été le cas dans cette affaire. Pour cet avocat, « il est clair, l’infraction de recel de cadavres mise sur la tête du général Gilbert Diendéré est suffisamment constituée », a-t-il insisté.
Me Ferdinand Nzepa a plaidé ce jeudi contre l’accusé Elysée Yamba Ilboudo qui est « un personnage clé du dossier » qui a livré « des informations capitales ». « Il nous a permis de remonter le fil de cette affaire. Les déclarations de Ilboudo sont crédibles », a déclaré Me Nzepa qui a trouvé que le prévenu a adopté une « bonne attitude et sincère » devant le juge d’instruction et la barre de la Chambre de jugement. Cependant, même s’il a reconnu l’apport inestimable qui soutient beaucoup la crédibilité même du dossier de 20.000 pages, il a aussi démontré la culpabilité de l’accusé en tant que complice dans cette affaire.
Quant à Me Patrice Yaméogo, il s’est chargé de démontrer en s’appuyant sur des éléments factuels du dossier, la culpabilité des accusés Nabonswendé Ouédraogo et Bossobè Traoré. Cet avocat de la partie civile a aussi puisé des éléments dans les déclarations de l’accusé Yamba Elysée Ilboudo qui édifient sur l’implication de Nabonswendé Ouédraogo. En effet, a-t-il développé, Nabonswendé Ouédraogo a embarqué le 15 octobre 1987 dans un véhicule que conduisait Elysée Yamba Ilboudo qui est parti du domicile de Blaise Compaoré où toute l’équipe du commando a démarré pour aller commettre leur forfaiture.
En plus de cela, Me Yaméogo a cité plusieurs passages de témoins et même des accusés qui ont identifié Nabonswendé Ouédraogo à différents endroits au Conseil de l’Entente toute en activité dans l’accomplissement de l’acte. Selon sa thèse, les éléments matériels et intentionnels sont établis.
Après avoir passé en revue les éléments factuels sur la culpabilité de Nabonswendé Ouédraogo, le second volet de la plaidoirie de Me Patrice Yaméogo a porté sur l’accusé Bossobè Traoré. A la force des éléments qui chargent le mis en cause, l’auxiliaire de justice a indiqué que la constitution des infractions de cet accusé ne fait l’ombre d’aucun doute. Il a dans cette optique rappelé « la constance des témoignages » des membres de la garde de Thomas Sankara et d’une restauratrice, une amie du prévenu, pour soutenir son argumentaire. « Traoré Bossobè a participé aux réunions préparatoires du coup d’Etat du 15 octobre 1987 et l’aide de camp de Thomas Sankara dans son témoignage le confirme », a martelé Me Yaméogo.
Par Bernard BOUGOUM