Il faut imaginer la solennité de la cérémonie de remise de diplômes il y a quelques jours sur le campus d’HEC. Nous sommes à Jouy-en-Josas, dans une salle immense. Tous les diplômés sont en toge noire, écharpe orange avec ce chapeau très particulier à quatre coins. Parmi eux, le chanteur du groupe Magic System, A’salfo, alias Salif Traoré. Et voilà ce que ça donne lorsque la remettante l’appelle sur scène. (www.francetvinfo.fr)
On imagine la surprise de la plupart des étudiants qui ignoraient sans doute que le chanteur de Magic System suivait une formation HEC. Les enseignants d’autres sections aussi d’ailleurs ! Il faut dire aussi que Salif Traoré a 44 ans. Il s’est lancé au moment du Covid. Les tournées de son groupe étaient arrêtées, il s’est dit que c’était le moment. En plusieurs étapes, il a passé des tests qui lui ont permis de rejoindre ce « Master en management d’une unité stratégique », lui qui, jusque-là, avait fait très peu d’études. Il est né dans un quartier populaire d’Abidjan, dans une fratrie de huit. Son père ouvrier dans le bâtiment n’a pas les moyens de l’envoyer en maternelle. Et quand il débarque en primaire, il se retrouve dans des classes de plus de 100 élèves. Salif Traoré ira quand même jusqu’en terminale avant de se lancer vraiment dans la musique, avec son frère ali qui est guitariste.
Le groupe Magic System voit le jour l’année des 17 ans de Salif. Au premier concert, ils sont au moins 30. L’histoire du nom est assez savoureuse. Ils se présentent avec des T-shirts siglés de la marque de potage Maggie récupérés au marathon d’Abidjan. On leur explique qu’ils ne peuvent garder ce nom car c’est de la pub. Ils ajoutent donc ce « c » qui donnera « Magic » et qui leur porte chance. Le premier tube sera « Premier Gaou » (1999) – mot qu’il traduit par « un idiot ».
Magic system c’est aussi une fondation aujourd’hui. Et vous ne serez pas surpris que l’un des objets principaux de cette fondation est de construire des écoles. La dixième est en train d’être construite. Notamment dans ce quartier très populaire où il a grandi et qu’il a sorti de l’ornière en montant également un festival de musique, le Festival des Musiques urbaines d’Anoumabo (Femua) à partir de 2008.
Qu’a-t-il appris à HEC ? Essentiellement le management, pour pouvoir gérer au mieux les entreprises culturelles. Il tient énormément à ce que les artistes africains continuent à se former. Cela le rend très fier vis-à-vis de ses quatre enfants. Et ce qui l’a particulièrement ému, c’est que la veille de son diplôme à HEC, sa fille, Rebecca, qui a 24 ans, a elle aussi été diplômée de son école de gestion, l’IPAG.
Cette fierté ne lui donne pas plus qu’avant des envies de politique. Son action, il la voit surtout dans le champ social. Un engagement qui lui a valu de nombreuses distinctions, il est notamment ambassadeur culturel pour la réconciliation et le prix de l’excellence dans le domaine de la culture et des arts vivants en Côte d’Ivoire. Il est aussi ambassadeur de bonne volonté de l’Unesco depuis une dizaine d’années.
Actuellement, A’salfo est en tournée avec Magic System en France et en Belgique. Mais le groupe est aussi en train d’écrire l’hymne de la Coupe d’Afrique des nations de foot qui aura lieu début 2024 en Côte d’Ivoire.
Source: www.francetvinfo.fr