Accueil A la une Ramadan au Burkina: le rendez-vous manqué du mercredi!

Ramadan au Burkina: le rendez-vous manqué du mercredi!

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Le croissant lunaire n'a pas été visible au Burkina, ce mardi (Ph d'illustration)

Jamais communiqué pour une fête n’aura été autant attendu au Burkina, comme le fût celui qui devait annoncer la fin du jeûne du Ramadan et donc la célébration de l’aïd El Fitr. Alors que tous espéraient l’apparition du croissant lunaire qui conditionne la fin du jeûne, pour ce mardi, la déclaration du comité ad hoc mis en place par la Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB) est tombée comme une douche froide. Les musulmans ne fêteront pas demain mercredi, et les Burkinabè n’auront pas ce jour chômé et payé de plus, qu’ils auraient ajouté à celui de jeudi, marquant l’Ascension du Seigneur Jésus Christ, chez les fidèles chrétiens.

Sur les réseaux sociaux, ils y sont, alors, allés de toutes les expressions pour exprimer leur désenchantement. Florilège: «Vraiment, Ramadan au Burkina Faso, on dirait Novelas, votre cœur bat plus fort», ou bien, plus humoristique, «jeudi est déjà occupé, prenez demain (mercredi, NDLR) ou vendredi», ou encore, «ceux qui étaient chargés d’observer la lune ont oublié leurs lunettes, sinon, comment comprendre que l’astre de la nuit soit vue dans tous les pays qui nous entourent (Mali, Côte d’Ivoire, Niger, NDLR) et soit invisible au Burkina?» Certains, affirmant carrément ne plus faire confiance «à nos observateurs de la lune», ont suggéré la constitution d’un «comité de contre-expertise». Et le temps nuageux et pluvio-orageux de cette soirée du 11 mai, pourrait avoir «caché la lune», ont conclu, fatalistes, des déçus du jour qui ne voulaient pas, pour un sou, perdre cette journée fériée, après avoir été sevrés du repos payé du 1er mai, la fête du travail étant tombée sur un samedi, déjà jour non ouvré.

Les Burkinabè, montrent ainsi, à souhait, combien ils adorent les jours fériés où le farniente est grassement rémunéré. Nombre d’entre eux, persuadés que la fête était pour ce mercredi, en rangeant leurs affaires dans la soirée de ce mardi, avaient même promis à leurs collègues, qu’ils ne se reverraient que le lundi prochain car, eux, avaient déjà trouvé l’astuce pour faire le pont du vendredi, après le férié du jeudi de l’Ascension, et se retrouver les deux pieds joints en plein week-end. C’est cela le péché mignon des travailleurs, du public ou du privé, certains que le salaire est garanti à la fin du mois, quel que soit le volume de travail effectué. Pendant ce temps, le paysan dont le fruit du travail nourrit, d’ailleurs, «les gens de la ville», ploie sous le dur labeur, soumis aux aléas climatiques, le dos ravagé par les rayons ardents d’un soleil impitoyable.

En Occident et dans les pays asiatiques, où les jours fériés et les congés de complaisance sont inexistants, on a même l’impression que les journées de 24 heures ne suffisent plus aux travailleurs. Nul n’est contre le repos, mais le repos qui vient après le travail bien fait, est le meilleur, car bien savouré. En Afrique, excepté le milieu rural et ses conditions rudes de travail, toutes les occasions sont bonnes, pour le citadin, de «feinter le travail». Pourtant, c’est le continent où tout est prioritaire, des invités-surprise indésirables comme l’insécurité et le Covid-19 étant venus compliquer davantage, la marche vers ce développement qui semble nous fuir. Et nous sommes toujours à accuser les autres, notamment «les blancs», d’être les pilleurs de nos richesses, trésors naturels que nous sommes incapables d’exploiter.

Mais comme les peuples ont les dirigeants qu’ils méritent, et vice-versa, seules des situations comme celle de la lune qui refuse de se faire voir pour permettre une journée chômée et payée de plus, permettront, il faut l’espérer, aux Africains, de savoir que le repos n’est mérité qu’après le dur labeur. «Travaillez, prenez de la peine: c’est le fonds qui manque le moins», disait à ses enfants, dans la fable de La fontaine, «un riche laboureur, sentant sa mort prochaine».

Déçus du communiqué des observateurs de la lune, point de regret donc, que Ramadan soit pour mercredi ou jeudi, car c’est un jour de travail de gagné, que dis-je, de non sacrifié. «Le travail est un trésor»!

Par Wakat Séra