Un vote sans fin ne peut qu’engendrer des contestations sans fin! Sans être un oiseau de mauvais augure, c’est la situation à craindre dans une République démocratique du Congo où l’opposition est vent debout contre l’organisation des élections générales du 20 décembre qu’elle qualifie de chaotiques. «La nuit, on bourre les urnes. Il y a des personnes qui ont voté plusieurs fois. Il y en a qui se servent des dissolvants pour revenir voter plusieurs fois». Amer, le candidat de l’opposition, Martin Fayulu qui ne fait que réitérer les ressentiments des autres opposants, s’élève contre ce processus électoral que l’archevêque de Kinshasa, Fridolin Ambongo Besungu assimile à «un gigantesque désordre». C’est donc dans une logique de contestation et de demande d’annulation de ces votes que les opposants qui y ont pris part, mais les rejettent, entendent manifester ce mercredi pour exprimer leur mécontentement. Sauf que le gouvernement s’oppose sans autre forme de procès à cette marche, qui peut être dupliquée dans les autres villes de la RD Congo, comme le prévoient les opposants.
«La manifestation de demain-ce jour NDLR-a pour but de mettre à mal le processus électoral engagé (…). Aucun gouvernement ne peut accepter que cela se produise sur son territoire. Donc nous n’allons pas nous laisser faire.» Foi du vice-Premier ministre de la RD Congo, en charge de l’Intérieur et de la sécurité, Peter Kazadi. Pourtant, affichant toute sa détermination, à moins qu’elle ne fasse dans le bluff, les opposants campent sur leur position ne se reprochant aucun acte illégal. «Cette marche aura bien lieu parce qu’elle est constitutionnelle. (…) Il y a eu un simulacre d’élections devant le monde entier, les résultats aussi sont un simulacre planifié». Cette réplique à l’interdiction de sa marche sera-t-elle le dernier mot de l’opposition? Il faut bien espérer que non et donner toutes leurs chances aux négociations entreprises par les chefs des représentations diplomatiques en poste à Kinshasa pour que le pire soit évité. Surtout que la police est prête à saisir cette opportunité pour se mettre en mode décrassage, gourdin et baïonnettes au poing, grenades lacrymogènes prêtes à être dégoupillées, dans des courses-poursuites où des balles, blanches ou réelles, quittent facilement les canons.
Il est toujours temps de discuter pour sauver ce qui peut encore l’être, surtout les vies innocentes. Du reste, cette marche, pourrait être la première d’une série de manifestations marquées par des répressions disproportionnées, le gouvernement ayant promis de ne pas se laisser faire. Comme si les dirigeants étaient contre leur propre peuple qui, pourtant, les a élus pour leur assurer protection et bien-être. La RD Congo, déjà confrontée à l’insécurité chronique, aux guerres civiles et attaques de rebelles de tout bord, dont ceux du M23, est sur le point, si rien n’est fait, de s’enliser dans une nouvelle crise à l’ampleur imprévisible. «Donc nous n’allons pas nous laisser faire». Des propos malheureux qui n’auraient jamais dû sortir de la bouche du vice-Premier ministre qui n’a rien fait, dans l’intérêt de la préservation de la paix et de la cohésion sociale, pour empêcher ces élections de la discorde nationale! C’est la face ignoble du pouvoir qui ne vise, sous les tropiques, que des intérêts personnels et égoïstes, au détriment de ceux des populations.
Question: pourquoi en RD Congo, comme ailleurs en Afrique, les élections, organisées à des coûts démentiels, portent-elles toujours en elles les germes de la haine et des violences meurtrières? Il est peut-être temps de passer à un autre mode de désignation des gouvernants.
En entendant il faut ramener à la raison les dirigeants congolais qui sont prêts à mater, dans le sang s’il le faut, leurs concitoyens pour le pouvoir!
Par Wakat Séra