C’est comme s’ils se sont passés le mot ou qu’ils ont tous totalement déchanté par rapport à ces élections générales qu’ils ont, à l’unanimité, qualifiées de «simulacre» et dont l’organisation a été, selon les mots de l’archevêque de Kinshasa, Fridolin Ambongo Besungu, «un gigantesque désordre». Ils semblent ne même plus accorder la moindre crédibilité à la justice de leur pays, encore moins à la Commission électorale nationale indépendante (Céni), «chef d’orchestre» de ce scrutin dont la proclamation définitive des résultats qui, à n’en point douter, détricotera davantage le tissu socio-politique en République démocratique du Congo. A preuve, les poids lourds de l’opposition, qui ont croisé le fer avec le président candidat, Félix Tshisekedi, pour la présidentielle, ont tous fait le choix, sans doute la mort dans l’âme, de ne pas déposer de recours auprès de la Cour constitutionnelle.
Seul, comme un téméraire où un passager d’un bateau à la dérive qui jette une bouteille à la mer, le candidat classé dernier à la présidentielle par la Céni, l’avocat, professeur et pasteur, Théodore Ngoy, a déposé un recours dans les ultimes instants du délai de deux jours imposé pour la circonstance. Quel sort sera-t-il réservé à la réserve portée par le candidat contre l’élection présidentielle? Pourra-t-il ébranler le président Tshisekedi, grand vainqueur, à en croire la Céni, de la présidentielle, avec un large score de plus de 73%? Sous les tropiques, et plus particulièrement en RD Congo, où tout est sous le contrôle du prince du moment, sauf tsunami, les scores de la présidentielle ne connaîtront pas de changement. Au mieux des cas, les chiffres seront réajustés pour donner un semblant de décence à la victoire du président sortant et entrant, entachée de contestations tous azimuts.
Pourquoi dont Théodore Ngoy l’a-t-il joué en solo, allant contre le mot d’ordre général lancé par les opposants, qui est de ne pas déposer de recours? Est-ce le prolongement de la division au sein des candidats de l’opposition qui ont fait l’option suicidaire d’aller à la présidentielle à un tour, sous plusieurs bannières, ce qui a eu pour conséquence logique d’émietter les voix de leur électorat? Est-ce le début de la fin de ce rejet en bloc des résultats de ce «nouveau coup d’Etat» dénoncé par Martin Fayulu? Autant d’interrogations qui ne font que mettre en exergue le schisme entre les opposants qui, comme à l’accoutumée, ont confirmé qu’ils ne savent s’entendre que sur leurs mésententes?
En tout cas, pour faire preuve de réalisme, le seul recours de Théodore Ngoy ne pourra pas conduire à l’annulation de la présidentielle, réclamée par les opposants qui se sont sentis floués dans des élections dont les dés étaient pipés d’avance. En effet, l’issue du scrutin était connue avant même sa tenue, selon cette marque déposée des pays africains habitués aux parodies d’élections. Une coutume à laquelle n’a pas dérogé la RD Congo avec cette reconduction pour cinq ans, du bail de Félix Tshisekedi à la tête de son pays.
Questions: où seront réglés les différends électoraux si les candidats déçus tournent le dos à la justice? La rue va-t-elle reprendre le pouvoir, quitte à mettre en confrontation des manifestants aux mains nues et des forces de l’ordre hyper armées comme si elles allaient au combat contre le M23? Les chasses à l’homme, avec toutes les dérives qu’elles engendrent, vont-elles refaire surface pour le plus grand mal des droits humains? Bienvenue dans la RD Congo de toutes les incertitudes!
Par Wakat Séra