Le capitaine Boukary Kaboré dit «Le Lion» témoin dans le dossier en jugement relatif à l’assassinat du président Thomas Sankara et douze de ses compagnons a été appelé à la barre, le mardi 16 novembre 2021, à la suite du colonel-major à la retraite Daouda Traoré. Commandant du Bataillon d’Intervention Aéroporté (BIA) à l’époque des faits, il faisait partie de ceux qui avaient la charge de la sécurité de Sankara. Selon lui, le coup d’Etat du «15 octobre 1987 était minutieusement préparé et savamment orchestré et exécuté».
Après avoir «juré de parler sans haine, de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité», le commandant du Bataillon d’Intervention Aéroporté (BIA), qu’on disait proche du président Thomas Sankara, a souhaité faire quelques observations sur le jugement de cette affaire qui a débuté le 11 octobre 2021.
Pour lui la question de l’enregistrement du procès a été «mal traitée». «On a cité des articles pour dire qu’on ne va pas enregistrer», a dit «Le lion», soutenant que «c’est une question primordiale pour la crédibilité même de la justice». La seconde observation portait sur le nombre de victimes de cette affaire. Il a déclaré que les victimes dépassent 13 personnes. Il cite en plus de Thomas Sankara et de ses douze compagnons, Michel Kouama (commandant de l’ETIR), Vincent Sigué du FIMATS et 11 de ses éléments tués à Koudougou. Pour ce qui est de la dernière observation, cela porte sur l’exhumation des corps. Pour lui cela n’est pas bien et ça a des conséquences. «On est parti les réveiller, ils sont obligés de chercher des gens». Il a donc souhaité qu’avant la fin du procès que les restes des corps soient réenterrés .
Pour revenir sur ce qu’il sait de cette affaire du 15 octobre 1987, le capitaine Boukary Kaboré dit «Le Lion», affirme qu’il est le mieux placé pour parler de ça. «Le 15 octobre 1987 était minutieusement préparé, savamment orchestré et exécuté», a fait savoir le capitaine Kaboré qui a déclaré qu’«il n’était pas question d’aller arrêter Thomas Sankara».
Dans son audition, ce témoin a laissé entendre que Thomas Sankara savait que quelque chose se complotait contre lui. «On savait qu’on voulait le buter», a-t-il dit confiant avoir lui-même parlé de ça avec le président Sankara et lui a proposé d’arrêter Blaise Compaoré. «Il m’a dit de ne pas toucher à un seul cheveu de Blaise, que si je touchais un poil de Blaise, il n’allait plus m’adresser la parole jusqu’à la fin de sa vie», a-t-il poursuivi.
«La première personne à parler de complot d’assassinat de Thomas c’est le président cubain», a révélé Boukary Kaboré qui affirme que suite à cela le président Ghanéen Jerry Rawlings avait proposé à Thomas Sankara de s’exiler au Ghana. «Thomas a dit qu’il préférait mourir ici que de s’exiler», relate-t-il.
Le témoin à la barre estime qu’il a fait de son mieux pour protéger Thomas Sankara. Il lui a même proposé de démissionner pour remettre le pouvoir à Blaise Compaoré. «S’il démissionnait en remettant le pouvoir au numéro 2, je donnais 72 heures. Blaise allait partir. Il allait avoir soulèvement et on allait repartir avec tout le monde».
Après les tirs le 15 octobre 1987, le BIA était prêt à monter sur Ouagadougou, selon le témoin, qui dit avoir calmé ses éléments avant de chercher à avoir plus d’informations. «J’ai demandé à ce qu’on appelle continuellement le Conseil de l’Entente afin qu’on puisse entrer en contact avec quelqu’un qui puisse nous renseigner», a-t-il laissé entendre. «Quand on a pu entrer en contact avec le Conseil, j’ai demandé «où est Sankara ?» Blaise m’a dit que Thomas est mort. J’ai crié. Il a poursuivi en disant qu’il ne voulait pas le tuer, qu’il a envoyé l’arrêter», a dit Boukary Kaboré.
Au cours de son audition il a regretté le fait que deux de ses éléments qui ont été aussi témoins n’ont pas été cités pour venir donner leur version des faits. Il s’agit de Réné Yoda et Rasmané Ouédraogo. Me Farama, à sa suite, a souhaité que la chambre les cite à comparaitre, chose à laquelle elle n’a pas trouvé d’inconvénient. Elle a instruit «Le Lion» à donner les contacts de ces personnes afin qu’elles puissent être entendues.
L’audience a été suspendue à 16h et reprendra ce mercredi 17 novembre 2021, avec la poursuite de l’audition du témoin Boukary Kaboré.
Par Daouda ZONGO