Le putsch manqué du 16 septembre 2015, perpétré par des éléments de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle burkinabè (RSP), était une «légitime défense», selon Me Hermann Yaméogo, accusé de complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, coups et blessures. Il comparait depuis le vendredi 19 octobre 2018, devant la chambre de jugement du tribunal militaire.
A la deuxième journée de son audition à la barre, Me Hermann Yaméogo a laissé entendre que le coup d’Etat manqué était une «légitime défense» et qu’il l’a «applaudi», car pour lui, le régime de la transition a fait beaucoup d’erreurs qui ne favorisait pas une réconciliation nationale. « C’est par légitime défense qu’ils (des éléments de l’ex-RSP) ont agi », a-t-il déclaré.
«J’ai applaudi le putsch du 16 septembre 2015» car «les propositions faites par le Conseil national pour la Démocratie (CND) concordaient avec nos attentes», notamment, «l’inclusion, le respect de la décision de la Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur la loi d’exclusion, l’organisation des élections démocratiques», a confié Me Yaméogo.
«Nous avons soutenu un régime qui venait remplacer un régime putschiste (transition), qui pratiquait l’exclusion», a déclaré cet inculpé. Selon lui ce qu’il «exprime comme opinions politiques (…), est protégé par la Constitution et des instances internationales» et ne constituent une infraction.
«Si exprimer une opinion mérite condamnation, que le tribunal le fasse», a-t-il affirmé, notant qu’ «il n’y a rien qui dit (qu’il a) comploté» pour faire un coup d’Etat.
Hermann Yaméogo, juriste et fils de l’ex-président de la Haute Volta (Burkina Faso) Maurice Yaméogo, a laissé entendre que «depuis (son interrogatoire) à la gendarmerie, (il a) su que c’est à des questions politiques qu’(il) aurait à répondre». Pour lui ce sont ses opinions politiques qui l’ont amené devant le tribunal. Il a soutenu qu’il n’a «aucune inquiétude par rapport» aux accusations, indiquant qu’il a «la conscience tranquille».
«A part le fait de dire que je soutiens ce régime (CND), quel acte ai-je commis ? Dans les faits, je n’ai commis aucun acte participatif à ce coup d’Etat. Je n’ai jamais fait appel à une mobilisation», a soutenu l’accusé. «C’est un putsch réparateur» et «pour nous, il était clair qu’on ne voulait pas le retour de ceux qui dirigeaient la transition, a-t-il poursuivi.
La partie civile, qui a réagi sur ce que l’accusé appelle «opinion» qui ne serait pas répréhensible, a notifié à Me Yaméogo, qu’il y a des avis qui constituent un acte infractionnel. En droit on peut y trouver «des opinions qui induisent des infractions», a dit Me Prosper Farama.
«Le (problème) c’est que ses opinions ont été traduites dans une déclaration qui soutient le CND. Cette déclaration est un acte matériel de soutien» aux putschistes, a argumenté Me Awa Sawadogo de la partie civile, pour qui cela est «un acte que le tribunal devra retenir» pour appliquer la loi.
Bien avant ces propos, Me Sawadogo a relevé la coïncidence des opinions consignées dans la déclaration des partis de l’ex-majorité, dont fait partie Me Hermann Yaméogo, et celles évoquées dans la note de prise du pouvoir par le CND.
Après les interventions de la partie civile, le tribunal a suspendu l’audience. Elle reprendra demain mardi 23 octobre 2018 avec la poursuite de l’audition du présent inculpé dans ce dossier du putsch manqué du 16 septembre 2015.
Par Daouda ZONGO