Le pays de la Teranga est célèbre pour ses talentueux sportifs dont les footballeurs Jules Bocandé, El Hadj Diouf et actuellement Sadio Mané, et tout autant pour ces sublimes combats de lutte, ces spectaculaires Làmb, qui se tiennent dans des arènes en effervescence, cette discipline étant une véritable religion comme l’est le ballon rond au pays du roi Pélé. Mais de toute évidence, certains élus se seront découvert de nouveaux talents dans le noble art, au point de transformer l’hémicycle de ce Sénégal, champion de la démocratie, en ring pour un pugilat d’une rare violence qui a indigné et choqué plus d’un.
La scène s’est passée le 1er décembre 2022, en pleine session de l’assemblée. elle a débuté par des échanges plutôt houleux qui mirent aux prises deux élus de l’opposition et une parlementaire de la majorité présidentielle: résultats des courses, des chaises qui volent, des baffes administrées et la dame qui s’est diteviolentée par ses deux adversaires du jour. Circonstance sans doute aggravante, l’élue parlementaire portait un début de grossesse. Visiblement mal en point, la dame sera admise à l’hôpital pour des soins.
Le fait est assez rare pour ne pas être déploré dans l’ouest africain, où le Sénégal sert de phare de la démocratie. Alors on comprend mal qu’un pugilat d’une telle violence se tienne dans le «saint des saints» de l’expression démocratique, dans un pays qui affectionne tout particulièrement et la liberté de ton et la liberté d’expression.
La justice s’est rapidement saisie de l’affaire. Les deux députés «cogneurs» ont été embastillés. Et à l’issue du procès ce lundi, ils ont ramassé, chacun six mois ferme pour coups et devront verser, solidairement, la somme de 5 millions de francs CFA au titre de dommages et intérêts à la députée du parti majoritaire qui leur a servi de punching ball. Même si leurs conseils comptent interjeter appel du verdict, il faut reconnaître que les deux députés boxeurs s’en tirent à bon compte, puisque le parquet avait requis deux ans de prison ferme à leur encontre.
Qu’est ce qui fait autant s’échauffer les esprits au sein de l’hémicycle où doit prévaloir la force de l’argument et non l’argument de la force? Sans doute l’ambiance générale de pré-présidentielle dans laquelle baigne le pays et le fait que depuis les dernières législatives la majorité et l’opposition se tiennent pratiquement à égalité, en nombre de députés. De ce fait, aucune partie ne bénéficie de l’avantage d’être en mesure d’écraser l’adversaire en termes de nombre de votants. Ce malheureux intermède où les écharpes sont tombées, est loin d’être anodin, le président Macky Sall étant pratiquement au bout de son deuxième mandat, et que certains lui prêtent des velléités de briguer un troisième. En tout cas, l’opposition, avec des ténors comme Ousmane Sonko, Karim Wade et Khalifa Sall sont bien décidés à ne pas s’en laisser compter! La présidentielle de février 2024 se joue donc déjà dans les tranchées de l’assemblée nationale!
Mais on ne le reviendra pas comme une excuse, car le pays de la Teranga est accrédité d’une éthique politique qui cultive dialogue, écoute, consensus et débats civilisés. Que les députés de cette législature ne déforment pas cette belle image dont s’enorgueillit le Sénégal.
Baxul rek*
Par Wakat Séra
Baxul rek*: ce n’est juste pas bon